lundi 6 juin 2022

otra.cosa.taberna, Barcelone

 

Pour être tout à fait transparent, je n’aime pas la cuisine fusion qui la plupart du temps est complètement ratée car n’utilise que des ingrédients clichés d’un pas ou d’un autre sans aucun équilibre et qui répond ou peut-être répondait à une mode il y a quelques années de cela. En tout cas Barcelone est un peu à l’origine de ce mouvement, probablement lié au brassage culturel local et les idées de Albert Adria. Malgré ce préavis négatif, il y a quelques exceptions et cette adresse avait retenu toute mon attention. Initialement ouvert en 2022 dans le quartier gothique, le Born, puis la pandémie arriva et l’établissement déménagea à Sant Andreu qui pour ceux qui connaissent est un quartier en dehors du centre, avec son originalité et bien entendu pas ou peu de touristes. Un quartier qui, je risque de dire, deviendra vraiment à la mode dans les prochaines années à Barcelone comme Sant Antoni. Mais une adresse facilement accessible en moins de trente minutes car avec le métro, l’on va partout à Barcelone !

Lorsque vous regardez à l’extérieur, l’endroit ressemble à l’un de ces bars très locaux et communs de Barcelone. Ils ont conservé « l’ambiance » de celui-ci, mais en entrant à l’intérieur, vous voyez tout peint en bleu et un néon disant « cuando quieras », ou quand vous voulez. L’endroit est minuscule et charmant, peu conventionnel. L’espace tout bleu Klein est décoré de chaises jaunes et roses et les tables en marbre ou style camping en bois, donnent une ambiance très cool à l’intérieur. Vous pouvez également vous asseoir à côté bar ou se trouve cette cuisine de quelques mètres carrés ou près des fenêtres à l’extérieur. Réservation plutôt conseillée.


Un petit bistrot avec un concept que je peux d’entrée affirmer de complètement différent de ce que l’on peut trouver ailleurs car ce n’est pas une cuisine fusion au sens propre…mais « autre chose »… Une table qui porte justement le nom adéquat ! Une proposition gastronomique latino-américaine inspirée par entre autres le Chili mais aussi, l’Asie et le local avec une sacrée sélection de produits comme dans peu d’endroits. Toute la matière première qu’ils utilisent dans l’élaboration des assiettes est nourrie par le commerce local et, principalement, par le quartier lui-même ; générer un réseau de personnes fait partie des principes de l’établissement. C’est d’ailleurs que je comprends que Perello est l’un de leurs fournisseurs comme la Cansaladería Puig ou Cal Rovira.


Pas des produits bas de gamme comme c’est souvent le cas dans ce genre d’établissement et on doit venir ici en connaissance de cause car ce n’est pas peut-être au goût de tout le monde.


Puis de la bonne musique type cumbia en fond sonore ! Felipe, c’est un charmant personnage qui vous accueillera au nom de Felipe González, le fondateur et propriétaire, qui cherche à créer un concept gastronomique différent, qui ne va pas se contenter de servir du conventionnel dont beaucoup d’entre nous se sont déjà ennuyés, et avant tout un objectif ambitieux, mais honnête : servir des produits de haute qualité à un prix totalement abordable, travaillés de manière extraordinaire.


Felipe est un jeune et talentueux chef chilien qui, malgré son jeune âge, a une expérience incroyable. Il a travaillé dans des cuisines à San Francisco à New York et pendant de nombreuses années en Espagne, y compris dans des restaurants très célèbres, entre autres chef R&D du groupe Escribà et chef de partie de Soho Houe Barcelona. Felipe est un être humain humble et amical dont le plus grand souhait est que ses invités puissent profiter et passer un bon moment, s’installe à côté de vous, vous explique donc ce concept et vous guidera pour le choix de ce repas. Dans notre cas, c’est lui qui choisira pour nous tous les plats, ce que je recommande grandement.

Nous avons commencé e repas avec une délicieuse coca de san Adria, qui vient e Badalona avec de l’anis del Mono, de l’anchois de l’excellente maison Perelló nettoyé à la main. Assaisonné d’huile d’olive, de merken dont le mélange lui-même se compose de piments de corne de chèvre séchés au soleil et fumés moulus avec des graines de coriandre, et parfois du sel de mer est ajouté. Aussi du yuzu, et d’huile d’anchois lui-même. Un peu sucré et un peu salé, c’est franchement superbe et évidemment, c’est autre chose… Je vous avais prévenu…

Dans un même registre que de l’anchois que nous venons d’apprécier, nous partons avec sa sœur lactique : la Pizzeta del Perelló. Mélange de fromage cabrales, yaourt grec et bulgare à base d’un gâteau Inés Rosales et couronné d’un anchois fumé de Perelló. C’est à nouveau surprenant en saveur et d’un incroyable équilibre.

Puis un classique revisité qui se trouve être l’une des meilleures salades russes de Barcelone , sur un lit de légumes cuits et d’haricots verts crionisés, la bonito del norte et les olives sont incorporées, pour finir avec une touche de mojo picón, d’huile d’olive et une mayonnaise qui vient de compléter le plat.

Superbe Ceviche Nikei, une élaboration inspirée par le chef péruvien Ciro Watanabe avec du thon de l’Ametlla de mar pêché au harpon, de la salicorne d’Arenys de Mar, des algues wakame, nori, de l’oignon rouge, du sésame noir, de l’oignon croustillant et de l’avocat sur un lait de tigre japonais, avec des sphérifications de yuzu, le Shichi-mi tōgarashi, couronnant le plat. Le Shichi-mi tōgarashi, également connu sous le nom de nana-iro tōgarashi ou simplement shichimi, est un mélange d'épices japonais commun contenant sept ingrédients. Tōgarashi est le nom japonais du Capsicum annuum, un piment rouge originaire d'Amérique centrale et du Sud, et c'est cet ingrédient qui rend le shichimi épicé.

Magnifique salade de tomates aux olives, kalamata, tapenade, sauce romesco, salicorne, huile d’olive et anchois de Perelló.

Et pour terminer, si vous êtes un inconditionnel du bikini, en fait un incontournable trikini avec du pain de leur boulangerie de confiance (Forn del Passeig, bien sûr), du jambon blanc de la Cansaladeria Puig, du fromage et de l’huile de truffe.

Comme dessert un étonnant cheesecake complètement revisité et crémeux, comme une sorte de fromage blanc dans lequel l’on trempe des morceaux de biscuit.

Aussi, il faut savoir que tous les vins sont naturels, qu’il a choisi lui-même lors d’une dégustation à l’aveugle, et dispose d’environ d’une quinzaine de références qui varient d’une semaine à l’autre et d’un mois à l’autre. Alors pour le choix, le rituel c’est…  « Donne moi le titre d’une chanson » et en fonction de la réponse Felipe vous proposera un vin ! Cela sera un agréable blanc Vibria 2020 de Sifer Wines, Matarraña, Bajo Aragón. Cépage macabeo, non filtré, non collé, sans SO2 ajouté, fermenté en amphores et inox, zéro manipulation. Blanc pâle nuageux, une légère touche de carbone laissé (presque imperceptible), frais, croquant, citronné, très bonne acidité qui le rend parfait pour les plats de poisson cru ou même les plats épicés, finale légère et rafraîchissante.

Une expérience complètement différente qui va au bout des choses, ici on ne retrouvera rien de ce que vous pourrez manger ailleurs à Barcelone, comme je vous l’ai déjà dit…c’est autre chose…

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