mardi 25 octobre 2016

Native, Londres




Assurément l’une de mes plus belles découvertes Londoniennes de cette année et une table qui risque de vite devenir inaccessible avec des réservations des semaines à l’avance. Et pourtant l’endroit reste l’un des plus étrange qu’il soit, qui devrait en réalité donner des leçons a plus d’un cuisinier qui s’imaginerait comprendre les rouages de la réussite et qui échoue lamentablement, comme c’est souvent le cas dans la ville où j’habite. Etrange car l’endroit est des plus caché ; une ruelle avec un petit square et si vous ne connaissez pas l’adresse, vous ne trouverez pas. Ensuite de l’extérieur on s’imaginerait un snack ou quelque chose dans le genre. Et le plus incroyable est cette salle à manger qui se trouve bonnement et simplement au sous-sol, pour ne pas dire une cave. Eh bien on peut faire des prodiges dans un tel lieu et probablement rendre envieux un grand nombre d’établissements bien mieux équipés. Comme quoi avec des idées, du savoir-faire et de la maitrise, on peut sans aucun doute espérer une probable réussite.


« Nat.ive » se trouve donc dans ce coin de rue et comme je l’ai déjà écrit ne peux que laisser indifférent de l’extérieur. Une ardoise en face de la porte vitrée qui indique que la salle de restaurant est en bas. De plus quelques autres établissements voisins font presque plus envie, mais regardez un peu mieux…


Une cuisine à quelques mètres de la porte d’entrée, une table unique en fasse de la baie vitrée et quelques cuisiniers qui ont l’air d’être bien affairés. Comme quoi on n’a pas toujours besoin de dizaines de mètres carrés pour offrir une prestation vraiment incroyable.


Une fois à l’intérieur, c’est à peine si l’on vous regarde depuis la cuisine car la brigade est grandement concentrée sur leurs cuissons, dressages d’assiettes et service. Juste à quelques centimètres, quelques clients dinent au comptoir. La place est des plus réduite.


Un accueil des plus agréable d’une jeune femme et soyez prêt à descendre cet escalier en colimaçon pour arriver dans une salle sans fenêtres et dont la superficie doit probablement faire aux alentours de 25 mètres carré. Quelques tables modernes en bois, murs blancs, quelques rangement muraux. Le minimum mais l’impression est plutôt agréable et rien finalement n’est oppressant.  Visiblement un arrangement simple ou tout est pensé et organisé afin que l’on se sente à l’aise. Un côté presqu’un peu nordique.





Même les recoins ont été aménagés pour presque privatiser une table pour un plus grand nombre de convives. Une ambiance vraiment très agréable avec un choix musical de circonstance, à savoir éclectique allant du folk au rock classique.


La carte change quotidiennement et est à première lecture impressionnante en tout cas dans l’énoncé des plats. Tout semble être d’un grand raffinement et proche de ce que certaines tables étoilées peuvent proposer à Londres comme « The Clove Club » et même ailleurs. Produits rares, associations téméraires mais sensées, tout à l’air absolument épatant. Initialement il s’agissait d’un « pop up » mais qui se transforma par la suite en un lieu permanent pour proposer comme le nom l’indique une cuisine exclusivement réalisée à partir de produits locaux et « sauvages ». Un établissement qui pense différemment et librement, qui se laisse le choix de faire ce qui bon leur semble. Dans la cuisine, le chef Ivan Tisdall-Downes un autodidacte qui au préalable travailla au « The River Cottage » dans le Devon, puis dans un stand de nourriture à Hackney et Imogen Davis qui avait une fauconnerie. Ce qui caractérise l’établissement c’est entre autres la préparation du gibier avec par exemple la fameuse grouse écossaise ou alors la perdrix en saison. Ivan s’approvisionne et travaille avec exclusivement les producteurs et fermiers locaux.

Je reste encore sous le choc à lecture de cette carte tellement ces plats m’ont inspiré. Deux entrées avec tout d’abord des croquettes de jambon fumé, béarnaise à la pommes brulée, sel à la livèche. Excellentes croquettes croustillantes et réconfortantes, avec une texture parfaite. Une sauce dans laquelle l’on trempera celles-ci absolument délicate, parfumées à la pomme avec un léger goût fumé et douce. Le sel amenant une légère saveur de céleri.


En seconde entrée des Saint Jacques de Lyme Bay, sobrassada de la Trealy farm, tomates IOW, fenouil sauvage. Lyme Bay se trouve dans la manche, au sud-ouest de l’Angleterre. Ces Saint-Jacques sont cuites à la perfection, encore bien moelleuse en leur centre et presqu’un peu crue comme il se doit. La sauce est réalisée avec de la soubressade qui est à l’origine une charcuterie des îles Baléares mais produite localement par l’une des meilleures charcuteries du pays où tout est srupuleusement contrôlé et bio. Les tomates proviennent de l’ile de Wight. Le tout est une absolue fête gustative.


En plat principal un plat absolument fantastique et qui peut se trouver sur de grandes tables avec une Grouse du Yorkshire, babeurre, baies, betterave. Oiseau rare et d’exception, gibier emblématique d’Ecosse et du nord de l’Angleterre. Il est totalement sauvage et ne peut être élevé. Le goût est puissant mais l’association de ces fabuleuses mures apporte une belle douceur en bouche. En dessous une sauce fine et point trop épaisse avec un lit de betteraves. Le visuel est magnifique, la cuisson à la seconde, le goût absolument divin.


Et comme dessert, de l’argousier avec un syllabub de brandy de cidre, pommes, biscuits au gingembre. Un syllabub est un dessert doux et crémeux qui existe depuis des siècles et qui n’a jamais vraiment changé. Réalisé un peu comme une glace avec un alcool comme ici ce brandy, du jus de citron, du sucre, un peu de noix de muscade dans sa recette classique et de la crème double. Les pommes sont découpées en tout petit cubes amenant une légère acidité, le biscuit croquant apporte de la texture. C’est un dessert d’une parfaite gourmandise.


Impressionnante petite carte de vin avec en tout cas une sacrée expérience avec des vins anglais de Gloucester, Three Choirs « Winchcombe Downs » en blanc 2013, suivi du même domaine mais en pinot noir. Plus ému par le fait de déguster pour la première fois un vin de cette région que d’en apprécier en détail sa qualité.

Un chef absolument excitant et talentueux qui va aller très loin. Une cuisine pleine de saveurs qui sait en même temps être innovante mais aussi presque un peu rustique, des présentations vraiment très belles et contemporaines qui peuvent sans aucun doute rivaliser très facilement avec une table étoilée. Il y a fort à parier que d’ici peu de temps on retrouve ce duo dans un autre lieu. Il semblerait que la Whitechapel Gallery soit la prochaine étape, une galerie d'art spécialisée en art contemporain. Il faut finalement préciser que les entrées sont entre 5 et 8 livres et les mets principaux entre 12 et 17 livres. Une de mes meilleures tables de l’année.

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