Lorsque l’on
baptise son établissement « Pervers » et promeut sa cuisine comme
étant perverse, cela ne peut que titiller mon intérêt. Toujours est-il que c’est
sensé être une « taverne poétique », que l’endroit a été ouvert il y
a deux mois de cela. Situé dans les locaux de l'ancien « El Bodeguin »,
on peut observer un sympathique intérieur à travers la porte d’entrée.
Une très jolie
et conviviale salle allongée avec un immense bar à gauche et une cuisine
attenante, une série de petites tables et un espace légèrement plus ouvert au
bout avec une petite plate-forme pour ceux qui sont encouragés il parait à
réciter des versets. Murs blancs ou verts, le vrai bistrot de quartier qui
finalement ne ressemble pas à top d’autres endroits de Barcelone.
On
appréciera cette grande table assez particulière en bout de salle, surtout avec
ses chaises avec le dos en cuir repoussé, quelque chose de somme-toute assez
Hispanique et presque d’une autre génération. Le tout associé avec des lampes
industrielles, un mélange surprenant mais qui fonctionne bien.
En même
temps, galerie de tableaux, des expositions temporaires où l’on peut même
acheter les oeuvres exposées. Une structure de bistro vraiment pleine de charme
et plus que conviviale.
Une carte
avec semble-t-il un poème sur l’un des côtés, amenée dans une enveloppe. Et de
l’autre côté les plats du moment. Tapas, petits plats et chauds. Des classiques
mais aussi quelques intéressantes trouvailles.
Des bravas
Stendhal, une belle assiette de pommes de terre poêlées avec encore leur peau.
Pommes de terre cuites en deux passages, un extérieur croustillant et fondante
intérieurement. Des sauces originales pour ces patatas bravas ne l'est pas non
plus. Il s'agit de deux sauces qui cachent deux hommages, le premier est le nom
du plat mentionné plus haut. Et le second, un hommage au livre « Le rouge
et le noir », qui explique pourquoi l'une de ses sauces est rouge et
l'autre est de couleur plus foncée. Le chef Albert a tenté de réunir les deux
capitales des patatas bravas : Barcelone et Madrid. C’est pourquoi nous avons
trouvé un aïoli fin et doux à base d’ail noir, puis une sauce plus madrilène,
avec un sofrito de base et un piquant particulièrement bien dosé.
Second
tapas, des artichauts confits. Une pointe de déception même si c’est l’un des
plats qui soit le plus demandé. Simplement parce que cela n’est pas confit mais plutôt
des artichauts de bocaux avec sur le dessus un peu de tapenade et un peu d’huile.
Retour a un
plat surprenant car original, des biscottes de sobrasada accompagné de sardine
fumée. Vous recevrez quelque chose d’assez inattendu car il s’agit d’une sorte
de briochée dans laquelle a probablement été ajouté un peu de cette charcuterie
en raison de sa couleur orangée. Au dessous la soubrasada qui a été poêlée,
séchée puis transformée en une sorte de terre. Sur le dessus des tronçons du
poisson fumé. De joli jeux de textures, des saveurs contrastées, un visuel très
agréable, coloré.
Autre petit
plat assez surprenant et nouveau en ce qui me concerne et avec un nom
surprenant, « entranable de bacalo ». En fait il s’agit de tripes morue !
En tous cas, voici un poisson dont on ne perd rien, de la tête à la queue en
passant par l'huile de son foie, par la laitance salée et fumée. La morue est
un animal qui, comme le cochon, peut être utilisé presque entièrement. Avec la tête, souvent des
plats magnifiques sont préparés en Galice et au Portugal. En réalité le mot
tripe est utilisé à tort, puisqu'il s'agit en réalité de la vessie natatoire de
l'animal et de l'une des parties les plus précieuses de la morue. Les vessies
pneumatiques ou de bain sont formées d’un sac plein d’air, qui est attaché à la
concavité de la colonne vertébrale épaisse du poisson, de son début à
l’anus. Cette vessie est épaisse et composée d'une substance
gélatineuse. Elle forme une délicatesse quand il est frais et très
apprécié s'il a été salé. La vessie natatoire, ainsi que la langue de morue,
une fois salée et séchée, ont une grande estime dans la gastronomie des régions
méditerranéennes, en particulier de la Catalogne. Ici préparé comme avec des
tripes normales, à savoir une sauce tomate épicée et des pois-chiches. Bon
maintenant, est-ce que c’est bon ? Difficile de répondre car cela n’a pas vraiment
de goût fort, c’est plutôt la consistance qui est importante, à savoir un peu
gélatineuse.
De petits
calamars à l’andalouse absolument irréprochables, accompagnés de citron.
Et
peut-être le plus gourmand du repas, la butifara Farenheit avec un houmous d’haricots.
Je dois avoir oublié l’explication pour le pourquoi de Farenheit, mais toujours
est-il que cette saucisse de Pagès grillée sur une crème d’haricots est tout
bonnement délicieuse. Le plus ici c’est la sauce réalisée avec du vermouth et flambage,
ce qui finalement peut être l’explication du nom de ce plat.
Et le
dessert est tout aussi original et excellent, des cannellonis de pâte de coing
farcis avec du recuit, fromage blanc égoutté dans un drap. Fine pâte de coing,
mousse de fromage légère, un peu de zeste d’orange sur le dessus.
Une bien
sympathique et nouvelle adresse avec une série de petits plats ou tapas gourmands,
parfois très originaux ou alors cuisinés avec « le plus » qui manque
souvent ailleurs. Un cadre très convivial, un service très aimable et souriant,
des prix adaptés et une superbe ambiance.
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