Dernière grande
table proche du Delta de l’Ebre puisqu’il s’agit de l’un des étoilés de la
région, Les Moles qui est connu pour faire partie du groupe sélect de
restaurants inclus dans le Guide Michelin avec une étoile depuis 2013 et deux soleils
dans le Guide Repsol.
Ici le chef est Jeroni Castell, chez qui vous pourrez trouver une cuisine locale, avec une élaboration soignée qui utilise la technique et, surtout inclut le plaisir. Le tout dans un espace moderne, comme un coup de pinceau de contraste dans le monde rural environnant, car le restaurant est situé dans un ancien espace industriel reconverti. J’apprends que l’établissement est situé dans ce qui était la première carrière d’Ulldecona (l’extraction de la pierre est l’activité industrielle la plus importante de la municipalité), où les pierres pour les moulins, appelées « taupes », ont été fabriquées, d’où le nom de leur restaurant.
Le décor du restaurant est rustique mais également un peu moderne, avec des meubles en bois entre des murs en pierre, une combinaison qui crée une atmosphère accueillante et agréable. Le jeu de lumières est plutôt très agréable, l’atmosphère paisible.
Aimable accueil par Carmen, la femme de Jeroni, qui a la charge de la salle et aussi de la cave, parlant même le Français.
La proposition gastronomique est assez unique car est basée sur des menus à thèmes avec une impressionnante succession de plats. Deux menus ; le premier avec dirons-nous les créations de l’année comptant 25 plats ou plutôt bouchées et un second appelé « la route parcourue » qui retrace 30 plats emblématiques de ces 30 dernières années. A priori on pourrait se demander si cela ne va pas être trop mais comme précédemment dit, ce sont principalement des bouchées sur environ 3 heures de temps… Un exploit que de proposer un tel nombre sachant qu’à chaque fois cela sera un changement d’assiette, de couverts et de style. Donc si vous vous attendez à quelques plats seulement, ce n’est pas le modèle retenu. Si vous connaissez d’autres étoilés Espagnols comme par exemple Quique Dacosta, je me rappelle d’une cinquantaine de bouchées ! Dans ce menu à 125 euros, vous pourrez donc apprécier la maîtrise du chef et les techniques de cuisson innovantes qu’il utilise. Chaque plat ayant son année de création inscrit sur la carte qui vous sera offerte. Parfois des bouchées ludiques, parfois très modernes ou à l’inverse classiques car inspirées de la cuisine locale.
Les plats et bouchées seront structurés selon un ordre non pas chronologique mais par thème avec toujours l’intitulé de celui-ci. Puis autre particularité, ce menu de dégustation a quelque chose de spécial, car nous commençons par la fin et finissons par le début !
NOUS
COMMENCERONS PAR LA FIN...
Garçon! L’addition...
Une
addition réalisée avec un papier comestible, que l’on regarde amusé. Pas de
goût particulier.
DEUX BONBONS ET DESSERT
La sucette d’huile
des oliviers millénaires et le sel du delta de l’Èbre (2011).
Boules de
gomme de vinaigre Terra Alta « Mercè del Menescal » (2011).
On continue
sur le côté ludique de la chose et en utilisant bien entendu les produits
locaux. Le vinaigre est assez semblable a du balsamique. Réalisé avec du moût
de vin concentré par ébullition. Vieilli et élevé en fûts de chêne pendant un
minimum de 4 ans. C’est un produit unique et breveté.
Cône d’olive noir avec glace à la tomate.
Un autre exemple de dessert, un cornet de crème glacée, qui se trouve être une entrée. Le monde à l’envers dans ce menu dégustation.
CAFÉ,
BOISSON ET CIGARE (2011)
Cappuccino
d’artichaut de Benicarlo et noisettes
Verre de
bouillon de légumes au whisky
Cigare de poivron vert et mousse de poireau
Le cigare, que
l’on mange entièrement sauf sa bague. C’est ce que j’ai dit, nous avons
commencé le menu avec un cigare et un café qui, généralement, est ce qui est
fumé et pris à la fin d’un bon repas.
L’APÉRITIF
Tapa et
vermouth variés – gelée de vermouth d’Ulldecona, crème glacée aux olives
farcies et nuage de coques en escabèche (2014). Ceci se mange avec une
cuillère, car vous ne pouvez pas boire, à l’intérieur il y a une crème glacée.
Les olives sphèriques
(Coupage DO Baix Ebre/Montsià) sont consommées avec le bâton de l’assiette.
VESTIGES DE LA PAYSANNERIE (2020)
« Sardines
de casco » Anchois en salaison avec un jus de tomates rôties. Un peu sur
le modèle et saveur des cocas.
Il y eut aussi un chariot de pain artisanal. Depuis 20 ans, ils fabriquent le pain eux-mêmes, mais en 2019, ils ont décidé de faire un changement en fabriquant du pain uniquement avec du levain, de longues fermentations et de manière traditionnelle.
UNE
PROMENADE DANS NOTRE JARDIN BIODYNAMIQUE
Une très
jolie assiette avec la Camomille sauvage.
Le Fenouil
avec un biscuit à l’huile d’olive extra vierge avec un beurre de fenouil
gazéifié.
La Betterave,
qui est une meringue de betterave dans différentes textures.
... MAINTENANT, NOUS POUVONS COMMENCER À MANGER
Salade de
crevettes rouges de Tarragone sur mosaïque de légumes et de tomates et
vinaigrette avec à l’huile Priordei (2014). Cette salade de crevettes Costa
Daurada est probablement l’un des plats qui m’a le plus plu, accompagnée de
légumes du jardin biodynamique du restaurant et de textures de tomates. On la
mange à la cuillère, en prenant un peu de chaque ingrédient.
Pour représenter la région une assiette intitulée Le delta de l’Èbre avec les huîtres « Ostras del Sol » (2009) qui si je m’abuse a des relations avec Tabouriech de l’étang de Thau. Rasoir, moule cuite à la vapeur, et huître au naturel. Comme dans l’étang en France, les huitres sont élevées avec un mécanisme de poulie, ils les soulèvent de sorte qu’ils obtiennent le soleil pour simuler les marées.
Maquereau aux civelles (2009). Les pibales (ou civelles) sont des alevins d'anguille que l'on trouve dans les rivières et les fleuves. Cet ingrédient était autrefois considéré comme le "plat du pauvre", aujourd'hui il est onéreux et de plus en plus rare. Coca enduite de beurre d’ail, poisson cuit au four vapeur à basse température, civelles sautées avec une fleur d’ail sur le dessus.
Concombre de mer, morue pil pil et plancton (2017).
Cannelloni de seiche farcis aux champignons et aux langoustines. Vraiment un très bon plat qui d’ailleurs est l’un des plus anciens de la maison, la partie externe des cannellonis est la seiche.
Raie avec une sauce marinière et gnocchis de pommes de terre (2013). Un plat inspiré de l’enfance du chef et le plat de sa mère, le Suquet de raya. Dans son étui cuit à basse température, accompagné de suquet de fruits de mer avec arêtes de poisson, gnocchis crémeux de pommes de terre et cartilage de raie pour se souvenir de la friture du poisson.
Une soupe à l'oignon (2016). Cette soupe à l’oignon est faite avec le jus de l’oignon lui-même, sans eau ajoutée, et accompagnée d’un œuf au plat avec du jaune de carotte et du parmesan.
« All i pebre » d’ anguille (2007). Normalement, c’est un ragoût d’anguilles préparé par les pêcheurs du marais, est préparé avec une sauce à base d'ail, de piment et de paprika est sans nul doute un des plats les plus authentiques de la Communauté Valencienne. Ici une longe d’anguille à basse température, avec sa purée d’ « all i pebre », son émulsion d’ail et de persil escalivée.
La côtelette, l’œuf et les pommes de terre : l’harmonica de thon rouge de Balfegó. Cet harmonica est une coupe du thorn Balfegó de l’Ametlla de mar. C’est ce qu’on appelle de cette façon d’avoir cette forme harmonique lors de la séparation de la nageoire dorsale du dos de l’animal. Grillé, une purée de pommes de terre style Robuchon et un jaune d’œuf séché dans du sel et du sucre.
Foie gras et patate douce.
Un délicieux cannelloni croustillant de queue de taureau (2008). Une purée de patates douces et un trait de vin rouge. La version traditionnelle de la recette de queue de bœuf avec du vin rouge.
LES DOUCEURS :
Huile Arbequina
Leocadia EVOO, vinaigre, sel et poivre (2017). Nous commençons la partie sucrée
avec le premier dessert : les quatre éléments d’une cuisine salée. Larme d’huile
d’olive extra vierge d’Arbequina de Vinaròs, espuma de vinaigre balsamique de
Terra Alta de Cal Menescal, crème glacée au poivre avec sel rose et gâteau aux
épices.
Le jardin : roses, violettes, jasmin, hibiscus et thym (2018). Ce jardin de fleurs est inspiré par leur jardin avec : crème de rose, crème glacée violette, un mini slushie de feuilles, gâteau à la tomate, sel d’hibiscus et autres fleurs de saison.
Les Macaronis bolognais (2012) qui est une technique de El Bulli que j’avais gouté chez Estimar. Quelques macaronis en version sucrée, évidemment. La sauce bolognaise est faite à partir de fraises aigres, la crème glacée est du miel et du miel orange, un miel Ramon local. Avec une trompe l’oeil de fromage de noix de macadamia râpé.
Une version sucrée de notre potager (2020).
UN BRIN DE TOILETTE :
Une
trousse de toilette (2010). Dernière passe, une trousse de toilette de petits fours
pour nettoyer et reprendre la routine. Nivea, qui est une crème de roses. Un pulvérisateur,
qui est de l’eau de thym pour respirer. Un rouge à lèvres gelée de framboise. Une
brosse à dents qui est un biscuit à la cannelle avec son dentifrice, une crème
à la menthe. Ludique.
Et toujours cet excellent vin qu’est ce blanc de la région de Tarragone. Le Cami de la Font 100% Macabeu Vinyes del Tiet Pere, jaune paille avec des reflets dorés; un mélange nasal intense de fruits mûrs, quelques notes plus confites, beurré et des notes végétales plus fraiches, peut-être du fenouil; du gras dans la bouche, avec du volume et très persistant.
Trente plats plus tard on se dit que c’est quand même une prouesse même si certains avaient moins d’intérêts que d’autres. Ma préférence ira principalement pour les plats principaux et peut-être même les viandes ensuite les produits de la mer. Jamais un moment d’attente, une parfaite orchestration, un déroulement sans heurts, une expérience en plus d’être un excellent repas.
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