Il y a comme des établissements qui se surpassent, font la différence et
qui méritent vraiment d’être reconnus comme d’exceptionnelles tables.
J’écrivais dans un autre compte-rendu que le mot tapas avait une signification
un peu vague et qui pour un certain nombre de personnes ne représentent que des
amuse-gueules de type charcuteries, fromages, olives, et fritures. Mais certaines tables d’une
nouvelle génération ont révolutionné ce tapas en proposant quelque chose de
beaucoup plus sophistiqué et de parfois gastronomique. Le pays basque se vente
de préparer les meilleurs tapas appelés là-bas pintxos mais il semblerait que
d’autres régions emboitent le pas. Maintenant on peut se poser la question
« quelle est la différence entre un tapas gastronomique servi sur une
assiette et une entrée dans un restaurant français… ». Eh bien franchement
pas grand-chose…
« Mechela »
restera probablement mon plus beau souvenir à Séville. Pas un établissement
type espagnol pour touristes ni une taverne, mais plutôt un lieu assez épuré, plutôt
calme et une ambiance très conviviale. Un établissement qui propose une cuisine
créative très intelligente et gourmande, ce qui n’est pas monnaie
courante. Une salle plutôt petite où il
faut obligatoirement une réservation, un personnel souriant et décontracté, des
prix vraiment défiants toute concurrence pour une telle qualité.
Dans une
petite rue, deux fenêtres avec du grillage et la porte sur le côté. Pas le
genre de lieu qui tape à l’œil et seuls probablement les clients bien
renseignés viennent ici.
Un comptoir
où éventuellement vous pourrez manger mais on s’y sentira tout de même un peu à
l’étroit. Mais n’hésitez pas s’il n’y a plus de tables disponibles.
Pas plus de
six tables en bois, murs blancs et comme presque unique décoration le menu du
jour sur des ardoises murales. Des suggestions qui changent quotidiennement en
fonction des arrivages et des produits de saison. Mais aussi une carte
régulière mais qui elles aussi est fréquemment revisitée. Des assiettes qui
font souvent référence à des plats de la cuisine andalouse mais souvent avec un
brin de folie. On peut rester dans du plus classique mais même ces mets sont
toujours dressés de manière assez esthétique.
La carte
des vins elle aussi est présentée sur un des autres murs de la pièce sur une
ardoise.
En
consultant les mets proposés, nous voici offert quelques excellentes olives
vertes.
Puis une très
bonne salade de pomme de terre comme autre bouchée avant de réellement démarrer
le repas. Un léger gout de vin blanc et de vinaigre évidement de Xeres, huile d’olive.
Chaque plat
qui suivra furent cuisinés avec beaucoup d’attention. La gosses crevette
croustillante avec un « ajo blanco » aux noix de cajou et œufs de
poisson. Le crustacé est cuit é la perfection à savoir encore un peu
moelleux-cru à l’intérieur. Débarrassé de sa peau, il est entouré de cheveux d’anges
pour la touche croustillante, une technique que l’on retrouve parfois en Asie. En
complément quelques œufs de poisson pour une saveur plus iodée et la fabuleuse
idée d’associer cette soupe d’Andalousie plutôt ici sous forme de sauce. L’« ajo
blanco » (ail blanc) est une des variantes du gazpacho des plus populaires
et a aussi pour origine l'Andalousie,
notamment Grenade, Huelva et Malaga, mais la recette est également célèbre en
Estrémadure. C'est un des plats hérités des cultures arabes présentent en
Espagne avant l'unification du pays qui normalement est toujours à base
d'amandes et d’ail, mais qui ici a réalisé avec des noix de cajou. Un trait d’huile
d’olive, un raisin, des saveurs harmonieuses et des textures variées pour une
très belle assiette.
Seconde
impressionnante assiette avec le cœur de thon grillé avec une vinaigrette de
mangue et un « salmorejo » de fraises. Le thon provient de la région
où l’on trouve encore du thon rouge, il est juste poêlé et encore légèrement
cru au centre comme il se doit. La mangue apporte une petite touche douce et
exotique, contrasté par l’acidité légère du vinaigre. Et le plus étonnant sera
ce « salmorejo » qui devrait être qui est une soupe andalouse un peu
proche du gaspacho à base de tomate et d’ail mais plus simple, cependant ici
réalisée avec de la fraise. A vrais dire j’étais plutôt très suspicieux que de
manger un poisson avec une sauce à la fraise… Mais l’association fut vraiment
parfaite car cette sauce est légèrement salée. Avoir ajouté un peu de sel a
cette sauce, néanmoins ajouter une fraise fraiche et déguster cela avec le
poisson fût une très agréable découverte.
Autre
émerveillement avec pourtant quelque chose de simple et évident mais à nouveau
admirablement retravaillé. Le poulpe grillé avec une vichyssoise et des
croutons. Poulpe très tendre découpé en tronçons, quelques croutons à l’huile d’olive
pour le côté croquant et au lieu de mettre des pommes de terre comme dans le
traditionnel « poulpe à la Galicienne », celles-ci ont été
transformée dans cette classique soupe.
Une petite touche de piment en poudre fumé. C’est juste parfait.
Nous
finirons avec peut-être un plat plus classique mais à nouveau réalisé avec
brio, le riz noir, donc à l’encre de seiche et garni de couteaux, crevettes et
un aïoli. Cuisson parfaite du riz, crustacés frais et poêlés, petite sauce bien
aillée pour accompagner.
Un très bon
dessert ressemblant a un pain perdu qui a été trempé dans du vin doux avec une
crème glacée à la vanille vraiment onctueuse. C’est un dessert de la semaine
sainte en Andalousie appelé « torrija », qui a été inventé au XVème
siècle par des nonnes. On dit aussi que c'est un dessert typique de la période
de Pâques du fait de la ressemblance des « torrijas » à de la viande
rôtie, nourriture qui est interdite pour les catholiques pendant cette période.
Sympathique
vin de Toro avec une amusante étiquette représentant le folklore de cette
région, le 24 Mozas, un vin souple mais profond en bouche avec une belle
palette de fruits rouges.
Vraiment une très belle table avec ce qui est
appelé de manière un peu surprenante des tapas, une cuisine locale mais avec
beaucoup d’astuces, des saveurs toujours équilibrées et beaucoup de gourmandise.
Un vrai coup de cœur pour probablement notre plus belle table à Séville.
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