Il fallait
que je termine en beauté avec ma dernière soirée en Californie et à San Diego
c’est à La Jolla que l’on trouve normalement les plus belles tables car c’est
le quartier nord chic de la ville. Qui dit chic…dit clientèle aisée et donc a
priori bonne tables, en tout cas aux Etats-unis. Je m’étais déjà rendu au George's
at the Cove mais je dois avouer que je ne me rappelais plus vraiment comment
c’était et surtout c’était dans un cadre professionnel, donc nous ne sommes pas
toujours concentrés sur son assiette et surtout on ne prend pas toujours ce que
l’on souhaite… En tout cas je me rappelais « que c’était
bien »…
George's at
the Cove fait ce que l’on appelle de la « nouvelle cuisine
californienne ». Mais de quoi s’agit-il ? Assez difficile de définir précisément de quoi il s’agit car ce mouvement a été lancé il y a quelques
années par le célèbre « Chez Panisse » de Berkeley.
Si je dois
caractériser cette cuisine je dirais qu’elle est associée avec un mode de vie
californien, liant le plaisir et le mouvement. Souvent réalisée avec des
ingrédients faciles à digérer et non les sempiternelles fritures et
mayonnaises. Des produits frais et souvent provenant de fermes ou issus de
l’agriculture biologique. Fruits, légumes, poissons ; des produits de
saison et locaux de qualité
indispensables pour réaliser les recettes.
Cette
cuisine a évolué a évolué ces dernières années en y intégrant les cultures
asiatiques et latino-américaines.
On pourra
dire… « et alors…quoi de réellement neuf ? ». Utiliser de
la sauce soja japonaise ou hoisin chinoise dans les plats est monnaie courante
en Europe. Nous sommes d’accord… Il faut seulement se rappeler que dans la
plupart des restaurants américains, c’est salade césar au mieux…et burgers…
Comme exemple typique de cette cuisine…ce que l’on appelle le « california
roll » qui n’a rien de japonais mais comme son nom l’indique est
californien ; élaboré avec la feuille d'algue à l'intérieur, contenant du
concombre, du crabe et de l'avocat et parsemé sur l'extérieur de graines de
sésame ou de tobiko. Bref à priori rien de nouveau à l’horizon, simplement une
version « light » de la cuisine américaine avec des touches « exotiques ».
Désolé mais ce n’est « que cela »…
Malgré tout
je me réjouissais de venir chez George car l’endroit est plutôt beau dans « cette
cove », une petite baie avec des rochers et une faune visible sur le
rivage.
Il y a
trois niveaux chez George's at the Cove, le niveau supérieur avec une terrasse
qui donne sur la baie et même s’il y a des chaufferettes, cela reste tout de
même frais et de toute façon la cuisine est plutôt « standard », le bar
et le bas ou en fait le chef Trey Foshee maintes fois nominés par diverses
associations gastronomiques, réalise une « cuisine californienne moderne ».
D’entrée je peux vous dire que j’ai été totalement bluffé ! J’en suis
ressorti vraiment sous le charme total.
Le décor est très agréable avec ces différentes sections, un bar avec son cellier, des pièces avec de confortables sofas ou chaises, des tables en bois plutôt moderne. C’est moderne, agréablement structuré et les éclairages sont doux.
Première lecture de la carte et c’est plutôt l’étonnement car cela à l’air vraiment très intéressant. Au choix des plats individuels ou le menu en quatre plats qui nous a tentés. En réalité on sélectionne des plats de cartes pour composer le menu et cela pour la somme de 72 USD qui est plus que raisonnable, me rappelant avoir payé 63 USD pour une viande la veille…
Première entrée appelée : Betteraves, truite dorée marinée à l’aneth, crème
fraiche, genièvre. L’assiette immédiatement me laisse penser que ce repas
restera mémorable. Un dressage très actuel ; équilibré, beau et qui invite
à déguster. La betterave qui semble être également un légume mode est déclinée
en trois manières : en rondelle légèrement vinaigrée, cuite en cube et en
crème très parfumée. La truite elle est fumée avec quelques œufs probablement
de saumon, la peau de la truite a été frite pour amener une touche croustillante
à l’assiette. Un peu de crème givrée et en goutte, quelques feuilles peut-être
de cresson mais avec un goût différent et quelques brindilles d’aneth. Ce plat
me fait plutôt penser à quelque chose de Scandinave ; en tout cas c’est
léger, les saveurs sont équilibrées, les jeux de textures des betteraves avec l’autre
jeu de texture du poisson, parfait.
Autre moment impressionnant avec l’assiette : Crabe Dungeness, racine de cèleri, poire asiatique, menthe. C’est également magnifiquement dressé. Ce crabe est comme d’accoutumée une délicatesse, la poire apporte un côté croquant, la menthe une saveur poivrée, la petite sauce en fond d’assiette est prodigieuse avec ce goût de citrus prononcé.
Le second plat que je dégusterai me laissera une autre grande impression : les sardines locales grillées, cèdre, moules marinées, Aori Ika, fenouil sauvage, crème battue. Notre fantastique serveur m’amène une cloche de verre sous laquelle se trouve un peu de fumée. L’odeur est celle du bois de cèdre fumé et sur l’assiette une impressionnante composition. Des sardines en filets, sur le dessus du calamar en fins morceaux, deux moules au goût légèrement vinaigré, la crème en mousse et des cubes de fenouils. La sardine qui a un goût plutôt prononcé est en rivalité avec les autres saveurs. C’est un plat magnifique car rares sont les préparations de ce poisson ou l’on trouve de l’équilibre en bouche.
Autre surprenante entrée, le homard local, avocat, radis, tangerine, kaki, jambon serrano. A nouveau un joli dressage où les associations douces entre fruits et produits de la mer sont heureuses, légères et délicieuses.
Arrive un des plats principaux qui sera un très grand moment. L’agneau californien, champignons sauvages, amandes, raisins, topinambours, moutarde. L’assiette à quelque chose visuellement d’assez sauvage avec les couleurs brunes et rouges. L’agneau cuit à la perfection est cuit de deux manières : en filet rosé et en confit. Le fond de sauce est une merveille avec cette réduction de vin au miel, les noisettes broyées sur le côté ; la petite touche sucrée et fraiche avec le raison, le côté terreux du champignon que je crois était de provenance chinoise et quelques touches de sauce légèrement moutardée, de la roquette mais ici frite. Une fabuleuse composition au tour de l’agneau qui est probablement l’une des plus belles assiettes que j’ai pu déguster récemment avec cette viande.
Pour moi l’espadon de la pêche locale, tangerine, olive, côte de bette. Un problème avec ce plat…. L’espadon est trop cuit…sec. Notre serveur me demande si tout va bien et je lui signale ce problème. Immédiatement il me propose de remplacer le plat avec quelque chose d’autre. Un peu gêné car j’ai quand même malgré tout dégusté les 2/3 de mon assiette qui en ce qui concerne les saveurs gustatives étaient à nouveau parfaites avec le côté légèrement fruité, me dit qu’il va m’amener l’agneau pour parer à ce problème. C’est vraiment la classe que sans discuter un restaurant admet son erreur et pour contenter le client remplace le plat sans aucune discussion. Chapeau !
Avec ce repas nous avons choisi une bouteille de Sauvignon blanc du réputé domaine Silverado ; un vin avec des arômes de fruits exotiques et de citron. Suivi de deux verres de vin rouge ; une Syrah Copain « Tous Ensemble » de Mendocino.
Alors que
les desserts semblent arriver, je suis tenté par la jolie carte de vin
liquoreux. Nous commandons également un café…mais malheureusement la machine à espressos est en panne… Pour s’excuser
nous avons eu droit à trois verres offerts sachant que ce que celui que j’avais
choisi était aussi presqu’épuisé.
Un petit
verre de Cargasacchi Invincible Sun Pinot Grigio Santa Barabara County. Un
blanc fruité, doux, aur arômes de pèche. Ensuite un vin plus proche d’un
Sauternes de la Napa valley ; le Far Niente « Dolce » Napa 2006 et une énorme découverte avec un Alcyone
Tannat, Atlantida Uruguay. Si l’on goute aveuglément vin, il aurait presque des
arômes de café ! Semblable à un Porto mais aussi avec des saveurs de
chocolat, de caramel et de figues. Impressionnant.
Une crème à l’orange, noisettes, Nasturtium, poivre noir, mains de bouddha, crème glacée Sculpin IPA. Un dessert d’une très grande légèreté avec une grande variété de saveurs telles que la main de Bouddha est une variété de cédrat, un agrume aromatique. Ce fruit pousse sur un buisson ou un petit arbre, qui possède des longues branches parsemées d'épine. La glace à la bière d’une micro-brasserie locale et ce biscuit au poivre.
Pour moi une tarte chaude au chocolat, betteraves rôties au café, crème fraiche, verdure de betterave, granulés de cacao, glace dulce de leche. Très belle assiette gourmande et originale avec ce gâteau coulant et surtout l’association de betteraves sucrées.
Ce fut un repas exatrodinaire de bout en bout avec des plats créatifs, des saveurs recherchées, des associations téméraires et toujours réussies. Un cadre très agréable et un service de très grande qualité. Assurément mon meilleur repas de ce séjour en Californie.
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