Voici
probablement un des seuls bistrots à Genève qui en peu de temps a réussi à se
hisser dans le peloton de tête des tables de grande qualité avec une cuisine
gourmande basée sur des produits magnifiquement sélectionnés. Ce n’était
peut-être pas gagné d’avance que d’ouvrir le soir dans un quartier légèrement
décentré, mais les amateurs de repas soignés et d’un environnement fort
agréable ne se sont pas trompés. « Le Bistrot Laz Nillo » depuis ma
première visite s’est presque métamorphosé en proposant une carte vraiment
« excitante » avec des assiettes que l’on ne trouve pas partout,
oscillant entre un certain classicisme français et des créations plutôt
étonnantes.
Et tout
ceci grâce au grand dynamisme du patron Stéphane Raynaud qui a su monter son
équipe avec deux chefs, le premier de la région de Lille et le second de
Bretagne. Un très sympathique patron
passionné par la cuisine et les chefs du monde, sans oublier l’œnologie car les
choix des vins sur sa carte sont plutôt un modèle du genre.
Si la
journée le décor de la salle principale n’attire pas immédiatement l’œil, le
soir celui-ci est vraiment très agréable car les lumières sont bien étudiées,
conférant au tout une ambiance plus intime fortement appréciable.
Comme la
première fois, l’étudiée sélection des vins au verre se retrouve inscrite en
rouge sur le miroir un peu rococo du centre de la pièce. Je n’avais pas
remarqué la première fois, à moins que cela soit une dernière acquisition, un
ancien baby-foot qui s’harmonise avec goût avec l’ensemble des éléments et
couleurs de la pièce.
Un accueil
chaleureux et nous voici à l’une des tables où immédiatement l’on nous propose
un apéritif. Sur la suggestion de Stéphane, me voici avec une belle découverte
genevoise, un vin blanc nature de Mategnin appelé « Tropicôle » de
chez Paul-Henri Soler en 2014, issu du cépage Charmont
(croisement entre Chardonnay & Chasselas).
La carte nous est tendue est c’est vraiment l’embarras du choix car les
énoncés sont souvent très attirants et un grand nombre de plat se réfèrent à
des ingrédients très inattendus, comme les cocos de Paimpol, le vin Barbeito,
le pithiviers et j’en passe… Le patron face à nos hésitations nous suggère
simplement de le laisser faire…
En
attendant une assiette d’un excellent saucisson de pied de cochon avec une très
bonne texture, pas gras et bien assaisonné.
Un repas
découverte mais aussi carte libre laissée au patron en ce qui concerne les vins
en me proposant un surprenant vin espagnol blanc, le Bolo de Rafael Palacios de
Valdeorras en 2014. Un nom très célèbre
chez les amateurs de vins en Espagne car c’est le jeune frère de Alvaro
Palacios producteur de Priorat qui est considéré comme l’un des plus grands et
qui ici produit depuis 2004 un vin à partir du cépage local Godello. Profond en
bouche, avec un magnifique nez, crémeux et fruité.
Avec ce
vin, arrive une tranche de pain grillée avec du beurre salé et sur le dessus de
fines tranches de truffes noires de la Drôme. Simplement jubilatoire…
Puis une
autre entrée en matière avec un carpaccio de noix de coquilles Saint-Jacques
simplement arrosées d’un filet d’excellente huile d’olive et d’un trait de
vinaigre balsamique ; une lamelle de courge et une de rais pour ajouter
une texture. Un produit d’une fraicheur exceptionnelle provenant directement du
coquillage ouvert sur place comme il se doit.
Quelques
extraordinaires couteaux simplement sautés à la poêle avec une fine persillade.
Quand la qualité du produit est la…le simple fait de l’apprécier rend souvent
moins important la nécessité de totalement le transformer.
Je
poursuivrai avec un verre de Sauvignon du Domaine « Un saumon dans la
Loire », un vin de Touraine frais avec des arômes de pamplemousse et
d’ananas.
Première
entrée avec l’Œuf mollet croustillant sur son lit de cèpes, crème de coco de
Paimpol. Voici le genre de plat d’une énorme gourmandise avec cet œuf frit
entouré d’une fine panure mais encore coulant, déposé sur une très onctueuse
crème de cet haricot blanc frais à écosser cultivé en Bretagne depuis le XVIII
ème siècle. Sans oublier les cèpes frits probablement au beurre. Le tout
s’harmonise à merveille et ne fera que nous ravir.
C’est en
lisant l’intitulé de cette assiette, Terrine de foie-gras de canard et féra fumé
du « Bistrot », que je me suis immédiatement rappelé l’une des plus
belles préparations de foie-gras du monde celle de Martin Berasategui avec son
foie-gras à l’anguille fumée recouverte de pommes vertes et d’un caramel. Demandant
à Stéphane d’où vient cette idée, sans préalable concertation il me relate son
expérience avec également Berasategui… Ici pas du tout une copie mais une
association fabuleuse qu’est celle du foie avec le poisson fumé. Servi avec un
pain grillé, un mélange de salade, voici un foie gras parfait en texture,
assaisonnement et saveur qui est une belle réalisation bien inspirée.
Le Boudin
noir aux pommes, caramel au vinaigre de cidre est un pur délice pour celles et
ceux qui apprécient cela. A la grande différence du boudin Suisse souvent
adapté ou édulcoré, celui-ci ne contient pas de crème et à ce goût sincère du
bon produit. Les pommes justes fondantes en dessous, le caramel légèrement
acidulé complète à merveille.
Passage au
rouge avec ces vins moins connus de la vallée du Rhône avec un
Beaumes-De-Venise Les Ophrys 2013 de la Ferme Saint Martin. Vin puissant
et d'une grande élégance.
En met
principal un Risotto Carnaroli aux noix de Saint-Jacques bretonnes, copeaux de
parmesan. Le seul riz selon moi pour faire un risotto irréprochable, les
fameuses noix servies en entrées mais ici snackées avec précision, à savoir
dorées mais encore légèrement crues au milieu. Un délicieux fond de sauce et le
parmesan dessus.
Et encore
les Fameuses joues de cochon de chez « Menuz » confites aux agrumes,
purée de pommes de terre de « Benjamin ». Les joues de porc sont
encore meilleures que celle de bœuf et toujours très moelleuse, et
ingénieusement associées avec une compotée de fruits sucrés types orange er
citron. Une délicieuse purée traditionnelle en accompagnement. Les amateurs de
sauce bien concentrée apprécieront à sa juste valeur ce plat trop rare.
Le Parmentier
de bœuf du « Bistrot », copeau de foie-gras de canard est
visuellement très proche d’un dessert type bavarois. Lui aussi très gourmand avec
une viande fondante et ce foie-gras sur la purée amène une touche bourgeoise
comme un tournedos Rossini.
Un verre de
Pomerol Château des Templiers 2011, un petit domaine qui produit un vin doté d'une belle matière veloutée aux
arômes de framboises, de mûres et de cassis.
Premier
dessert avec le Baba de « Nathalie » arrosé à la bouteille du
« Patron » et crème vanille. Oublié des décennies, un dessert
toujours délicieux quand remarquablement exécuté et généreusement arrosé de bon
rhum, accompagné de crème fouettée et même d’une gousse de vanille !
Un rhum de
la maison Chamarel de l’ile Maurice qui est l’une des trois restante avec un
alcool très végétal et bien épicé. On s’émerveillera également de déguster
plutôt une rareté méconnue du grand public, un vin de Madère qui n’est pas
qu’utilisé pour des fonds de sauce…mais comme les prestigieux portos, dégustés
avec discernement. Ce vin doux oxydatif est vieilli en fût de chêne français
réalisé à partir du cépage Malvasia, possède une robe ambre lumineuse avec un
nez suave de caramel et des arômes de fruits de la passion et d’agrumes.
Nous
terminerons avec un exemplaire et intemporel Soufflé minute au Grand-Marnier.
Une
fantastique soirée qui peut se terminer à une heure tardive autour du baby-foot
que le patron « mettra en route » pour les amateurs…
Voilà
probablement comment un restaurateur passionné a réussi à démontrer en peu de
temps comment ont peu proposer à une clientèle une cuisine bistrotière parfois classique
de haut niveau avec des produits vraiment parfaitement sélectionnés ainsi que
des propositions de crus au verre tout aussi pertinents. Une ambiance
décontractée avec un service efficace, des prix sagement tarifés qui font de ce
lieu probablement l’une des plus belles tables genevoises de 2015.
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