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mardi 16 janvier 2018

Fonda España, Barcelone


J’avais conservé un excellent souvenir de la « Fonda España » datant d’avril de l’année passée, une soirée autour du menu intitulé « Voyage à travers le modernisme » qui nous avait vraiment séduit. Aujourd’hui le contexte est un peu différent car il s’agit d’un déjeuner à plusieurs, avec des personnes aux goûts assez différents. Pas de menu de dégustation mais à la carte et le menu du jour.

Un menu sagement tarifé à 27 euros avec un supplément pour le bœuf, un ensemble de plats probablement un peu plus classiques que ceux du menu de dégustation avec quelques mets qui doivent probablement rassurer une certaine clientèle qui ne recherche pas à explorer la créativité du chef et les influences de monsieur Berasategui. A chacun ses préférences.

Quelques mises en bouche pour l’ensemble de la table dont l’une qui s’avère être un cube de saumon type gravlax, un autre une crème battue, quelques chips que l’on trempe dans une sauce type romesco. Pas franchement emballé, cela reste assez standard et oubliable.



Un des convives choisira les croquettes maison style Fonda. Probablement pas mon choix car l’on peut manger de très bonnes un peu partout, mais compréhensible si vous n’y êtes pas habitués. Irréprochables, goûteuses et avec une bonne texture.


Beaucoup plus intéressant surtout pour un établissement étoilé avec la croquette « cap i pota », anguille et pomme. Intéressant car la farce traditionnelle catalane consiste en une base de pied et tête de porc. L’ajout de l’anguille et de la pomme verte est un clin d’œil à la cuisine de Martin Berasategui avec son mille-feuille caramélisé d’anguille fumée, foie gras, petit oignons et pomme verte. Association aussi présente à notre première visite avec le risotto « Cap i pota », pomme et anguille. Une nouvelle interprétation très bien pensée et très réussie.



Du classique pain à la tomate qui évidemment ici est de qualité parce que le pain de coca est bon, l’huile d’olive parfumée.


Une petite déception avec le riz à l’artichaut et aux champignons pour la simple et bonne raison que ce dernier est fade, manque de sel alors que nous ne sommes pas des personnes qui mangent « salé ». Il y a quelque chose qui manque dans ce riz, qui malgré tout est parfaitement cuit.


Jolie association que ces artichauts, ris de veau et crevettes. Ris bien cuits, légèrement caramélisés, crevettes encore moelleuses ce qui est parfait, un fond de sauce bien relevé mettra en valeur l’assiette.


Les Cocochas de cabillaud aux petits pois manquent un peu de saveurs elles aussi et la présentation est tout de même un peu basique. La sauce de ces parties inférieures du menton du merlu - originaire du Pays basque, manque un peu de relief et presque trop liquide. Une version pil-pil assez commune qui aurait mérité un peu plus d’audace dans sa préparation.


Un irréprochable rack croustillant de cochon de lait, réduction de pieds de cochon et citron kéfir. Rien a redire mais cela reste vraiment très classique et manque singulièrement d’audace dans la présentation et les réductions sont trop peu présentes.


Autre plat de la carte le pigeon avec pâté maison. Je me rappelais du pigeon, cœur de foie, salsifis et praliné de noisette servi dans le menu « Voyage à travers le modernisme », mais allez savoir pourquoi, ici le dressage est un peu rapide et éloigné de l’assiette de l’époque. Quatre morceaux de pigeon, la sauce autour, le cœur de foie atterri quelque part. Pourquoi pas plus de soin à ce dressage ? Le pigeon reste parfaitement cuit, le fond goûteux.


Un classique filet de bœuf, son jus, terrine et pomme de terre, est ne fait un gratin de pomme de terre.


Malheureusement le veau avec une purée de patate douce, restera en grande partie sur l’assiette car la viande est caoutchouteuse et pas agréable en bouche.


Un dessert assez visuel à base de chocolat blanc et fruits rouges.


Un triste fondant au chocolat avec une glace à la tangerine. Je dis triste car servir cela dans une tasse de café…on aura vu nettement mieux. C’est correct mais à nouveau, on peut avoir cela dans beaucoup d’endroits.


Le second dessert ne m’aura pas vraiment plu car déjà le dressage utilise les mêmes composantes que le précédent mais ce qui est le plus regrettable, c’est cette espèce de rondelle citronnée beaucoup trop compacte et pas agréable en bouche, appelé cannelloni de flan catalan et ananas. Ananas utilisé dans la glace. J’ai eu beau faire la remarque à la professionnelle responsable de salle quant a la médiocrité de ce dessert, je me suis laissé dire que le composant avait été préparé par la réputée maison Bubò dans le Born. Un peu étonnant de sous-traiter un dessert pour un étoilé, mais bon…


Quelques mignardises pour finir.


La carte de vin est toujours assez limitée et le choix se fera avec un Perelada 5 Finques.


Un repas vraiment différent de ma première visite qui me laisse un arrière-goût d’amertume où fût-ce un jour sans ? Ou alors avons-nous deux genres de cuisine, celle du menu dégustation soignée et créative, celle de la carte conventionnelle et approximative ? Beaucoup d’assiettes qui semblent avoir été simplifiées ou alors peu travaillées ? Des effectifs réduits en cuisine ? Si je peux comprendre qu’un menu type déjeuner n’est pas comparable a un « menu dégustation » plus coûteux, cela n’explique pas les irrégularités des plats à la carte.

jeudi 20 avril 2017

Fonda España, Barcelone




Quelle belle expérience et soirée que celle passée à la « Fonda España ». Situé dans un hôtel non loin de la Rambla et du quartier de El Raval, cette table est absolument un des endroits a visiter à Barcelone. La première particularité de cet endroit est que cela se trouve dans un hôtel appelé tout simplement « España » qui est un chef-d’œuvre d’art nouveau que l’on appelle « modernismo » en Espagne. Cet hôtel et son restaurant ont été décorés par un des grands architectes du Modernisme Catalan, Lluís Domènech i Montaner qui est né à Barcelone, le 21 décembre 1850 et décéda le 27 décembre 1923. C’est l’un des plus importants protagonistes de ce modernisme – art nouveau et plusieurs de ses œuvres ont été classées au Patrimoine de l’Humanité de l’UNESCO.


Le restaurant de l’hôtel est donc un joyau architectural mais ceci n’est qu’une partie de l’histoire car le chef en cuisine qui de surplus possède une étoile au Michelin est géré par Martin Berasategui, triplement étoilée de San Sebastian. Cet hôtel est donc un chef-d’œuvre de cet art nouveau catalan à proximité de la Rambla. Pour accéder au restaurant on passera tout d’abord par la réception.




La salle principale rien que pour elle mérite que l’on y reste mais avec grande chance ce que vous pourrez y manger dépassera surement toutes vos attentes, car en cuisine German Espinosa y fera des merveilles. Haut plafond, lustres art nouveau, miroirs, faïences murales avec des dessins des représentations de fleurs, marbres roses, vous ne pourrez qu’être sous l’émerveillement de ce patrimoine barcelonais. 









Un plafond de toute beauté et surement unique dans son genre. Prenez le temps d’admirer chaque détail avant de vous concentrer sur la carte car peu d’endroits proposent autant de beauté.



Nous choisirons le menu intitulé « Voyage à travers le modernisme » et qui est vraiment très sagement tarifé pour une telle prestation dans un tel endroit puisqu’à 75 euros. Prix inférieur à d’autres endroits bien moins de qualité que celui-ci. Un menu qui retravaille certains plats classiques Catalans mais tous « validés » par Berasategui et somptueusement réalisés par la brigade de German Espinosa qui compte en tout et pour tout quatre personnes en cuisine.

Un repas qui racontera une histoire, des assiettes souvent très esthétiques car reflétant l’esprit Art-Nouveau par l’utilisation de support originaux. Un savoir-faire culinaire absolument étonnant qui rappellera évidemment le « patron » mais qui sera magnifiquement réalisé par German et son équipe.

Pour se plonger dans cet univers envoutant qu’est le modernisme, nous démarrerons avec un Vermouth, fruits citronnés et œufs de saumon. Le vermouth est un apéritif incontournable en Catalogne, versés sur des tranches de pamplemousse rose et le côté marin sur le dessus. Le tout présenté sur un très beau support vert pomme rappelant évidemment le modernisme. C’est d’une très grande fraicheur, doux, acide, légèrement amer et avec une touche salée.


Autre référence catalane avec le pain à la tomate, anchois de l’escala et basilic. Référence au « pan amb tomaquet », considéré comme la préparation la plus typique de la Catalogne, mais ici retravaillé sous forme de petite tomate pelée entourée d’une fine tranche de pain séchée et avec une petite anchoïade sur le dessus. Tout le long de sa côte, de la Costa Brava aux Terres de l’Ebre, la Catalogne regorge de petits villages de pêcheurs, mais c’est à celui de l'Escala que l’anchois s’avère être la spécialité locale.


A nouveau un clin d’œil au modernisme mais cette fois-ci à Gaudi et le parc Güell. Sur un petit dragon, un « Mer et montagne » qui est donc une association de produit de la terre et de la mer. Un excellent biscuit croustillant dans lequel se trouve une préparation à base de langouste et pied de porc.


Magnifique cannelloni de feuille de capucine, thon rouge et émulsion ibérique. C’est une feuille apéritive d’un vert acide à vert bleuté, dans laquelle se trouve un excellent tartare de thon et sur le dessus une crème au goût de jambon ibérique. C’est original, frais et gourmand.


Très belle assiette très inspirée par Berasategui que la sardine fumée à la Catalane. Une fantastique gelée de pomme verte et de jus d’épinard, des tronçons de poissons fumés, des pignons grillés et des petites sphères de fromage.



Une autre excellente assiette que celle avec l’huitre, pignons et crème au citron vert. J’avais déjà remarqué qu’à San Sebastian, l’huitre y était préparée de manière très originale, ce qui est aussi le cas ici. Provenant du delta de l’Ebre, déposée sur une feuille d’huitre, quelques petits œufs au wasabi, c’est absolument divin.


Un plat intitulé « les sirènes » en relation avec une peinture murale de Ramon Casas dans une des salles de l’hôtel; un turbot dans une sauce pil-pil qui est une spécialité du pays basque à base d’huile d’olive, d’ail et un peu de piment. Ici entouré d’algues et d’un peu de fruit de la passion.


Suivi de champignons des arbres, bouillon Escudella et fleurs d’ail. Un champignon plutôt inhabituel dans un bouillon de viande aux saveurs prononcées. L’Escudella étant à la base une potée d’hiver de Catalogne à base de diverses viandes, pois chiches et pomme de terre. Le tout est absolument parfaitement assaisonné et gouteux.


Après cela un très bon petit pain à la « botifarra » saucisse catalane à base de gros intestin de porc farci aux épices, qui se consomme crue ou cuite. Ici en farce avec tomates et herbes.


Un très gourmand sandwich au porc ibérique, espinaler, concombre et menthe. C’est absolument excellent avec cette sauce espinaler qui est élaborée depuis les années 1950 par la société espinaler, à base de vinaigre, paprika et des épices. Quelques oignons rouges aussi légèrement vinaigrés sur le dessus et de la menthe ciselée pour un coup de fouet en bouche.


Autre très belle réalisation avec le poulet royale à la crevette. Comme un mille-feuille réalisé avec la peau de poulet croustillante, un tartare de crevettes assaisonné avec un bouillon réalisés avec les têtes et sur le dessus le jus concentré de la volaille. Nous sommes vraiment dans de la très grande précision gastronomique.


Impressionnant risotto « Cap i pota », pomme et anguille. Il s’agit à la base de pied et tête de porc, dans un riz, un magnifique fond de sauce. Encore une influence de Martin qui associe souvent anguille et pomme. Cela amène une touche de fraicheur acidulée et un côté fumé. De beaux jeux de textures, des saveurs complémentaires, c’est un très joli plat


A nouveau du pied de porc mais ici avec des navets. Normalement je n’apprécie pas ce produit mais ici, il est parfaitement travaillé et ne ressemble en rien à ce que l’on a eu dans les plats précédents.


Un vrai bonheur que ce pigeon, cœur de foie, salsifis et praliné de noisette. Parfaitement cuit, accompagnée d’un cœur réalisé avec les abats du pigeon amenant une touche un peu sauvage, un salsifis caramélisé avec des brisures de noisette très parfumées qui amènent une touche croquante.




Les desserts seront eux aussi d’un très haut niveau avec cette meringue au lait, framboises et liqueur de ratafia. Une sphère avec à l’intérieur une composition liquide et en parfaite harmonie avec le coté doux de la meringue.



Et probablement un des moments les plus formidables avec un mémorable dessert d’une très grande originalité qui pourrait figurer dans une table avec plusieurs macarons, les asperges à la vanille, chocolat blanc, thé et yoghourt. Un dessert d’une très grande recherche, très subtil en saveurs et textures, point trop sucré et avec des goûts innovants.


Et pour conclure une série de sympathiques petits fours dont d’excellentes pâtes de fruits.


Pour commencer une bouteille de Recaredo Terrers Brut Nature Gran Reserva 2010, cava à fine bulle, qui monte tranquillement dans la coupe, une certaine minéralité du terroir, une fraîcheur de fruit blanc mûr, enrobée de quelques très subtiles notes fumées.


Pour suivre un vin rouge avec un Mas Ramoneda  Finca de la Perdiu  Costers Del Segre 2014, vin assez jeune et simple avec une robe violacée, équilibré avec des notes épicées.


Discussion avec German après le repas pour échanger quelques idées sur la prestation.


Puis passage en cuisine où le service touche à sa fin.


Une visite des salles art-déco de l’hôtel ouvert en 1859 nous est proposée pour contempler les chefs d’œuvres que sont les salles annexes dont celle des deux sirènes.




La cheminée en albâtre de Eusebi Arnau, attenante au bar est une pure merveille.






Une soirée absolument magnifique dans un lieu enchanteur, une cuisine traitement en harmonie avec le lieu, de qualité, cuisinée par un chef très talentueux et de surcroît fort sympathique.