Je ne
savais pas vraiment si j’allais publier ce billet car rarement j’ai eu autant
de doute à propos de cet établissement qui a tout fait ce qui fut possible pour
rendre cette soirée agréable.
Mais
commençons néanmoins par un sujet qui risque de fâcher certains de mes
compatriotes… La cuisine Suisse…n’existe pas. Ou alors ce ne sont qu’une série
de plats à base de fromage ou autres plats campagnards autour des cochonnailles.
Et voilà. Certes il y a un certain
nombre de tables réputées en Suisse comme celle du défunt Benoit Violier mais
cela n’a pas grand-chose de Suisse.
Mais là où
il faut vraiment « faire une expédition » …c’est au cœur de la Suisse
Alémanique. Certains vont faire des expériences gastronomiques en Scandinavie,
dépensent des fortunes pour « la dernière création du chef X », se
réjouissent de participer au « prochain repas à quatre mains de Y» et
se plaisent à découvrir des assiettes avec d’improbables associations, de
fleurs, des décalages d’aliments sur le côté et j’en passe…
Chers
foodistes…venez en Suisse Alémanique car cela sera une expérience au-delà de
toute attente ! Vous pourrez arroser la toile de surprenantes photos, épater
vos amis en soirée, paraitre comme l’incontournable gastronome dans votre
entourage !
Essayer de
résumer cette cuisine est absolument impossible car il faut la vivre…la voir...et
surtout la goûter ! Et à nouveau j’insiste…je ne fais pas allusion aux
fondues, aux raclettes ou autres papets de poireaux…mais une cuisine venue d’une
planète étrange…
Je me rends
régulièrement dans l’Oberland bernois et séjourne à Interlaken. Une petite
ville bien fréquentée l’été principalement avec des flots de touristes venus
visiter la région de la Jungfraujoch mais aussi le point de départ pour
plusieurs stations de skis telles que Grindelwald, Mürren wt Lauterbrunnen.
Nous y trouverons une restauration plutôt internationale allant de « l’italien
à l’indien en passant par de la junk food », bref rien de vraiment très
excitant. Même les palaces du coin ne proposent pas grand-chose d’exceptionnel
et le plus souvent à des prix démesurés et injustifiés.
Donc
pourquoi ne pas « simplement manger local…Suisse ». En consultant le site web vert et blanc que
tout le monde critique…mais que tout le monde utilise… Je me dis que 250
personnes considérant le « Goldener Anker » comme excellent et
terminant numéro 1 du classement ne peut pas fondamentalement être une grossière
erreur. En plein centre, dans un immeuble, une table qui d’ailleurs appartient à
l’hôtel du même nom.
Quelques
affiches murales à l’extérieur pour de probables manifestations, quelques pots
de fleurs, de la lumière à l’intérieur.
Une salle vraiment
très étrange comme je n’avais pas vue depuis des dizaines d’années… Des
lumières entre psychédéliques et de Noël, des peintures murales comme dans les
années 70, des disques encadrés et une série de tables où l’on ne sait pas si nous
somme dans le restaurant ou dans le café.
Au fond, un
écran géant diffusant une compétition de ski, un billard, une espèce de scène
avec une décoration « disco ». Difficile de savoir si nous sommes
dans un restaurant, une maison de la jeunesse et de la culture, une
discothèque, une salle de jeu, un café, un bar ou un restaurant… On dira que c’est
un peu de tout cela… Une décoration kitsch à souhait.
Un accueil
très aimable de la serveuse…une patronne qui tourne autour des tables pour s’enquérir
de notre satisfaction, nous sommes dans un lieu hors du commun !
La carte…pas
facile de faire son choix, entre plats asiatiques peu inspirés, produits pas
trop attirants comme de la dinde et des spécialités tout de même un peu
banales.
Nous
resterons sages avec pour commencer une salade de mâche, croutons, lardons et œufs
durs. Jusque-là rien de très extraterrestre, sauf peut-être la saucière qui
nous est amenée et qui pourrait contenter une tablée d’une demi-douzaine de
personnes. On dira que tout se fait avec beaucoup de générosité. Une salade
tout ce qu’il y a de plaisant.
Alors
passons à cette cuisine d’un autre monde avec des dressages comme dans peu d’endroits
avec l’Entrecôte BEO Beef au beurre maitre d’hôtel. Rien à dire avec la viande
simplement grillée mais quelle surprise de trouver une assiette avec du kiwi,
des fraises, un fruit exotique jaune non identifié et une fleur ! Je vous
l’avais bien dit…On ne va pas nous apprendre à dresser les assiettes en Suisse,
tout le monde nous copie !
Mais
attention, voici une grande expérience…L’Entrecôte au lard, sauce au poivre
vert, brocoli, pommes-frites. Allez
savoir pourquoi mais l’entrecôte arrive sur une brochette dont l’extrémité est
une épée… La sauce est quelque chose que je serais bien incapable de reproduire
ou alors je devrais faire un stage d’une année pour reproduire cela. Assurément
ce fond de sauce que toutes les familles Suisses Allemandes connaissent provient
d’une boite en poudre de l’une de nos « deux marques bien de chez
nous » …Epaisse, avec un goût indéfinissable de « vieille sauce »
trop salée et légèrement montée j’imagine avec de la fécule de maïs. On y aura
ajouté les quelques pauvres grains de poivre vert mais ici on y aura associé
témérairement des graines de maïs ! Il fallait y penser… Les brocolis
cuits à l’eau sont trop salés, surcuits et recouverts de pignons grillés ! Deux
pauvres tomates cerises acides pour « égayer » l’assiette… J’oubliais
cette tranche de lard cachée sous la sauce et qui ne fait qu’ajouter un goût
salé prononcé. Franchement…un moment
jubilatoire que nulle-part au monde vous ne pourrez vivre !
Les frites
sont passables mais sentent un peu l’huile.
Une erreur
de bouteille et nous voici servi un excellent Valpolicella Ripasso Gaso de 2011.
Malgré tout
le service fut impeccable, la patronne ravie que cela plaise, tout ceci dans la
bonne humeur ! Et même avec le sourire, un dessert qui nous fut offert qui
lui aussi est une autre expérience en soi. Une « sorte » de crème « Stalden »
pour ceux qui connaissent…avec de la banane dedans… Quelque chose entre dessert
pour bébés et desserts pour soldats à la cantine…
Une soirée
vraiment inhabituelle, une cuisine que je qualifierais d’unique, une expérience
presque ethnique que tous les soi-disant foodistes doivent vivre… Les
expériences scandinaves ou autres….ne vaudront jamais celle-ci. On rigolera
tout de même en pensant à celles et ceux qui donnent un avis sur le site « vert
et blanc »…
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