mardi 29 juillet 2014

Lyle's, Londres



Indéniablement, Shoreditch est la place « to be » en ce moment à Londres. Le nombre de tables de qualité y est impressionnant et à chaque fois dans un lieu particulier et  dans une ambiance recherchée.

C’est dans ce quartier qu’a plus ou moins démarré  le collectif des « Young Turks » qui  a généré un ensemble de tables plus belles les unes que les autres, donnant un souffle tout nouveau à la cuisine Britannique.  Isaac McHale passé tout d’abord au « Upstairs at Ten Bells » et maintenant au “The Clove Club”. Ben Greeno parti à Sidney au « MomofukuSeiobo » du médiatique David Chang.

Le troisième acolyte James Lowe lui vient d’ouvrir depuis fin mai dans un  lieu minimaliste, le « Lyle’s , qui en peu de temps est devenu l’endroit dont l’on parle beaucoup en ville...
Situé dans une ancienne galerie dans l’iconique édifice « Tea Building » , vous serez plutôt surpris de l’endroit. Précédemment occupé par l’usine « Lipton Tea », ce bâtiment fut à l’origine un ensemble d’entrepôts qui par la suite subirent des rénovations afin d’héberger dans de magnifiques espaces, un certain nombre d’enseignes à la mode. Le lieu propose  également un club et un hôtel.






Comme un peu le “St John” et le “Clove Club”, le décor est très dépouillé avec quelques références aux ambiances scandinaves. Murs de briques blancs, bois recyclés, vieux meubles,  lumières industrielles, table et chaises en bois que l’on aurait pu acheter dans les années 60 au Danemark, tables alignées et dressées avec serviette, couverts et verres. Le minimum mais aussi l’essentiel.






Une cuisine ouverte, de grandes baies vitrées donnant sur le côté sud. Un endroit improbable mais qui séduit immédiatement.


Selon les dires, la cuisine se devait d’être alignée avec l’esprit du bâtiment ; sans prétention, épurée, belle et instinctive. Ici le menu changeant quotidiennement est unique et a 39 GBP, en sept plats avec pain, mignardise et eau inclus. Ce qui confirme une fois de plus que cette nouvelle génération de chefs a bien compris que les temps sont difficiles et que de vouloir se positionner dans le haut de gamme dans la « city » est un modèle difficile dans la durée.
Comme la plupart des chefs qui révolutionnent la cuisine à Londres, James Lowe utilise également des produits provenant des fermes, des produits élevés avec éthique et selon les normes, avec l’ambition de préparer une cuisine simple, mais avec de la créativité ; une cuisine avec de la personnalité.
Des plats d’influence britannique probablement liés à son passage chez Fergus Henderson du « St John Bread & Wine »  qui développa le concept "nose to tail" (utilisation de tout ce qui est mangeable, donc également des abats), mais aussi des influences liées à son passage au Fat Duck et chez Noma.
 
Après être installé à une table face à cette cuisine ouverte, immédiatement une sympathique jeune fille m’amène le menu du jour que j’avais déjà consulté sur le site, la carte des vins assez intéressante avec certains également au verre, une bouteille d’eau gazeuse « maison » et quelques tranches d’un délicieux pain au levain accompagné d’un beurre fermier salé.


En préambule me sont apportées deux tranches de truite de mer saumonée marinées dans un mélange sucre et sel un peu à la manière d’un gravlax, accompagné de betterave lyophilisées réhydratées à la vapeur. Tout de suite le ton est donné ; produits de qualité travaillé sur place avec une touche créative. La truite est fondante et juste marinée, la betterave ressemblerait presqu’à un fruit sec avec des saveurs bien concentrées.


Second amuse-bouche plutôt surprenant ; tête de porc panée accompagnée d’une mayonnaise à la Tarragone.  Une croquette cubique sans aucun goût d’huile, croustillante avec à l’intérieure une texture mélangée avec les viandes de la tête et l’on trempe le tout dans cette sauce bien parfumée. Cela semble être simple, mais il y a un vrai travail et c’est délicieux.


Première entrée appelée, anguille fumée et bouillon de navet. A première vue cela ressemble à un simple bouillon comme l’énoncé le dit mais une fois en bouche, c’est une explosion de saveur avec tout d’abord le goût raffiné de ce bouillon clair et léger, ensuite les tout jeunes navets débités en fins quartiers et qui ont du légèrement mariner dans un vinaigre sucré ; pour finir des dés d’anguille qui apportent un gout fumé au tout. Les associations de saveurs de ce bouillon sont innovantes et confirment la recherche autour d’ingrédients simples.


Autre plat ; chanterelles, œuf et escargot. Produits d’Ecosse avec des champignons cuits à la minute qui ne seront pas trop mous ou beurrés, un œuf cuit à basse température, quelques croutons, des escargots très moelleux et un excellent fond. Sur le dessus quelques feuilles de roquettes mais pour une fois plutôt douces et non amère ou trop poivrée. Un plat avec des saveurs bien nettes.


Je serai assez surpris par le poulet, « little gem » et anchois qui illustre parfaitement l’approche culinaire de James Lowe. Certes un poulet est une volaille plutôt considérée comme classique mais ici elle a été cuite en trois fois. A basse température, ensuite grillée pour que la peau croustille et ensuite j’ai pu observer un des cuisiniers amener une pièce de bois fumante pour donner un léger goût fumé aux chaires. La texture et goût de cette volaille fut exceptionnelle, accompagnée d’un jus léger et gouteux ainsi que d’une jeune laitue juste poêlée et encore croquante sur laquelle se trouvait deux formes d’anchois ; une fois sous forme de beurre comme une anchoïade et  aussi intégrée dans une sauce à base d’échalote et de cornichons aux vinaigre très finement hachés. Un plat qui joue sur diverses saveurs, fumé et vinaigré.


Nous poursuivrons avec un fromage ; St James, miel et noisettes. Une tranche de pain légèrement toastée sur laquelle se trouve ce fromage appelé St James de la région de Cambria dans le Nord-Est de l’Angleterre. Le fromage de chèvre fondant est recouvert d’un peu de miel et d’une poussière de noisette.


Pour terminer le dessert  appelé, Cerises, glace aux noyaux de cerises. Une glace vanillée avec un subtil goût de noyaux, un granité de cerises sur le dessus ainsi que le fruit légèrement poêlé et pour apporter une touche croustillante, un crumble de biscuit. C’est un dessert réconfortant et délicieux.


Une heure et demie pour ce repas que le chef souhaite être une expérience mémorable, avec une cuisine soignée et de très bons vins, tout cela a des prix très raisonnables comme vous aurez pu le constater. Des plats avec des produits locaux qui a première vue semblent toujours évidents mais à chaque fois l’on peut observer qu’il y a eu de la recherche et du travail.

Un personnel qualifié, souriant et qui connait les composantes des assiettes.

Une magnifique  nouvelle table à Shoreditch sur laquelle il faut compter et qui en complète magnifiquement le paysage gastronomique de cette nouvelle cuisine britannique ; une cuisine inspirée, légère et préparée avec de très beaux produits.

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