« A
l’étage aux dix cloches », en voila un drôle de nom d’établissement… Il
s’agit en réalité d’un pub datant de 1752 dans le quartier de Shoreditch où
« Jack The Ripper » (Jack l’éventreur) tua l’une de ses dernières
victimes…Mary Kelly…en 1888. Un petit pub qui justement s’appelait «The Jack
the Ripper » jusqu’en 1988 et qui héberge à l’étage un restaurant. Il
semblerait aussi qu’à une certaine époque, le « grand-grand père » de
Jamie Oliver en fut le propriétaire et aujourd’hui l’établissement a repris son nom initial.
Situé au
coin d’une rue dans commercial St, le pub malgré une restauration n’a pas
vraiment changé en apparence avec son coté victorien. Vous pourrez toujours y boire
un verre avant de monter au premier étage dans un endroit des plus suprenant.
Une fois à l’intérieur
vous aurez vraiment l’impression de faire un saut dans le passé au temps de la
période de « l’automne de la terreur ». Sur les parois vous verrez des représentations de
Spitaflfields de l’époque, le marché couvert qui se trouve juste en face.
A l’origine
cela devait être une table temporaire de trois mois concrétisant le projet
d’une équipe très « mode » appelée « The Young Turks » avec
la participation d’un autre fantastique établissement « The Clove
Club » visité il y a quelques semaines de cela et d’ailleurs où l’un de
membres de l’équipe assure la restauration. Une équipe qui périodiquement
officiait dans divers établissements dont celui-ci. Chacun des membres ayant des références comme le Fat Duck, Noma
et bien d’autres. Ce conglomérat appelé
« The Young Turks » fut baptisé à son époque « le futur de la
cuisine britannique ».
C’est suite
au succés sans précédent que « Upstairs at Ten Bells » décida de
prolonger l’aventure avec Isaac McHale (maintenant au Clove Club), Daniel
Willis et Johnny Smith qui s’entourèrent
d’une équipe de cuisiniers avec à leur tête le chef Giorgio Ravelli. Giorgio est un
Tessinois ayant travaillé entre autres à
l’étoilé Ledbury reconnu aujourd’hui comme étant l’une des meilleures tables de
Londres, la Table d’Edgard au Lausanne Palace et même fut stagiaire chez Noma.
Une fois au
premier après avoir gravis un escalier plutôt peu engageant, vous vous
trouverez dans une très belle salle à manger vraiment romantique avec seulement
une dizaine de tables qui sont toutes décorées avec des chandeliers. Une pièce
vraiment très intime avec une lumière très douce qui vous plonge presque dans
un univers différent et des œuvres d’art presqu’un peu étranges comme le
tableau sur l’un des murs. Une atmosphère un peu bohême et brocante avec des
tables de bois qui en vu passer des convives et des chaises disparates. La
magie opère…. On trouve rapidement l’endroit plein de charme avec en plus un
service de qualité, motivé, connaisseur et décontracté.
Le menu ou
plutôt carte change fréquement. On y sert ici une cuisine que l’on pourait
qualifier de « Britannique moderne » et qui ne rentre pas tout à fait
dans la catégorie des gastropubs mais dans quelque chose de bien mieux !
Une cuisine de saison, recherchée, étudiée, juste dans les saveurs et les
cuissons avec un chef qui vraiment se démène. Un chef avec qui j’ai eu la
chance d’échanger quelques mots de plus en français et « qui a envie de
faire ce qui lui plait dans un lieu inconventionnel et fantastique».
Un
magnifique pain est apporté déjà tranché qui gustativement semble avoir été
cuit au feu de bois.
Un menu
avec des snacks, des entrées, plats principaux et desserts à des tarifs
presqu’incroyables pour autant de qualité.
Je commence
avec le plat « signature » ; le poulet frit au babeurre et sel
de pin. Un snack qui évidemment aura l’apparence de nuggets…pour le coté
ludique mais la volaille est de première qualité, a reposé dans le babeure une
nuit entière est ensuite entourée de polenta et frite sans que l’on discerne la
graisse en la mangeant. Le tout ayant une fine saveur de pin et présenté sur des
branches du même arbre. C’est absolument délicieux, gourmand et une parfaite entrée en matière a ce qui va
suivre.
Second
snack qui peut facilement être comparé a certaines entrées d’étoilés à la mode
comme l’Osteria Francescana avec le couteau à la sauce vierge et pamplemousse.
Présenté sur un lit d’algues et de gros sel, le couteau est préparé sous forme
de tartare auquel il aura été mélangé le jus de pamplemousse pour apporter une
légère amertume, de l’acidité et de la douceur mais aussi entre autre de la
coriandre en grain écrasée et de l’aneth. Une très grande fraicheur et légereté
en bouche qui en fait une entrée magnifique à 3 GBP… On croit rêver.
Ce soir
c’est le lancement d’une nouvelle entrée qui m’a totalement bluffé ; des calamars
grillés, chanterelles d’automne, jeune pousse de côtes de bête et risotto de
céléri. Les calamars sont d’une fraicheur impeccable, cuits à a perfection avec
un léger goût grillé. L’association avec les champignons est un régal en bouche
et le tout est élégamment déposés sur ce délicieux risotto végétal accompagné
de feuilles encore croquantes. Un plat d’une grande maitrise à un niveau
gastronomique.
En met
principal, je choisis un plat d’une très grande rareté car l’élément principal
ne se trouve presque jamais sur aucune carte et si c’est le cas à des prix
souvent surnaturels. De la « grouse » rôtie, riz noir, crapaudine de
betterave et cerises vinaigrées. La « grouse » est le roi des gibiers
à plumes et quasi introuvable en dehors de la Grande-Bretagne sauf peut-être
chez les grands étoilés et encore. Souvent chassée en Ecosse, elle a un goût
inégalé, d’une très grande finesse et qui finalement ne ressemble à aucun autre
gibier. Ici préparé en deux temps avec une chaire très tendre, encore rosée et
un l’extérieure juste saisi. Un fond de sauce aux saveurs puisssantes mais non
écoeurantes, une suprenante préparation à base de riz noir moulu à laquelle a
été introduit un concentré d’abats du gibier. Quelques cerises pour apporte un
peu d’acidité et une feuille d’une sorte de choux vert quin apporte un coté
végétal et croquant à l’assiette. Un met royal !
Pour
terminer, un dessert très léger et à propos à la fin de ce fantastique repas; dans une tasse un sorbet concombre et citron
vert arrosé au Gin Hendricks. Plutôt un entremet parfais pour apporter un peu
de fraicheur en bouche. Le mélange concombre, citron et gin est une association
idéale.
Voici un
repas absolument exceptionnel dans un endroit inhabituel où l’on en ressort
impressionné par autant de justesse dans cette cuisine qui comme précédement
dit est parfois plus gastronomique que de bistrot, avec un chef plein de créativité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire