Jusqu’à
présent j’ai toujours grandement apprécié les divers établissements de Carles
Abellan. Que cela soit sont « Tapas24 », son chiringuito à
Barceloneta et surtout l’excellent « Suculent » dans le quartier du
Raval, j’ai trouvé une certaine constance chez cet ancien de Ferran Adria. De
bons produits, un mélange de recettes traditionnelles souvent revisitées avec
également certains plats lorgnant vers l’Asie et l’Amérique du sud. Toujours
beaucoup de succès et souvent des files d’attente dans certains de ses lieux.
Ce qui m’a toujours manqué, c’est d’aller dans sa table gastronomique appelée
« Comerç24 ». Au moment où je m’étais décidé, l’établissement était
fermé car en cours de rénovation. En
fait, cette table n’a jamais réouvert et c’est avec surprise que je découvre ce
printemps l’ouverture d’un nouvel établissement qui semble remplacer justement
« Comerç24 », « La Barra ». Premier étonnement c’est déjà
l’emplacement ; le Passeig de Joan Borbó dans la Barceloneta. Je dois dire
que je vois toujours d’un mauvais œil les tables qui viennent dans des lieux
hautement touristiques. Pourquoi cela ? Si le chef est réputé, tout le
monde viendra son établissement en tout cas à Barcelone. Donc un nouveau lieu sur
cette allée principalement occupées par des terrasses de piètre qualité avec
des serveurs qui vous tendent la carte en permanence.
La aussi
une terrasse avec un bar mais évidemment d’un tout autre genre. On peut aussi
se poser la question de savoir si ce n’est pas pour attirer les propriétaires
de yachts de la marina en face. Jolie terrasse qui a l’air confortable,
peut-être plus pour prendre un verre que de dîner. Mais certains préféreront
peut-être manger là.
L’intérieur
est vraiment très particulier, très contemporain car il n’y a quasiment pas de
tables. Le concept consiste à manger autour d’un comptoir sinueux en forme de
« U ». Au centre un petit coin cuisine où sont finalisés certains
plats sur la braise comme ici par exemple un homard. Selon moi pas vraiment
indispensable mais cela fait partie des gimmicks.
Lumières
étudiées, forte dominance de tons bleus qui est un évident rappel à la mer car
ici l’on vient exclusivement pour apprécier des produits de cette mer crustacés
et poissons. Service professionnel et un peu guindé mais malgré tout l’ambiance
reste plutôt décontractée et la clientèle même si chic ne se prend pas trop au
sérieux. Vous serez donc probablement assis côte à côte avec vos convives, ce
qui peut être un peu contraignant si vous êtes nombreux à moins de préciser que
vous souhaitez lors de votre réservation une vraie table. Ou encore le bout du
comptoir en arc de cercle.
Ce qui fait
aussi la particularité de cet endroit, ce sont ces écrans géants dans le fond à
droite qui filme en permanence la cuisine qui elle se trouve à l’étage
inférieur. Circonstance plutôt amusante avec l’un des cuisiniers qui essaie de
tuer un homard qui réussit dans un premier temps de s’enfuir er saute du plan
de travail. On peut aimer ou non, nous sommes dans une ère digitale !
Au fond, autre
plan de travail ou peut-être plutôt de dressage pour tout ce que sont les
assiettes avec poissons crus. De plus, la pêche du jour est déposée sur des
compartiments de glace et les homards dans des aquariums.
Vous
pourrez toujours descendre les quelques escaliers et visiter les cuisines qui
sont transmises sur ces écrans. Une architecture d’intérieur sommes-toute assez
particulière qui ne peut laisser indifférent.
La carte
sur un support plastique propose donc des tapas, des produits de la mer mais tout
de même si vous le souhaitez, un seul plat de viande qui est du bœuf wagyu.
Lorsque l’on parcourt les intitulés, rien ne semble être spécialement
extravagant. Plutôt des classiques Catalans ou alors des crustacés préparés avec
quelques ingrédients plutôt méditerranéens. Il est donc recommandé comme dans
beaucoup d’endroits de sélectionner un certain nombre d’assiettes et de se les
partager. Pour démarrer, des maquereaux marinés sur un dressage de pommes de
terre. C’est un poisson que j’aime bien pour sa texture et son goût. Assez
classique, pas loin du « hareng salade de pommes de terre ». Plaisant
mais un peu trop quelconque.
Pour
suivre, une omelette aux mini anchois. Enorme déception car ce n’est pas
vraiment une omelette mais une mini galette carrément trop salée, plus une
grosse chips avec sur le dessus quelques tâches de sauce, de la feuille
d’huitre et peut-être des salicornes. Ce n’est pas équilibré, à la limite du
déplaisant.
Les
couteaux de Galice grillés avec une sauce Ponzu, sauce vraiment très à la mode
que l’on trouve vraiment partout à Barcelone, sont bons mais cela manque tout
de même d’un peu de créativité.
Moins
convaincu par les anguilles « all I pebre ». Un classique avec une sauce à base d'ail et de poivre rouge, mais ici elle manqué singulièrement
de goût. Le fait d’avoir quelques instants braisés le poisson n’a pas su amener
une touche fumée.
Nous prendrons ensuite un poisson qui est en suggestion du jour, avec
une sauce d’encre de seiche. Portion vraiment miniature mais poisson bien cuit.
Puis la raie à la madrilène, style trifon. C’est-à-dire la recette des
tripes avec les pois-chiches mais avec le poisson. Plutôt bon mais quelque
chose que l’on peut vraiment manger un peu dans n’importe quel bon restaurant.
Lorsque l’on arrive à ce stade du repas on se dit que c’est vraiment
très loin d’être exceptionnel. Des recettes éculées, un peu de manque de
précision dans les sauces, une impression que l’on paie surtout le cadre, le « show »,
la réputation avant ce que l’on a dans l’assiette. On peut aisément comparer ce
que l’on mange avec d’autres établissements de Barcelone dans les produits de
la mer et on n’est vraiment bien loin du résultat. C’est clairement décevant.
Partageant notre réel manque d’enthousiasme, notre maitre d’hôtel nous
dit qu’ils n’en sont encore qu’au début… Je crois que Carles Abellan nous avait
habitué à bien mieux que cela et avec l’expérience et en plus une carte qui a l’air
d’être permanente, j’ai bien la crainte que cela n’ira pas plus loin en
qualité. Ce n’est même pas le dessert qui nous sera offert qui sauvera la mise,
des fraises dans une montagne de crème et glace au lait de chèvre. Peut-être
que cela me rappelle un peu trop la Suisse…
Question
vins, c’est un peu limité. Au choix les bouteilles des domaines du chef ou une
sélection restreinte avec entre autres un excellent Priorat Les Brugueres 2016
dans un joli seau en cuivre.
Suivi d’une
bouteille de Cava Xampu Brut Nature de Carles Abellan.
Expérience
donc assez peu concluante avec un concept plutôt assez branlant, une carte pas
très originale, une cuisine approximative et des prix assez élevés. On se
demande finalement quelle sera la clientèle cible…
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