La fille de
mes yeux ou plutôt « La Niña de mis Ojos », un nom plutôt étrange
de restaurant mais en cherchant un petit peu, on s’aperçoit qu’il s’agit d’une
série télévisée vénézuélienne de 2001. Maintenant le rapport avec cet
établissement, il faudra demander au personnel car je n’y ai pas pensé… Une
nouvelle table qui propose selon les dires, une cuisine de marché avec un « twist »
comme se plaisent à dire les anglo-saxons, à savoir quelque chose d’un peu
original ci et là.
Ce qui
frappe immédiatement à l’œil, c’est le côté architectural à l’extérieur qui
laisse présager un décor et une structure inhabituelle dans la plupart des
nouveaux établissements barcelonais. L’entrée laisse présager quelque chose de
très différent, de très étudié, de contemporain mais aussi très intime. A l’entrée,
une porte de verre, des jeux de lumières savamment placés, une petite table
éventuellement pour une attente, on se réjouit d’entrer.
L’intérieur
est dans le même état d’esprit et absolument délicieux. Petit couloir le long
de la cuisine, quelques tables hautes probablement pour les déjeuners ou les
amateurs. Toujours ces lumières parfaitement dirigées et surtout des matériaux
plutôt peu fréquents comme des lattes de bois vertes et en relief comme revêtement
du comptoir. Structures plafonnières métalliques, tissu jaune pour les chaises,
c’est vraiment très plaisant.
On passera
donc le long de cette cuisine très design, puis longera le bar avant de se
trouver dans une des salles de l’établissement.
En cuisine,
le chef Javier Muñoz Orobitg qui auparavant se trouvait chez « Masia Sant
Cugat » et que l’on pourra voire ici face à son « green egg »,
ce qui laisse déjà entre-apercevoir que l’on utilise ici des techniques de
pointe pour la cuisson des aliments.
La
décoration est réellement à prime abord l’une des forces de ce nouvel
établissement. C’est la très talentueuse compagnie « ESTUDIO MM Diseño de Interiores + Decoración » qui a été en charge de
celle-ci. Le résultat est un design élégant, confortable et éclectique qui
mélange différents styles, de sorte que l’on ne peut pas réellement les
identifier. Un peu classique, un peu romantique, un peu
moderne, un peu scandinave et même britannique. Un mélange vraiment judicieux.
Un premier
étage avec une terrasse confortable et un sous-sol, avec une salle privée pour
groupes. Nous serons donc placé dans la salle du fond sur cette chaude
banquette recouverte de velour grenat. A relever que l’accueil fût chaleureux,
respectueux et souriant.
Tables très
joliment décorées, bouquet de fleur, photos sur les murs qui ont été réalisées
par une artiste russe vivant en Thaïlande.
Lorsque l’on
consulte la carte, on s’aperçoit qu’il s’agit d’une proposition gastronomique
dans l’air du temps. Une série de plats avec parfois des influences asiatiques
et principalement japonaises. Non pas une cuisine fusion mais une utilisation à
bon escient de certains ingrédients mais tout en conservant une identité espagnole
et méditerranéenne pour chaque plat. Des assiettes qui a première vue semble
familières mais lorsque l’on en lit les composantes, on se dit qu’il y a un
certain nombre de très bonnes idées. Et pour patienter quelques edamame amenés
à table.
Pour illustrer
ce côté assez inventif, nous commençons par cette bouchée croustillante de
pommes de terre, truffe et œuf. Une pâte style filo ou brick, à l’intérieur du
jaune d’œuf coulant, un peu de pommes de terre. Le tout a été façonné comme un
petit ravioli et passé à la friture. Sur le dessus, une sauce dans laquelle
nous trouverons de la truffe. On se doit de le manger en une bouchés autrement
on perdra le côté ingénieux des diverses textures et surtout on risquera d’avoir
quelque chose qui coule dans son assiette. C’est très gourmand et une très
bonne entrée en matière.
Plus méditerranéens
vais tout aussi plaisant, des sardines marinées avec des petits légumes.
Préparé que le mode des anchois bien connus mais ici ce sont des sardines. Sur
le dessus une julienne de petits légumes assaisonnée de manière pointue avec une
probable touche vinaigrée.
Une
intéressante composition autour d’un poisson, un thon rouge en sauce tomate ou
plutôt à base d’un « sofrito », pâte de tomate aillée et oignonnée
que l'on fait revenir à l'huile d'olive souvent enrichi d'oignons et peut être
condimenté avec du piment niora frit ou du pimenton, fumé ou non. Un œuf
cuit à basse température et des pommes allumettes. On nous recommande de
mélanger le tout, donc de casser la structure du plat. Un peu surprenant au
début mais intéressant.
Le
classique tataki de thon que l’on trouve un peu partout mais ici à l’aubergine
brulée et crème d’algue nori. Sympathique interprétation avec un thon cuit à la
perfection. Le fumé amène des saveurs très complémentaires ainsi que le côté
iodé de cette crème.
Une nouvelle
surprise avec le steak tartare « La Niña de mis Ojos » parce qu’il
est présenté avec un faux jaune d'œuf ! la viande est déjà partiellement
assaisonnée mais le jaune est une sphérification qui comprend les ingrédients du
steak tartare, comme le jaune d'œuf lui même, du vinaigre, des câpres et
cornichons, la sauces type Perrins, etc… Le tout sera donc mélangé à table, rendant
le tartare plus onctueux qu’à l’habitude.
Comme accompagnement,
de grosses frites bien moelleuses.
Un classique
du coin mais tout de même revisité avec un cannelloni farçi à l’osso buco,
moelle, truffe noire et champignon enoki. Pâte excellente comme la farce d’ailleurs.
Une pointe de cette crème de truffe sur le dessus et un succulent demi-glacé qui
met bien plus en valeur ce plat que la lassante sauce béchamel.
Comme
dessert, la fameuse « torrija », transformée en « brioche perdue »
avec une glace au mascarpone et café, pignons. Petit clin d’œil très plaisant
au tiramisu.
Un agréable
vin avec le El Senat del Montsant 2016, avec une belle couleur rubis, fruité et
délicat.
Une
première expérience plus que concluante dans ce lieu ou l’atmosphère est très agréable,
décoré avec goût et élégance. Une cuisine maitrisée parfois inventive mais qui
plaira à celles et ceux qui apprécient tout de même les classiques mêmes si enrichis
de nouvelles saveurs. Tartare, cannelloni, croquettes, bravas, tout est là mais
jamais préparés de manière trop classique. Nous aurons apprécié la justesse des
saveurs, des cuissons, des textures et le côté intime et presque romantique de
l’endroit. Une adresse qui vient s’ajouter à cette nouvelle génération de chefs
barcelonais qui veulent rompre avec la fréquente monotonie des assiettes.
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