mardi 25 février 2020

Equilibri BCN, Barcelone


Adresse presque confidentielle mais qui gagne a être découverte, celle de « Equilibri BCN » dans un quartier pourtant bien connu où se trouve la Sagrada Familia mais une ruelle un peu à l’écart. Un concept un peu différent des bars à tapas classiques, des restaurants péruviens ou méditerranéens, car ici c’est un peu de tout. Une interprétation méditerranéenne de la cuisine péruvienne !


Un intérieur plutôt cosy qui n’a rien de péruvien, assez intime avec des lumières douces, une ambiance assez tranquille, parfaite pour un repas que l’on souhaite passer en toute sérénité. Un bar classique où l’on peut prendre un verre si on le souhaite, quelques tables devant et une salle dans le fond. On peut penser que le lieu aurait été un autre genre d’établissement et simplement reconverti dans un style de cuisine différente.




Tables agréablement dressées, banquettes murales de cuir rouge, l’endroit a un côté aussi un peu classique et bourgeois.


Cette salle dans le fond est peut-être un peu plus moderne ou dirons-nous dans un style plus comme l’on voit souvent à Barcelone avec des murs de briques apparentes et un mobilier un peu scandinave, très tendance.


On appréciera la très belle table du fond réservée à de probables événements ou repas familiaux.


Une cuisine de petits plats méditerranéo-péruvienne bien pensée avec toute une série de plats assez alléchants. Également plusieurs sortes de riz et des plats de la mer.  

Pour commencer un ceviche de courbine au lait de tigre assez classique dans sa composition mais parfaitement réalisé sans trop d’acidité et un poisson juste légèrement passé dans le lait sans y avoir trainé. Maïs grillé, patate douce, oignon rouge, maïs blanc choclo, chips de banane plantain.


Pour suivre de bons artichauts confis aux chicharrons. La chicharrón au Pérou est fabriquée avec de la viande de porc bouillie avec des assaisonnements et des épices jusqu'à ce qu'il ne reste plus d'eau, puis frite dans sa propre graisse. Sur le côté une sauce type romesco.




Une déclinaison des bombas de la Barceloneta car celles-ci sont réalisés avec du piment Aji avec une sauce brava. Délicates et de tailles plus petites mais aussi fines en bouche. On appréciera le côté finement pimenté.



De très bons petits calamars à la plancha avec des champignons poêlés et piment panca. Parfaitement cuits, un petit jus d’herbes en complément. Ce piment rouge péruvien, est une variété de Capsicum baccatum est couramment cultivé sur la côte du Pérou et mesure 3 à 5 pouces de long et 1 à 1 1/2 pouces de diamètre. Il a une chair épaisse et des notes fruitées, il devient rouge foncé à bordeaux à maturité. Il est généralement séché au soleil dans les fermes et vendu sec. Il est très doux et s'il est épépiné et déveiné, il est considéré comme n’étant pas brulant mais est plutôt utilisé pour sa saveur et sa couleur. Les champignons en dessous amènent de l’originalité dans les saveurs.


Comme dessert, nous resterons dans le « faux classique » car nous serons surpris de découvrir une crème catalane mais ici revisitée car en diverses textures. Un côté presque semblable sur le dessus à sabayon, une vraie réussite qui reprend les saveurs de cette crème mais avec plus de légèreté.



Un vin sans histoire avec un Conde San Cristobal 2015 Ribera del Duero.


Une adresse qui à l’avantage de proposer des plats aussi bien classiques catalans que péruviens, certains mélangeant les deux techniques. Tous très bien réalisés et gourmands, on pourra donc venir en faisant plaisir à tout le monde et avec l’avantage que nous ne sommes pas dans une de ces vulgaires cuisines fusion. Tout est très bien cuisiné avec des saveurs et cuissons précises.

samedi 22 février 2020

Bodega Iturre, Barcelone


Une des ces bodegas emblématiques de Barcelone appelée « Bodega Iturre », où l’on viendra grignoter quelque chose ou simplement prendre un verre. Souvent des fritures diverses comme artichauts en saison, croquettes et autres tapas. Un pas de porte boisé, quelques tonneaux dehors pour les fumeurs ou amateurs de la rue et comme tout commerce de vins, les vitrines remplies de bouteilles de vins ou alcools forts pour la vente.



Mais c’est indéniablement l’intérieur qui a le plus de charme avec ce bar qui n’a pas du changer depuis des décennies, les tapas exposés derrières la classique vitrine, les boissons et conserves exposées sur des étagères, le coin pour tirer le vin et un frigo des plus conventionnel.




En hauteur, toute une série de tonneaux avec vins et prix affichés. On se demandera d’ailleurs comment ceux-ci sont remplis….


Bien entendu a cette heure on aura envie de vermout ou de bière, ici en bouteille.


Sur le comptoir, quelques tapas comme précédemment mentionnés.



Comme dans un certain nombre de petits commerces, on sera toujours surpris de voir combien les plafonds sont hauts et souvent une sorte de mezzanine qui donne sur la salle. Un lieu avec un certain charme, une ambiance locale et amicale, un lieu plein d’authenticité.


samedi 15 février 2020

Xerta, Barcelone


En continuant dans la série des tables avec macarons de Barcelone, ce qui m’arrive de manière irrégulière, il me manquait d’être allé au Xerta de Fran Lopez bien que nous étions déjà été a son second restaurant à la même adresse tout simplement appelé « Xerta Tapas Bar ». Table à l’entrée de l’hôtel que nous avions vraiment apprécié à l’époque avec sa cuisine du delta de l’Ebre et ses magnifiques produits. Mais ce soir c’est donc la table gastronomique avec une étoile que nous visiterons.


Une salle élégante assez ouverte mais aussi avec un côté discret et un peu minimaliste. Sol boisé, tables joliment dressées de nappes blanches, plafonds recouverts de crépis, lumières indirectes. Une salle très agréable et bien plus calme que d’autres étoilés où il y a bien trop de circulation entre les tables.


Une étonnante cuisine que l’on peut observer derrière une paroi de lattes qui laisse la vue sur la brigade en place.




Ce qui distingue cette table des autres étoilées en ville c’est qu’ici ce sont les meilleurs produits de saison du delta de l’Ebre qui sont proposés et cela fait une grande différence. La plupart des étoilés travaillent un peu tous dans le même registre, une cuisine espagnole moderne un peu axée parfois sur le show sans réellement penser au terroir ou à ce qui est vraiment particulier, ce qui est régional comme ici. On saura que dans ce delta on y trouve du riz, des crustacés comme des couteaux, des moules et huitres, sans oublier les anguilles. Bien sur vins et huiles d’olive.


Nous choisirons le second menu de dégustation tarifé à 85€ par personne et l’on nous amènera un très bon pain et huile d’olive artisanale.


Les apéritifs Xerta ou plutôt amuse-bouche arriveront sur une boite avec sur le dessus une carte géographique de cette région. Un assortiment de bouchées très délicates et bien plus sophistiquées, voir même intelligentes car centrées avant tout sur le produit, les saveurs et non pas que l’apparence. Une vraie merveille que ces apéritifs plutôt uniques !


Pour démarrer une délicieuse huitre du delta, un produit qu’étonnement on ne trouve jamais sur aucun marché de Barcelone, allez-savoir pourquoi ! Alors qu’elles sont particulièrement gouteuses et fines en bouche.


Un fin bricelet sur lequel se trouve du poulpe avec une sauce légèrement pimentée et quelques herbes.


Une galette à l’encre de seiche avec un tronçon d’anchois frais.


L’anguille du delta fumée présentée sur une chips.


Premier plat vraiment jubilatoire, la pizza du delta avec une base croquante de pistaches, anguille fumée, crème d’avocat, légumes vinaigrés et tomates demi-sèches. Cette association un peu caramélisée, donc sucrée avec le poisson à la saveur contrastée et l’avocat qui arrondit le tout en bouche est absolument merveilleuse et surtout très originale.


Ensuite la fausse fideuà noire aux calamars, aux vermicelles de basilic, aïoli et fruits de mer. Il ne s’agit donc pas du classique plat de pâtes catalan mais d’une réinterprétation avec le calamar dans son encre travaillé comme des pâtes, ces vermicelles qui amènent une texture réelle donc de pâtes et les accompagnements comme fruits de mer et la sauce, le tout superbement dressé. Cuisson bien entendue impeccable des crevettes et supions à la seconde.


Bien entendu on peut trouver du riz partout à Barcelone, avec des recettes différentes mais ce riz ici est une toute autre histoire et probablement l’un des meilleurs en ville si pas le meilleur ! La raison est que la préparation de base, le bouillon de cuisson est d’une impressionnante intensité en saveur comme nulle-part ailleurs. Bien entendu le riz est idéalement cuit, sa qualité exceptionnelle. Il s’agit donc d’un riz du delta « cap i pota », mayonnaise au kimchi, petits calamars à l’andalouse, croustillant de museau de porc. Mélange donc terre et mer, tête et pied de porc sans aucune trace gélatineuse. Absolument sublime !


Un poisson du jour de Sant Carles de la Rapita aux champignons confits, crumble et sauce de champignon. Une maitrise de la cuisson, un fond de sauce très équilibré qui permet encore d’apprécier la saveur de ce poisson.


Très belle assiette de viande en plat principal avec une terrine d’épaule d’agneau désossée à la truffe d’été et foie, praliné de noisette à l’ail noir et raisins. Viande fondante, très belle association avec ce praliné ; agneau et sucre ou plutôt caramélisation font toujours très bon ménage. Le demi-glacé est aussi d’une très grande intensité en bouche.


En dessert, un classique trío de chocolats, mousse de chocolat blanc grillé, crêmeux au chocolat au lait, ganache de chocolat noir et glace de chocolat blanc.


Puis un dessert plus original avec la « Soupe de la reine », dessert typique du Delta de l’Ebre, à base de couches de génoise garnies de crème à la cannelle, au citron et jaune d’œuf grillé, tout cela dans des élaborations bien distinctes. Vraiment un excellent dessert.



Puis avec le café, un chariot de mignardises.


Avec ce repas un superbe Cervolès 2018 Les Garrigues de la région Costers Del Segre à base de macabeu et chardonnay, avec des notes fumées et grillées, des reflets dorés, une belle longueur en bouche.


Clairement « Xerta » apporte quelque chose de différent à la scène gastronomique des étoilés de Barcelone. Il n'y a nulle part ailleurs en ville où vous pouvez manger certains de ces ingrédients car ici on ne veut pas simplement reproduire cette cuisine moderne Espagnole ou même internationale devenue souvent lassante à la longue, plus axée sur le show que sur les saveurs réelles des ingrédients. Ce menu de dégustation est d’une incroyable justesse, avec une très large palette de saveurs, de revisite de certains classiques de manière très pertinente. Une belle sélection de vins catalans, un service attentif et informé, on adorera cette volonté de Xerta de vouloir faire connaitre cette identité culinaire régionale de manière délicate.

samedi 8 février 2020

Caelis, Barcelone


Une des tables étoilées les plus connues en ville, celle du chef Romain Fornell qui a su étendre son empire en multipliant le nombre d’adresses avec des styles de cuisines associant souvent les classiques catalans en y ajoutant des touches ou techniques françaises. Bien entendu c’est dans cet hôtel OHLA que se trouve son premier établissement avec son étoile Michelin. Une réservation bien entendue un peu plus difficile qu’ailleurs puisque déjà nous sommes en période de fêtes mais aussi parce que le tourisme de passage souvent ne fait que de suivre le guide aux macarons, donc choisi d’emblée de venir ici. D’ailleurs ce soir, le public est tout sauf local et la seule possibilité de dîner reste au comptoir face aux cuisines. Pas forcément déplaisant car cela donne la possibilité de bien entendu d’observer ce qui se passe derrière les fourneaux.


Un intérieur élégant avec une cuisine ouverte, un cellier apparent, une salle confortable, un style chic mais suffisamment détendu pour ne pas tomber dans l’ostentatoire,




Donc cela sera devant la cuisine que nous passerons cette soirée, assis sur des chaises hautes. Une impression d’être un peu déconnecté du reste de la salle malgré tout, mais une opportunité rare de pouvoir observer les dressages tout au long de la soirée, sans que le chef soit là ce soir. Cependant le tout sera extrêmement structuré sans grande manœuvre pour de l’interprétation. Tout est organisé, préparé, fait pour que les assiettes défilent et sans temps mort. Pas d’interaction avec les clients comme on peut bien le comprendre, un côté très robotique en cuisine. Un détail un peu déplaisant, la distance entre le dressage des assiettes et la dépose devant qui est trop grande, ce qui donne l’impression que l’on se penche sur le comptoir ou alors on fait le tours pour vous déposer les plats.





Deux menus de dégustation, le premier appelé « Menu Terre et Mer » que nous choisirons tarifé à 92 euros et le second 135, certains plats avec des ingrédients prestigieux étant majorés de quelques euros. Et pour commencer une série d’amuse bouches amenés souvent ensemble comme par exemple l’olive verte et anchois. En réalité une reconstitution un peu dans le genre des établissements qui apprécient ce côté presque moléculaire que l’on trouverait par exemple chez « Disfrutar ». Associé à cette olive, une minuscule tartelette de jaune d’œuf mariné et caviar, avec un peu de ciboulette.


Puis une coupelle avec une émulsion de béarnaise accompagnée de feuilles de persil. En réalité une sorte d’espuma très légère à la saveur de la sauce bien connue avec une structure biscuitée en forme de feuille que l’on brise et utilise pour prendre cette mousse en bouche.


Il faut relever que la vaisselle est plutôt très originale, en tout cas les assiettes de présentation.


Ensuite une interprétation moderne du classique pain à la tomate et sardines. Une sorte de meringue avec sur le dessus une crème ou un beurre manié avec de la sardine et quelques lamelles de radis.


Une bouchée un peu plus gourmande avec une gaufre de pomme de terre et ventrèche de thon.


Dans un petit bouillon bien parfumé, des gnocchis de butternut et glace à la truffe, amuse-bouche qui finale la première partie du menu.


Alors que dire à ce stade…Eh bien pas vraiment de surprise, c’est assez conventionnel et un peu trop semblable à ce que l’on pourrait trouver ailleurs dans cette catégorie d’établissement. On avale ces bouchées mais il n’y a rien qui laisse pantois. Peut-être que l’on recherche de la sophistication, de la technique qui n’est pas si nécessaire, d’ailleurs la gaufre reste la plus plaisante.



Un service de pains artisanaux et jeu de beurres, ce qui signifie que ce sont des préparations comme par exemple tomate et basilic. Ces pains sont tout bonnement exceptionnels et accompagnés de ces beurres sont encore sublimés.



Les plats suivants seront au choix et nous prendrons le poireau écologique rôti au charbon avec caviar des Pyrénées. L’idée est assez semblable à celle de cuire des calçots et de les accompagner d’une sauce dans laquelle nous trouverons ce Caviar des Pyrénées. Provenant d’une maison parie sur l'élevage en montagne de l'esturgeon pour contribuer aux soins de l'espèce et garantir le processus de production du caviar et sa qualité. C'est dans l'eau pure et cristalline aux sources de la Garonne, à seulement 20 kilomètres de la naissance du fleuve, que les esturgeons « acipenser baerii » atteignent leur maturité, au terme de sept à huit années. Si l’idée de ce plat est très bonne, le poireau nécessiterait d’être un peu moins épais avec de mieux sentir les œufs.


Ensuite les petites seiches « a la bilbaína » et leur jus. Une cuisson parfaite pour ce produit de grande fraicheur, même si je suis étonné par le nom de la préparation qui me semble normalement être au Pays-Basque composée de tomates dans la sauce, c’est probablement une interprétation avec de l’encre de seiche. Sur le dessus une chips pour une touche croustillante bienvenue.


Pour suivre un tartare de bœuf au couteau et perles de moutarde. Le tartare arrive simplement sur un plat et ensuite c’est un show de type moléculaire avec moutarde et azote. Est-ce bien utile ? Le résultat est une série de petites billes qui sont ensuite déposées sur la viande.






Ensuite un tronçon de vivaneau à la bouillabaisse et à l’estragon. Superbe poisson parfaitement cuit, sauce bien parfumée et réduite, l’estragon dans un une autre sauce qui est élégamment présentée autour de la première.


En plats principaux, un pigeon d’Araiz comme un civet. Pigeon de Navarre de très bonne qualité entouré d’un demi-glacé bien concentré et d’haricots de Santa Pau et d’une petite tartelette. Assiette délicieuse mais il faut tout de même mentionner que la ration est chiche ce qui d’ailleurs est souvent le cas ici…


Avec un supplément de 12 euros, l’impeccable lièvre à la royale avec foie gras et truffle « melanosporum » râpée sur le dessus. Un plat vraiment mémorable ici.


Moyennement emballé par les fromages affinés catalans car si l’on habite Barcelone, il y a plein de fromageries de très haut niveau qui proposent une gamme très variée et souvent avec des pâtes inattendues. Ici c’est un peu « du standard », uniquement des pâtes dures, rien de « coulant ».  Deux noix, deux biscottes, de la marmelade…on a vu mieux.


Un superbe entremet qui se trouve être un rafraichissante sorbet au céleri.


Le dessert sera vraiment exceptionnel et presqu’un ton au-dessus des autres assiettes. Etant souvent très déçu par les desserts surtout ici en Catalogne, je ne peux que féliciter le ou le chef pâtissier avec ce très équilibré millefeuilles de Campari et pamplemousse rose avec basilic. Beaucoup d’équilibre en bouche, des jeux de textures, une amertume parfaitement contrôlée.


Quelques mignardises pour terminer ce menu amené avec le café.


Un vin unique avec ce repas l’Arketipo 2015 de chez Sorta Els Angels, un vin rouge complexe, méditerranéenne et fruité, qui préserve son caractère frais.


Alors comment conclure ce repas… Certes ce fût un repas qui fût réglé comme du papier à musique. Tout est pensé, structuré, organisé avec peu ou pas de place à de l’improvisation. Service robotique, cuisine précise et une impression comme si on jouait le timing. Des plats souvent excellents et d’autres un peu anecdotiques. On passe d’une cuisine « moderne espagnole » avec des inspirations qui frôlent le moléculaire une fois ou deux à des plats plus classiques ou conventionnels qui s’inspirent de la cuisine Française. En réalité, il y en aura pour tous les goûts et c’est bien entendu fait pour plaire à une majorité de clients. Maintenant c’est un style et si l’on préfère une cuisine avec une ligne directrice un peu plus marquée, on sera peut-être un peu déçu.  Question de goût et bien entendu cela dépend de ce que l’on recherche ici à Barcelone.