C’est à
nouveau dans le quartier de Sants qu’une très belle adresse s’est récemment
ouverte (octobre 2017), celle de « Sants Es Crema ». Au début je n’avais
pas vraiment compris la signification du nom de cet établissement, mais après
discussion avec notre serveur, j’apprends que le chef Jordi Bernús est un
passionné de musique alors peut-être est-ce une référence à l’un des albums des
The Clash (London’s Burning) ou alors tout simplement « Sants brûle »
car la cuisson de prédilection ici c’est le grill et la braise. Devanture
largement vitrée, arrivée sur le comptoir avec quelques chaises hautes pour
dîner.
Architecture
plutôt originale de cette cuisine ouverte face à quelques assiettes pour celles
et ceux qui préfèrent manger au bar, car le grill se trouve devant vous mais
tout de même séparé par une vitre en raison des la chaleur dégagée. Murs de
faïence noirs qui change des classiques blancs que l’on voit un peu partout,
napperons et vaisselle contemporaine vert céladon. Une opportunité d’observer
devant vous la finition des plats également concoctés dans la cuisine juste
derrière.
Un jeune
chef au joli parcours qui passa chez El Bulli, chez Enoteca Pinchiorri à
Florence ou même à Jakarta au Ritz Carlton, ce qui explique de trouver un plat
utilisant un ingrédient indonésien à la carte, a Barcelone au Drolma. Sur les grills l’on peut observer les cuissons
minutes de poulpes et de volailles. La cuisson à la braise devient de plus en
plus fréquente en Espagne, souvent dans des fours fermés tels que les Josper,
ici c’est plutôt le grill classique que l’on trouve souvent au pays basque avec
également peut-être une touche japonaise comme dans les « robata ».
Mais nous
préférerons la salle contigüe et en longueur à la cuisine avec sa grande
fresque qui représente quelques poissons et crustacés volants stylisés. Le tout
est assez original, ce mélange de deux teintes omniprésentes, le noir et le blanc,
ces tables de bois contreplaqué et ces lumières plutôt puissantes. Pas un lieu
très romantique, mais du fonctionnel, peut-être même un peu trop.
La carte
est dans la mouvance actuelles de nouvelles tables barcelonaises avec ces
références souvent asiatiques ou sud-américaines comme dashi, sauce soja et
épice tandoori. Toujours des associations assez créatives qui ne laissent pas
trop présager ce qui va arriver sur son assiette. Mais aussi un choix de
produits locaux comme poissons et fruits de mer. On choisira comme la plupart
du temps des assiettes à se partager afin de profiter d’un plus grand nombre de
mets. Pas des plats que je qualifierais de bon marché, le ticket d’entrée est
plutôt assez élevé.
Cela
commence avec des arepas aux oursins, fromage ermesenda et truffe. Un démarrage
avec probablement avec le plat le moins aboutit de la soirée car le reste fût
vraiment excellent. Même si la présentation est visuellement agréable, il y a
quelques associations gustatives qui ne fonctionnent pas. Pas un arepas au sens
classique du terme mais plutôt une galette dorée sur laquelle l’on trouve du
fromage au lait cru de vache frisonne fondu, un peu de truffe hachée et une
assez grande quantité de corail d’oursin. Tout d’abord oursin et fromage fondu,
cela ne marche pas. Ensuite le goût de l’oursin masque presque le tout et la
truffe est complètement absente en bouche.
Une très
belle réussite parcontre que ces calçots et langue de veau en sauce au maïs et
truffe. Les légumes sont grillés comme on s’en doute à la braise, recouvert d’une
onctueuse sauce un peu douce et parfumées à la truffe, au dessus de fines
lamelles de langue fumée et séchée mais encore moelleuse. Les petits morceaux
de pomelo amèneront une saveur finement acidulée à l’assiette.
Un plat
peut-être plus classique et régional, un riz au canard et légumes de saison,
truffe et orange sanguine. Le riz est cuit à la perfection, le fond de sauce
est gouteux sans être trop puissant, le canard qui est du filet ou magret est
encore rose et l’ajout d’un espuma avec cette orange apporte une saveur d’agrumes
à l’assiette. La truffe qui est l’un des ingrédients phare du chef se trouve
râpée dans le riz. Une assiette bien gourmande.
Encore plus
gourmand, de délicieux ris de veau avec de petites coquilles Saint Jacques. Poêlés
au beurre, peut-être finis sur la braise, bien croustillants et moelleux à l’intérieur
en parfaite harmonie avec le fruit de mer qui en réalité sont des « zamburiñas »,
en français, pétoncles.
Pour
suivre, de la poitrine d’agneau marinée avec une crème de petits pois de
Llavaneres. Une viande fondante avec un fin goût boisé, accompagnée d’un couscous
travaillé et de cette fine crème onctueuse verte. Magnifique produit local que
petits pois floreta ou
de variété garrofal, cultivés
tout autour de Sant Andreu de Llavaneres, Caldes d’Estrac et Mataró, qui font
la fierté des maraîchers.
En dessert,
la crème « Sants brule », une mousse légère avec au dessus du sucre
passé au chalumeau sur une base de mangue. Quelque chose de non loin des
saveurs de la crème catalane mais associée a du fruit exotique.
Le choix de
vins n’est pas très étoffé, mais le choix fut très probant avec un Autocton
Summoll 2015 Ull de Llebre. Un vin plutôt rare car le cépage Sumoll natif de la
Catalogne est en voie de disparition. Sans acidité, riche et intense en
bouche.
Une cuisine
d’auteur dans un cadre peut-être un peu trop rudimentaire compte tenu du prix
de la note, mais cela reste une très belle prestation. Des plats toujours
autour de l’utilisation du grill, certains un peu plus expérimentaux que d’autres,
des assiettes élégamment dressées, des produits de qualité, une belle entrée dans
les tables qui font évoluer la cuisine catalane.
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