lundi 15 décembre 2025

Aylul, Barcelone

 

Etonnamment, la cuisine moyen-orientale est l’une des cuisines étrangères les mieux représentées et authentiques à Barcelone comparé à d’autres cuisines « exotiques » souvent édulcorées ou adaptées aux goûts locaux.

Certains définissent la cuisine de Aylul comme une cuisine fusion du pourtour méditerranéen ce que j’ai plutôt tendance à reconnaitre, et d’autres parlent de cuisine Palestinienne, ce que je pense être beaucoup trop limitatif. C’est une vraie cuisine au carrefour du Liban, de la Syrie, de la Jordanie et d’Israël.

Certes, les propriétaires Marwan, sa femme Maisa, ainsi que ses filles Samya et Luna ont quitté le nord de la Palestine il y a seulement deux ans, avant le début de la guerre, mais la cuisine de cette région est assez semblable. Je suis un admirateur de la cuisine de Yotam Ottolenghi et Sami Tamimi qui sont sont des chefs et co-auteurs britanniques d'origine israélienne et palestinienne, devenus partenaires commerciaux à Londres après s'être rencontrés, malgré leurs origines parallèles à Jérusalem (Ottolenghi dans le quartier juif, Tamimi dans le quartier palestinien), donc ce billet n’a surtout rien de politique, juste apprécier une cuisine de restaurant.

L’intérieur de l’établissement est plutôt chic, moderne, agréable et esthétique. Rien qui finalement ne laisse penser que nous sommes dans un établissement de ce type de cuisine. Un accueil chaleureux, un service parfait.

Banquettes brunes, tables en bois, tout est joliment décoré sans excès avec quelques délicats éléments comme des bouquets de fleurs séchées, des bocaux remplis de légumes secs, puis des lumières indirectes bien pensées.


Comme cadeau en préambule, un pain de la maison avec ses deux sauces. Pain qui pourait rappeler le « Kaak el Qods », léger, moelleux recouvert de graines de sésame qui est servi à tout moment de la journée que ça soit pour le petit déjeuner, le déjeuner ou le snack. Ce pain est un vrai délice !  Il est accompagné de deux sauces, la première une sauce à base de tahini avec un peu de tomates concassées sur le dessus et la seconde, à base de labneh avec dessus du zaatar, sumac, et huile d’olive. Tout cela pour tremper les morceaux de pain.

Un premier magnifique plat avec un « Kibbeh nayeh » selon la carte… C’est un plat emblématique du Levant, un tartare de viande crue (agneau ou bœuf) finement hachée, mélangée avec du boulgour fin, des oignons, de la menthe fraîche et des épices (comme le cumin, la cannelle). Il est servi cru, avec de l'huile d'olive, du pain pita chaud et souvent des oignons blancs, et se déguste en le "scoopant" avec le pain. Mais ici ce n’est pas travaillé de la même manière, la base est la même sans viande, car celle-ci est sur le dessus, découpée en petit morceaux et revenue à la poêle. Des pignons, de la grenade, du persil plat et un peu de citron.


D’excellents « cigares » de Musakhan. Plat emblématique de la Palestine, le musakhan raconte une histoire d’appartenance, de simplicité, et d’arômes profonds. Traditionnellement servi sur du pain taboon et généreusement garni d’oignons caramélisés, d’épices sumac et de poulet rôti, c’est un plat qui rassemble. Dans cette version revisitée, on nous propose des rouleaux croustillants au musakhan.


De magnifiques feuilles de vigne farcies avec une tzaziki. Il y a maintes manières de les préparer et cela se trouve dans un certain nombre de pays méditerranéens. Le Warak Enab est le nom arabe de délicieuses feuilles de vigne farcies, un plat populaire au Moyen-Orient et en Méditerranée. Il s'agit de feuilles de vigne roulées autour d'une farce savoureuse de riz, d'herbes (persil, menthe) comme ici et parfois de viande hachée (agneau ou bœuf), assaisonnée de citron et d'épices, puis mijotée jusqu'à tendreté. Ce plat est souvent servi froid, en entrée ou en plat principal, et est parfois appelé Dolma ou Sarma dans d'autres régions. Avec une sauce Tzatziki exquise à base de labneh, le fromage frais, avec du concombre, qui ajoute à la rivalité des saveurs.


Ensuite un délicat kebab d’agneau, persil, oignon, sauce tahini et pommes de terre rôties. Une brochette de viande avec de l’oignon et persil avec de la tahini, une sauce au sésame mélangée à de l’eau et du citron.


Aylul avec une cuisine d’auteur représente la modernité de la cuisine fusion du Moyen-Orient au cœur de l’Eixample. Une multitude de textures et de saveurs qui ne laissera pas les gourmets indifférents et les amateurs de ces plats pleins de gourmandise.

vendredi 12 décembre 2025

Manda Huevos, Barcelone


Quelle découverte assez particulière que celle-ci dans le quartier Les Corts, un nouvel établissement spécialisé dans les œufs et qui fait salle comble, ce qui est assez surprenant. Il y a quelques années, existait un établissement un peu semblable appelé l’Eggs du chef Paco Perez sur le Passeig de Gracia mais qui a disparu.


Manda Huevos est une expression argotique espagnole vulgaire qui signifie une forte surprise, de l'indignation, de l'exaspération ou que quelque chose est "trop" ou "incroyable", équivalent à "Ça alors !", "Nom d'un chien !", "C'est du délire !", ou "N'importe quoi !" en français. On a donc utilisé cela pour le nom de ce restaurant car littéralement, cela signifie "envoie des œufs » !



Projet de deux personnes, dont principalement Ot Salvans qui est un jeune chef cuisinier barcelonais connu pour sa cuisine créative qui mélange haute cuisine et recettes populaires, ayant travaillé dans des restaurants prestigieux comme DiverXO, Disfrutar, Almarge et El Celler de Can Roca. Victor Martínez comme entrepreneur dans l’affaire.


Cuisine autour de l’œuf comme il est facile de comprendre et c’est indéniablement un énorme succès en voyant combien l’établissement est remplis ce soir avec même plusieurs services !


Un bar, un restaurant, un endroit assez informel qui plait vraiment à toutes les tranches de clientèle, principalement locale. Une apparence axée sur la couleur orange présente pour les dessins, les encadrements de fenêtre, les coussins de chaises intérieurs.  Deux salles avec la première qui jouxte le comptoir.


Un petit côté cantine simple mais décorée avec bon goût et une certaine informalité.

Cependant, il y aura bien d’autres propositions sur la carte comme par exemple toute une série de gildas les unes plus intéressantes que les autres. Pour « faire le vermouth », un ensemble de petits encas, des plats traditionnels catalans, des assiettes autour de produits de qualité et locaux, puis bien entendu une série de tortillas ou omelettes proposées en trois versions : sous forme de sandwich, de taille moyenne et grande. Des préparations classiques ou modernes, certaines étant des créations du chef.

Pour commencer une version plutôt originale et délicieuse de la salade russe, avec un œuf de caille frit, des pirarras au vinaigre, de la mayonnaise japonaise plus douce et plus onctueuse que la mayonnaise classique, elle se distingue par sa recette unique : uniquement des jaunes d'œufs, du vinaigre de riz (米酢, komezu) et une pointe de moutarde douce, puis la bienvenue et malheureusement rare mais combien délicieuse anguille fumée.



D’excellents ris d’agneau revenus au beurre, confiture de piment cristal et topinambours frits. Un produit tout aussi rare à trouver car généralement ce sont ceux de veau, ici dans une sauce aigre-douce.


Puis deux omelettes avec tout d’abord une Tortilla Costa Brava avec un suquet de crevettes rouges ou « gamba roja », accompagnée sur le dessus d’un tartare de ces crevettes de grande qualité, puis du zeste de citron vert. Parfaite texture, donc cuisson, la version moyenne allant pour deux a trois personnes.


Un peu moins séduit par la Tortilla Très Trufas ou aux trois truffes, truffe noire, burrata à la truffe blanche, carpaccio de truffe d’été, avec une option de truffe râpée donc un supplément. La raison étant que tout d’abord je ne vois pas de carpaccio de truffe d’été mais plutôt une pâte de truffe qui est élaborée en mélangeant des truffes noires fraîches à de l'huile d'olive extra vierge, un soupçon de jus de truffe pour intensifier la saveur, et un arôme de truffe pour sublimer l'ensemble, ce que je n’aime pas du tout car c’est de la pure chimie… Ceci aurait dû être signalé…donc renseignez-vous en demandant précisément de quel type de truffes l’omelette est faite. Ensuite la burrata un peu trop fraiche n’amenant pas grand-chose. Identifiez plutôt une autre omelette. Texture parfaite comme la précédente.



Comme vin rouge, un Rioja Anza 2022 Diego Magana, de style moderne avec beaucoup de fruits rouges et de fleurs sur le nez et une touche épicée. En bouche, fraîche, légère et avec des tanins encore jeunes.


Ce n’est ni un restaurant de haute cuisine ni une cuisine traditionnelle, mais plutôt une cuisine informelle mêlant techniques de haute cuisine et recettes populaires, qui plaira a tout un chacun.

jeudi 11 décembre 2025

Trattoria Enriquetto, Barcelone

 

Il y a de nombreuses années de cela, existait à cette adresse une autre table appelée Taverna Pervers. Aujourd’hui c’est devenu un restaurant italien, une trattoria qui est un hommage décontracté et sophistiqué à la gastronomie italienne, réinterprété avec une touche un peu internationale et catalane.


Une adresse créée en 2024 par trois grands noms de la restauration ; Kim Diaz du Bar Mut, Miquel Puchol de la Mantequerías Pirenaicas et Enric Rebordosa de La Confiteria. Un nom de restaurant qui donc rend hommage à ce dernier avec le chef Facundo Giménez aux fourneaux qui justement était à la Mantequerías. Mantequerías Pirenaicas qui possède déjà une autre table italienne avec l’Italiano Perso.


Enriquetto est un hommage à la cuisine reprenant des plats qui ont fait fortune à travers le monde et y ajoutant parfois une touche ainsi qu’une catalanisation du produit. Par exemple, les polpette deviennent des albondigas. Une déclaration d’amour pour la cuisine italienne, des plats simples et connus, bien entendu rassurants.


Une salle à manger où l’on se sent à l’aise sans aussi que la facture explose et sans grandes prétentions dans le domaine gastronomique. Une couleur verte omniprésente sur les murs de la première section, des affiches de cinéma des grandes réalisations italiennes du passé.


Une impressionnante série d’affiches encadrées qui donne une atmosphère très années 50 à 60 à l’espace des plus convivial.


A l’entrée, un comptoir avec sa cuisine derrière.


Et au fond une seconde section plutôt dans les tons rouges. Vert, blanc, rouge…simple à comprendre.

Leur Vitello Tonnato est particulièrement bon, la viande est finement tranchée, la sauce est onctueuse et judicieusement peu abondante.


Les aubergines à la parmigiana sont fondantes, la sauce est vraiment parfumée et a un excellent gout de tomate, la mozzarella est moelleuse.


D’excellentes boulettes a l’Arrabiata, ici qualifiée d’albondigas mais ce sont des polpette. A nouveau une sauce tomate vraiment gourmande.


Je n’ai pas gouté leur spaghetti a la carbonara mais le convive ne s’est pas plaint !


Des Mafaldine «Big mamma ». Les Mafaldine (ou Reginette) sont des pâtes italiennes longues en forme de ruban, caractérisées par des bords festonnés ou ondulés sur toute leur longueur, conçues pour mieux retenir les sauces. Elles tirent leur nom de la princesse Mafalda de Savoie, d'où leur autre nom de "petites reines" (Reginette), et se marient bien avec des sauces riches à base de viande, de poisson, ou de fromage. La sauce étant « celle de la mamma »…une sauce ragu, est une sauce italienne riche et mijotée, principalement à base de viande (bœuf, porc, veau) cuite lentement avec des tomates, du vin, des aromates et des légumes (oignon, céleri, carotte), résultant en une sauce épaisse et savoureuse qui enrobe les pâtes, comme le célèbre ragù alla bolognese, mais avec des variations régionales importantes, souvent appelées simplement ragù. 


Les meilleures pâtes ayant de loin été les Raviolo de burrata alla norma. Les raviolo (ou ravioli au pluriel) sont bien évidemment les pâtes italiennes farcies, traditionnellement de forme carrée ou ronde, faites de deux feuilles de pâte fine qui emprisonnent une garniture. Entre les nombreuses spécialités siciliennes, les pâtes à la Norma sont l’une des plus emblématiques. C’est un plat typique originaire de Catane, une ville située sur la côte est de la Sicile. Les ingrédients principaux sont les pâtes (souvent des macaroni ou des penne), la sauce tomate, les aubergines frites, la ricotta salata mais ici burrata et le basilic, frais de préférence, ici un pesto.


Et pour le dessert un très bon Cannoli avec amarene et chocolat, Une amarena est une petite cerise noire sauvage italienne, amère à l'origine (d'où son nom « amara »), qui est confite dans un sirop sucré, souvent parfumé à l'amande, et utilisée pour décorer des desserts, aromatiser des gâteaux ou garnir des glaces.


Comme vin, un Rioglio Barbera d’Asti Rinaldi, avec une couleur rouge rubis intense avec reflets violets, parfum élégant et persistant caractérisé par des notes de cerise. 


Une parfaite adresse italienne pour une cuisine familiale de qualité, pas de découvertes notoires, mais tout est parfaitement cuisiné. Un cadre charmant, une ambiance décontractée, une agréable adresse.

lundi 8 décembre 2025

Shall we meet, Barcelone

 

Les nouveaux restaurants chinois ne cessent de se créer mais l’inverse également… Mais cette fois-ci ce n’est pas vers l’Arc de Triumf mais non loin de la Sagrada Familia.



Une adresse spécialisée dans les nouilles du Lanzhou qui sont une spécialité chinoise emblématique, originaires de Lanzhou (province du Gansu), caractérisées par des nouilles « lamian » de blé fraiches, étirées à la main par le cuisinier et servies dans un bouillon clair de bœuf, avec des garnitures spécifiques comme du radis blanc, de l'huile épicée, de la coriandre et de la viande de bœuf halal. Ce plat traditionnel met en avant un équilibre de saveurs avec une soupe transparente, des nouilles jaunes, des légumes blancs et des herbes vertes.


C’est probablement l’attraction de cet endroit mais pas seulement ! L’endroit est étonnement moderne, pas tout à fait à quoi l’on a l’habitude de trouver dans certains établissements chinois qui ressemblent plus à des cantines qu’autre chose. Tout est un peu aseptisé, dans les tons blancs, avec quelques calligrammes sur les murs.


Il faut cependant comprendre que l’on vient ici pour se restaurer comme dans n’importe quel établissement chinois de chine…ce qui signifie que nous sommes plutôt dans un concept de restaurant chinois "cantine" qui renvoie souvent à des lieux simples, rapides et axés sur la cuisine de rue authentique ou les plats de base (riz, nouilles, soupes), avec des prix abordables, contrastant avec les restaurants plus élaborés pour les occasions spéciales. Donc ne pensez pas être à table de longues heures !


La salade d'algues comme ici (souvent à base de wakame) est originaire d'Asie de l'Est, principalement du Japon, de la Corée et de la Chine, où elle est consommée depuis des siècles, voire des millénaires, et fait partie intégrante de leur cuisine traditionnelle, notamment dans les soupes miso et les plats d'accompagnement. Sa popularité s'est étendue mondialement, notamment en Europe, grâce à sa saveur marine unique et ses nutriments. 


La carte propose différents mets, certains n’étant pas tout à fait chinois mais cela fait partie du jeu et des demandes de la clientèle comme les excellents filets de poulet frit. Les lanières de poulet frites, notamment les « chicken fingers » américanisés, ne sont pas strictement chinoises, mais elles s'inspirent des techniques de friture chinoises et sont un incontournable de la cuisine sino-américaine.


Les Gyozas frits sont particulièrement bons avec pour une fois une farce qui a du goût ce qui n’est pas toujours le cas en ville où souvent les saveurs sont fades ou non identifiables.


Une fraiche salade de qui marie la fraîcheur du concombre et de la coriandre, avec la gourmandise des cacahuètes, le tout relevé par une vinaigrette salée-sucrée aux saveurs asiatiques.


Puis le fameux ramen aux nouilles du Lanzhou avec une huile pimentée. A noter que généralement les rāmen que l’on trouve sur les cartes sont des recettes de cuisine japonaise inspirée de la cuisine chinoise et adaptée au goût des habitants de l'archipel nippon. Le mot rāmen est emprunté par le japonais de son nom original chinois en mandarin « lāmiàn ». Donc la boucle est bouclée…car on revient à la version chinoise. La pâte est vraiment délicieuse, la sauce pimentée est excellente, un œuf frit et du bok-choy.


On mélange le tout…et on « essaie » de manger ces très longues pâtes avec les baguettes dans en mettre partout…


Une chouette adresse vraiment de qualité pour une cuisine de rue, simple mais parfaitement exécutée a des prix amicaux.