dimanche 22 septembre 2024

Gurí, Barcelone

 

Une nouvelle remarquable adresse qui ne va pas passer inaperçue, celle de Nicolás Zas un chef d’origine Uruguayenne au parcours plutôt impressionnant, lié à la diversité des endroits où il a travaillé. Pour ces raisons, on ne peut vraiment pas associer cet établissement à encore un autre de ces lassants « restaurants fusion «  essayant d’associer la cuisine d’une origine a quelques saveurs exotiques , en tentant de plaire aux locaux.


En discutant avec Nicolás, il nous dit que lorsque nous parlons de gastronomie uruguayenne, nous devons inévitablement mentionner d’autres cuisines telles que l’italienne, l’espagnole et d’autres cultures puis que le pays a subi plusieurs vagues d’immigrants, puis même la culture méditerranéenne. Ce qui fait que la proposition culinaire de Guri sera plutôt originale et pas du tout dans ce registre fusion.


Originaire de Montevideo, il a étudié la cuisine à Lanzarote et a fait le saut en Australie puis en Nouvelle-Zélande. Puis il a eu l’occasion de travailler également ici à Barcelone comme chez Ginette, l’Hôtel Arts, et je crois COME de Paco Méndez. En cuisine, une équipe variée avec le chef chilien Cristian Cáceres en tant que sous-chef, qui vit également ici depuis des années. Ce dernier a vécu par intermittence à Barcelone pendant 20 ans, laissant la Méditerranée derrière lui pour aller au Pays basque et faire partie de l’équipe d’Andoni Aduriz chez Mugaritz. Il a également travaillé chez Llamber et le défunt Tanta de Gaston Acurio, pour n’en nommer que quelques-uns. 


Gurí est un mot qui signifie enfant ou garçon en lunfardo (argot populaire utilisé à l’origine par les classes inférieures de Buenos Aires qui a ensuite été introduit dans l’espagnol populaire de l’Uruguay), ;mais au pluriel, « gurises », amplifie les concepts d’un groupe d’amis spirituels.


Plutôt petit, avec peu de tables, ue cuisine ouverte et un grand et long bar pour six convives avides de tabourets pour manger près de la cuisine, tout respire l’intimité et la familiarité. Aun de la fréquentation de ce soir, visiblement le concept fonctionne à merveille. Une décoration soignée mais informelle.


La cuisine est donc conçue sur une base méditerranéenne claire en termes de bouillons et de sautés : dans laquelle les légumes et les herbes aromatiques jouent un rôle important.

La carte est courte et recherche le dynamisme avec l’introduction et la libération des plats avec une certaine régularité. Ce ne sont pas des changements soudains ou complets, beaucoup d’entre eux sont plus que des changements, des adaptations, le résultat de produits de saison, qu’ils essaient toujours de faire biologiques.

Ils ont un « menu dégustation » avec deux entrées et cinq plats qu’ils choisissent pour 47 euros. Nicolás aime d’ailleurs sortir de la cuisine pour expliquer aux convives certains plats qui portent sa signature.

Pour démarre un pain au levain accompagné de beurre fumé et de sel travaillé au charbon, puis un pâté de foie de poulet, d’orange et de brioche.  Ce pâté a une texture onctueuse et une saveur très douce  et l’orange confite s’y marie parfaitement.


Il existe plusieurs exemples, plus ou moins évidents, plus ou moins subtils, de ce pont qui cherche le mélange entre le Río de la Plata et la Méditerranée. Par exemple, l’empanadilla, qui, lors de son ouverture il y a un peu plus d’un mois, était à base de maïs et s’est transformée en d’autres farces, accompagnées de fromage Urgelia et de sauce romesco. Absolument fait maison, pas gras du tout et incroyablement croustillante. 


Un plat excellent avec la laitue grillée à la sauce créole (poivrons, poivron et tomate) arrosée d’un filet de citron fermenté. La laitue est très bien trouvée, et c’est le condiment idéal pour donner un contrepoint frais au grill. Autre élément uruguayen déterminant : le gril, le feu, les braises, le puissant parfum de fumée qui transforme une simple laitue en quelque chose d’apothéotique. C’est composé de bourgeon osmosé dans un smoothie sauce créole puis grillé. 


Plat de la soirée avec les coquilles Saint-Jacques sauvages accompagnées d’oignons caramélisés, de haricots frais et d’une crème d’amandes et de jeunes pousses d’oignon.


Une trouvaille avec les tortellinis maison à la ricotta et chou kale, courgettes et pistache.


En plat principal, un croupion d’agneau, avec son fond, et purée de panais. La sauce réduite est exceptionnelle, avec sur la viande des graines de moutarde marinées. Une saveur grillée délicate et un jus de viande puissant et réduit.


Premier dessert ou entremet, parfois servi en cocktail ; une mousse d’herbe de maté, de gin et de citron.


Le dessert, avec la  version déconstruite du « chajá », un gâteau traditionnel uruguayen composé de meringue, de génoise et de pêche.


Chez Gurí, on essaie d’offrir des vins pour tous les goûts : des vins traditionnels aux vins naturels et aux vins biologiques, mais toujours, comme ils le disent, ce sont des vins avec une certaine histoire derrière eux. Des vins « différents et amusants ».  Par exemple ce NVDE SBL qui est un sauvignon blanc élaboré avec un minimum d’intervention où le vignoble et la variété sont autorisés à s’exprimer dans leur forme la plus pure, laissant avec un vin unique et surprenant. Des arômes intenses et délicats de fruits tropicaux qui, avec les années de vieillissement en bouteille, deviennent confits. Un vin parfait pour les curieux qui ne laissera personne indifférent.


Clairement en sortant on se réjouira de trouver une cuisine moderne, inventive, finalement pas si marquée que cela par leur pays d’origine, juste avec des influences. Tout est cuisiné avec justesse, saveur, et précision en ne négligeant jamais le dressage et donc les aspects visuels. Assurément l’une des plus belles nouvelles tables de 2024.

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