C’est au
mois de novembre dernier que nous avions découvert « Capet » dans le
quartier de Gracia et que nous avions grandement apprécié pour sa cuisine très
fine et créative sans jamais lorgner vers les côtés faciles et mode actuels que
l’on trouve trop souvent à Barcelone, cette lassante cuisine fusion. Un chef
vénézuélien particulièrement doué qui utilise de très bons produits et qui les
apprête avec beaucoup de finesse. Vu son succès, Armando Alvarez et Núria Soler
décidèrent non pas d’agrandir leur établissement mais de bouger dans le
quartier gothique. En fait pas totalement bouger mais plutôt ouvrir leur établissement
dans la rue Cometa en l’appelant du même nom et de rebaptiser celui de Gracia
en « Petit Capet ».
Celles et
ceux qui connaissent le quartier se rappelleront qu’à la même adresse, se
trouvait précédemment un autre restaurant appelé « Cometa Pla » dans
un style culinaire assez différent et qui en plus était de qualité. Allez
savoir pourquoi certaines tables fonctionnent ou non… Bref « Capet »
a repris ces locaux et n’a que très peu changé la structure intérieure ou la
décoration.
Les seuls
changements notables et encore faut-il s’en rappeler, c’est d’avoir un peu éliminé
les éléments tels que bouteilles sur des étagères et quelques tableaux ci et
là. Le lieu est un peu plus épuré et d’après ce que nous avons compris, séduit
le chef qui se trouve dans un espace plus agréable et adapté pour cuisiner.
Même concept
que dans la plupart des établissements modernes actuels, une cuisine tout autour
de laquelle l’on peut dîner en observant le chef et sa brigade. Autrement
toujours les tables hautes et basses ainsi qu’un premier niveau lors d’affluence.
La carte ce
soir est à nouveau une merveille et je pèse mes mots car l’on y retrouve comme
la première fois des ingrédients locaux ou parfois de France, des assiettes
très inspirées, des associations souvent étonnantes. Par example ces asperges
blanches avec une crème d’anémone ! Je me fais souvent la réflexion que
les légumes ici à Barcelone, dans la plupart des marchés sont plus que quelconques
et semblent tout droit sortir de cultures douteuses, hors-sol et probablement
ont subit quelques traitements. C’est bien simple, malgré plusieurs visites
dans les grands marchés, je n’ai jamais vu de belles asperges blanches mais
souvent des vertes petites et ratatinées. Je sais que le chef s’approvisionne
directement chez les cultivateurs et nous voila avec de délicieuses asperges à
la cuisson précise. Mais ceci n’est que le début ! Quelle idée fantastique
que d’utiliser l’anémone de mer pour en faire une sauce. Généralement frites,
avec une délicate saveur marine, elles ont été retravaillées sous forme de
de crème mousseuse. L’association d’asperge avec le côté finement iodé est une
très belle réussite.
Le pain lui
aussi est très bon, ce qui n’est pas toujours le cas dans les restaurants.
Autre plat tout
aussi riche en saveur, inventif mais toujours très pertinent dans les
associations car les produits utilisés restent locaux. Un tartare de tomates à
l’anguille fumée. On pourrait s’imaginer de trouver de la tomate en petit
morceaux mais il s’agit plutôt d’une compote bien réduite et douce, à la limite
confite, sur laquelle l’on trouve de fines tranches d’anguille ainsi que du basilic.
L’anguille est un poisson fabuleux, surtout lorsque fumé car légèrement gras et
qui amène toujours beaucoup de finesse aux assiettes. On le trouve parfois
associé avec du foie gras mais avec ces tomates, c’est vraiment très réussi,
sans oublier un assaisonnement précis pour le tartare.
Nous continuons
avec encore l’un des plats que seul Armando à le secret, du maquereau mariné accompagné
de blettes, betteraves et raifort. Le poisson est entre cuit et cru,
heureusement pas passé au chalumeau mais laissé intact pour préserver la
qualité de la chaire et son goût particulier. Déposé sur une délicieuse crème à
base de raifort, ce qui donne un côté un peu puissant en bouche. Je félicite le
chef d’utiliser un tel ingrédient et de ne pas utiliser son cousin wasabi qui à
nouveau est abusivement utilisé un peu partout. Les morceaux de betteraves
marinées amènent une saveur un peu douce et de la texture, la blette apporte de
la fraicheur à l’ensemble de l’assiette.
Restons
avec du poisson, de la morue confite sur une crème d’haricots blancs, oignons
caramélisés, piparres et huile de coriandre. Ici encore c’est vraiment très
pensé car on trouve souvent comme plat la morue aux haricots mais la travailler
de cette manière est assez exceptionnelle. Confite donc, en dessous cette
onctueuse crème qui donne un côté réconfortant en bouche, ces piments basques
de couleur verte légèrement vinaigrés pour une touche d’acidité et la compote sucrée
d’oignons enrichi superbement l’assiette. Une touche finale pour contrebalancer
la texture de la purée d’haricots avec une huile parfumée. On remarquera aussi
l’ajout d’un peu de piment en poudre.
Dans les viandes
et volailles, je me rappelais que le chef apprécie de préparer le pigeon et
autres types d’oiseaux assez puissants au goût. Cela sera son pigeon cuit en
deux fois avec son pâté et salsifi. Une assiette sommes toutes assez française
dans son exécution et absolument parfaite. Les cuisses sont rôties, le dos est
lui encore rosé et c’est ce que l’on apprécie, le fond de sauce est ce que l’on
appelle un demi-glace. Une réduction
réalisée à partir d’un fon brun souvent de bœuf ou de veau, avec un côté
légèrement gélatineux provenant des os et de la moelle. Il n’y a pas a douter
un seul instant de la qualité de cette sauce, le chef connait parfaitement ses
classiques. J’apprécie aussi l’utilisation du salsifi poêlé, légume trop
rarement utilisé. Les abats ont été utilisés afin de préparer une petite crème
ou pâté qui amène une touche puissante à l’ensemble de cette assiette.
S’il y a un
côté à améliorer à cet établissement, c’est les desserts qui sont un ton en
dessous du reste de la prestation. Quelque chose de déjà observé lors de notre première
visite et qui est reconnu par le chef qui si j’ai bien compris pense prendre a
bord un pâtissier. Les fraises flambées au Grand-Marnier avec de la crème
fouettée restent plaisantes mais on s’attend tout de même à autre chose.
Une très
belle découverte avec le Priorat RIU 2015 Combier-Fischer-Gerin. L'infernal est
un projet lancé en 2002 par trois grands vignerons de la Vallée du Rhône : Laurent
Combier (Crozes-Hermitage), Jean-Michel Gerin (Condrieu, Côte Rôtie) et Peter
Fischer (Château Revelette, Provence). Le vignoble de 8 hectares se situe sur
l'appellation Priorat en Espagne. Un vine avec une belle robe foncée
présente des reflets rubis qui dévoilent des arômes fruités et épicés.
Un repas de
haut-vol qui à nouveau positionne l’établissement dans le top ds nouvelles
tables à découvrir ou redécouvrir. Peu nombreux sont les chefs avec autant d’idées
et qui ne sombrent pas dans la facilité. Des produits locaux, des plats très
étudiés au niveau des associations, une manière parfois « un peu française »
d’approcher les cuissons ou les compositions des assiettes. Tout est toujours d’une
très grande fraicheur, très gourmand et d’une intelligente créativité. Assurément
l’une des meilleures tables de Barcelone dans son genre en ce moment.
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