vendredi 1 juin 2018

The Alchemix, Barcelone


Ouvert récemment, « The Alchemix » est un peu la nouvelle sensation en ville probablement lié au cursus du chef Sergi Palacin Martinez. Ancien Chef Principal chez « Gaggan » à Bangkok pendant plus de quatre années, restaurant plusieurs fois nominé, considéré comme étant la meilleure table d’Asie par le « WB50 », un bref passage chez l’excellent « Mont Bar » à Barcelone et dans la « el Bulli Foundation » et le voici maintenant à la tête de ce « Gastro Cocktail Bar » dans le quartier de l’Eixample. Sergi n’est pas seul mais accompagné dans cette aventure de Ignacio Ussia qui se trouve être un spécialiste de cocktails ou ce que l’on nomme aujourd’hui un mixologue. Leur concept étant d’associer si on le souhaite, cocktails avec une cuisine comme on peut se l’imaginer, fortement influencée par l’Asie. Un choix assez personnel car on peut ou non aimer associer des boissons souvent sucrées avec des assiettes salées sophistiquées.


« The Alchemix », se positionne donc comme étant un nouvel espace mêlant restaurant et bar à cocktails en effaçant les limites. Vous pouvez commander à manger du menu au bar et vous pouvez boire des cocktails tout en dînant.  Si vous vous arrêtez au bar, vous pourrez par exemple apprécier un pisco aigre à la truffe blanche, avec du miel de truffe blanche, du pisco, du citron, du bitter et du chocolat blanc. Ou encore l'Esprit Arashi, une boisson japonaise complexe et évocatrice. Chaque cocktail étant une mise en scène, presqu’un rêve, voir un fantasme. Des snacks peuvent également être servis à ce bar a gauche de l’entrée.




On pourra aussi admirer les différentes macérations et distillations exposées dans une partie de cette salle, dans des bocaux alignés sur des étagères. Il se pourrait que dans le futur, Ignacio propose un menu de cocktails qui pourraient s’associer aux divers plats, ce que l’on pourrait appeler en anglais « cocktail pairing » mais ce n’est pas encore le cas en ce moment.



Une salle divisée en deux sections, la première étant le bar, un sofa, quelques tables hautes, des tableaux du peintre Giuseppe Arcimboldo et plus loin une salle plus pour un repas complet.



Salle à la décoration un peu trop classique à mon goût et je dirais avec un côté presque années quatre-vingt avec des structures pas franchement contemporaine. Je ne veux pas être trop négatif, mais ce n’est pas très réussi, cet exposé de bouteilles illuminées dans le fond, cette banquette qui ressemble a du faux cuir et surtout cette horrible trompe-l’œil genre sous-bois ; un poster genre « années 70 » que l’on trouvait dans les chambres d’adolescents avec un coucher de soleil, la plage avec un palmier ou le sous-bois… Mais concentrons-nous sur la restauration.





Une très belle carte de cocktails très détaillée avec toutes les caractéristiques des préparations représentées par des émoticones ; sic pages complètes pour les amateurs, environ une douzaine de breuvages. Une section de bouchées et ensuite le menu du restaurant. Un Arashi Spirit qui se trouve être une composition à base de sake, d’umeshu une liqueur japonaise à base de fruits ume sorte de prunes, de jus de yuzu, de poivre sansho au parfum intense d'agrume, traditionnel de la cuisine japonaise et parent du poivre de Sichuan, du blanc d’œuf et de la bière au gingembre. Pour chaque cocktail, une petite histoire comme ici : « Située dans la partie ouest de Kyoto, la forêt de Arashiyama. On vient dans ce sanctuaire naturel pour y purifier son âme ».


Sur cette carte, évidemment beaucoup d’influences asiatiques et souvent thaïlandaises, japonaises mais tout de même quelques clin d’oeil à la Catalogne. Par exemple ces gyozas à la seiche et viande hachée. Qualifié de « mar y montana », une pâte maison très fine, une farce bien parfumée et délicate, un fond de sauce très équilibré qui ne sombre pas dans de la cuisine asiatique classique de rue.


Une impressionnante huitre avec sa crème glacée. L’huitre est tiède, recouverte d’une fine lamelle de joue de porc probablement passée au chalumeau, le tout est amené dans un panier à paveur rempli de thym et de cette excellente crème glacée qui se trouve être également à l’huitre. C’est une excellente et originale bouchée.



Autre bouchée tout aussi précise et aux fantastiques saveurs, ces tronçons de poireaux cuits sous vide et finalisés sur le grill, accompagnés d’une sauce au miso noir ou kiromiso et à la truffe. Nous apprécions l’équilibre de l’assiette qui finalement n’amplifie pas trop le côté asiatique, ce qui est vraiment une prouesse.


Nous poursuivons avec une autre assiette tout aussi créative et gourmande, le coulant de boutifarre et ses légumes/fruits rouges. Visuellement cela ressemble à un fondant au chocolat mais ici il est conçu de la manière avec son centre coulant mais il s’agit de cette saucisse catalane constituée de sang de porc mélangé à de la viande. Sur les côtés une subtile sauce à base de tomates, fraises et de poivrons rouges ; une terre comestible et une feuille de capucine.



Une viande avec un fondant de cochon de lait et parmentier de jambon de bellota. Plat espagnol, très gourmand et un agréable retour aux sources.


De très jolis desserts comme le « mel y mato », feta fumée et pistaches. Association de divers fromages dans les préparations avec un produit local et l’autres de la méditerranée, de l’huile d’olive, des jeux de textures, un dessert léger et pas trop sucré.


Un très beau repas qui propose une cuisine inspirée par moment par l’Asie mais jamais en excès. Nous sommes très loin de ces établissements qui mélangent tout et qui se prétendent être à la mode et fusion. Ici c’est une cuisine de haut-vol mais toujours en osmose avec la culture locale. On y retrouvera des ingrédients choisis, des associations très maitrisées car il n’est finalement pas si perceptible que cela que l’on utilise dans la plupart des ingrédients asiatiques et c’est ce qui fait que l’on soit un grand chef ou non. Une cuisine très inspirée, de très belles assiettes, une très belle nouvelle adresse.

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