Une soirée chez « un Thaï » à New-York est un peu une gageure
lorsque l’on connait particulièrement bien la cuisine et ce pays. Je m’étais
procuré il y quelques temps un livre de cuisine appelé « Pok Pok : Food
and Stories from the Streets, Homes, and Roadside Restaurants of Thailand» d’un
certain Andy Ricker. La préface étant écrite par David Thompson de l’un des
meilleurs restaurants thaïlandais au monde « Nahm » me laissa penser
qu’il s’agissait probablement d’un excellent ouvrage de cuisine.
Je n’avais pas réalisé à l’époque que cet Andy Ricker avait tout d’abord
ouvert une table à Portland dont la réputation grandissait au fil des années
avec sa cuisine du Nord de la Thaïlande, plus précisément de la région de
Chiang Mai et qu’une autre s’était donc aussi ouverte à Brooklyn. Andy Ricker
retourne fréquemment dans le nord de ce pays afin de parcourir les marchés,
questionner les petits vendeurs et également apprendre de nouvelles recettes.
Un apprentissage constant de techniques de cuisines qui font de lui l’un des
chefs les plus réputés au monde pour la cuisine thaïe.
Un restaurant qui peut se vanter d’avoir fait connaitre la cuisine du
nord de la Thaïlande aux Etats-Unis, qui aujourd’hui a même une étoile au
Michelin et qui est reconnu par un grand nombre d’autres chefs New-Yorkais pour
sa cuisine considérée comme étant extraordinaire.
C’est donc dans un coin plutôt perdu pour ceux comme moi qui ne
connaissent pas vraiment les emplacements de Brooklyn que se trouve « Pok
Pok ». Le long d’une artère peu animée à un coin de rue, une bâche qui
indique le nom du restaurant.
Une petite fenêtre où l’on peut guigner à l’intérieur
et une entrée classique par une sorte de jeu de deux portes pour arriver dans
la première salle à côté du bar. Un décor plutôt minimaliste d’ailleurs un peu
comme en Thaïlande, avec des murs recouverts de bois et des tables recouvertes
de nappes en plastique.
Pas vraiment de décor, quelques minutes d’attente et nous voici conduit
dans une seconde salle à l’arrière qui ressemblerait plus à une annexe.
Une
salle peut-être plus conviviale avec un mur de briques et a son opposé des
parois murales boisées plutôt jolies avec un buddha. Sur le mur, les mets du
jour inscrits à la craie sur une grande ardoise.
Les plats qui sont servis ici se mangent dans le modèle classique du
nord de ce pays, à savoir partagés et accompagnés de riz le plus souvent
gluant. Au centre de la Thaïlande on préférera manger la cuisine avec du riz au
jasmin ou plus communément appelé thaïlandais. Une cuisine qui est recommandée
d’être appréciée ici aussi avec fourchette et cuiller seulement. Certains plats
se dégusteront avec les doigts comme il se doit. Il faut admettre que la carte
est plutôt déroutante mais dans le bon sens du terme car aucun de ces plats ne
m’étaient connus. Ne cherchez pas les basiques curry rouges/verts/jaunes… nous
ne sommes pas dans une gargote pour touristes.
Un choix difficile car tout est fortement tentant et en plus il est
difficile de se faire une idée de ce qui va vraiment arriver à table. Nous choisirons tout d’abord un « Muu
Paa Kham Waan », du collier de sanglier frotté à l’ail, racine de coriandre
et poivre noir, lustré avec de la sauce soja et sucre, grillé au feu de bois et
servi avec des feuilles de moutardes froides et une sauce à base de piments,
citron vert et ail. Les dressages sont absolument authentiques, les saveurs nous
transportent dans le pays, c’est un plat magnifique.
Autre plat avec le « Yan Samun Phrai », une salade d’herbes
avec du curcuma blanc, des carottes, des navets, des feuilles de betel, du
basilic, des feuilles de citron vert, de la citronnelle, échalotes frites, noix
de cajou, cacahouètes, graines de sésame, crevettes séchées, du porc haché, des
piments thaïs dans une sauce légère à base de noix de coco. A nouveau un met
plein de saveurs avec ce côté très citronné des salades thaïlandaises.
Nous poursuivrons avec le « Naam Stii Khrong Muu Thawt », des
petites côtelettes de porc marinées acidulées, frites et servies avec du chou, cacahouètes,
gingembre et piments frais. Des morceaux de viandes très tendres et
magnifiquement parfumés que l’on accompagne des condiments placés autour.
Et pour terminer, l’« Ike’s Vietnamese Fish Sauce Wings », des
ailes de poulet bio d’origine Amish, marinées dans de la sauce de poisson et du
sucre, frites, enveloppées d’une sauce de poisson
caramélisée Phu Qoo et de l’ail,
servies avec une salade vietnamienne. Sachant
que nous sommes prêts du pays voisin, il est habituel que certaines recettes
traversent les frontières. La particularité de ce plat est le côté sucré du
poulet mais aussi le goût très prononcé de la sauce de poisson. Il faut être
friand de ce genre de saveur très authentique et si cela correspond à vos goûts,
a aucun moment hésiter car en plus il s’agit d’un des plats les plus demandés
et ayant du succès.
Probablement la table plus authentique et magnifique qu’il m’est été
donné de trouver en dehors du pays. Une cuisine vraiment fabuleuse et même
plutôt rare en dehors du nord de ce pays, réalisée avec brio. Les amateurs de
vraie cuisine thaïlandaise passeront un moment inoubliable. Une table avec une
étoile totalement justifiée.
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