Petite
escapade vers Bâle mais dîner en France voisine qui n’est qu’à quelques
kilomètres du centre-ville. Sierentz est facilement accessible en vingt minutes
par l’autoroute qui va en direction de l’Alsace et précisément Mulhouse. Seconde
visite donc à l’Auberge Saint-Laurent, ancien très beau relais de poste au
centre du village. Je me rappelais d’une cuisine très classique et bourgeoise à
l’époque mais ma visite datait de 2010. Depuis cette époque certains peuvent se
rappeler de l’émission TOP Chef et Xavier Koenig, mais c’est surtout la famille
Arbeit qui est grandement responsable du succès de cet établissement. A l’époque
nous avions mangé la cuisine du père qui était comme je l’ai déjà mentionné
plutôt assez classique mais aujourd’hui c’est son fils qui a pris la relève,
Laurent. C’est donc depuis je crois 2016 que l’établissement a été repris par ce
jeune chef qui a fait ses classes chez Haeberlin et Ducasse.
La belle
auberge est encore embellie avec quelques lumières qui pourraient rappeler la
période des fêtes mais on ne pourra que se réjouir que les guirlandes lumineuses
n’aient pas été enlevées, conférant à l’endroit encore un côté plus magique en
soirée.
L’intérieur
n’a absolument pas changé depuis la première visite. Une maison cossue, une
décoration sans âge, cossue, peu contemporaine mais élégante, typique d’une
auberge alsacienne. Murs blancs, poutres,
tapis, lumières douces et anciens meubles. Une salle assez conventionnelle et c’est
tant mieux.
Comme nous
sommes dans la semaine de la St Valentin, nous choisirons le menu « découvertes,
surprises & gourmandises…des AMOUREUX !!! » à 86 euros. Une première
lecture laisse présager une cuisine influencée légèrement influencée par l’Alsace
sur certains plats mais avec beaucoup de nouvelles idées, ce qui a tout pour
nous séduire. Comme entrée en matière nous voilà amené pour « l’apéritif »
une série de petites bouchées. A noter que je ne prends jamais d’apéritif, que
je préfère nettement prendre du vin que je continue d’apprécier avec le début
repas et qua j’aurais apprécié un peu plus de rapidité sur l’ouverture de notre
première bouteille de vin blanc.
Le tout est
joliment présenté sur une pierre avec un délicieux sablé aux cèpes, une cuiller
de fromage de chèvre et canneberges, un bouchon de truite fumée. C’est
classique mais parfaitement réalisé.
Puis une
série de bouchées plus de dernier instant comme un délicieux tartare de homard,
velouté de potiron au gingembre. Certes cela peut sembler surprenant cette
association mais la texture est fantastique, l’assaisonnement idéal et le tout très
gourmand. On sent une audace dans cette assiette qui est bienvenue.
Un
magnifique moment avec le jaune d’un œuf de la ferme « Wolfgarta »
confit au caviar d’Aquitaine, petits violets en croque fondant et crémeux d’artichauts.
Le jaune fermier a été quelques instants marinés dans une sauce de type
asiatique et ainsi apporte une touche un peu sucrée-salée au plat, l’artichaut se
trouve décliné en trois cuissons ; frit, poêlé et en purée. Le tout est rehaussé
par ce caviar d’exception esturgeon appelé Acipenser sturio, largement présent
dans l'estuaire de la Gironde, la Dordogne et la Garonne où les femelles
remontent frayer. Une très grande assiette qui associe le classique avec le
moderne.
A nouveau
un plat très contemporain avec un tartare de langoustine comme en ravigote,
cerfeuil, zeste de citron, éclats de noisette. J’apprécie particulièrement
cette recomposition comme un ravioli de probable navet dans lequel on retrouve
le crustacé, entouré d’un bouillon type miso, avec en plus ces noisettes du Piémont
pour la touche croquante. C’est aérien, parfumé et les saveurs concentrées. Je
ne suis pas sûr de ce que le terme ravigote signifiait et s’il y avait une
moindre ressemblance avec la sauce classique, mais je n’ai pas décelé d’acidité
comme normalement cela devrait être le cas.
N’oublions
pas les délicieux pains avec entre autres les petites boules alsaciennes au sel
et bicarbonate.
Pour suivre
une très esthétique et printanière assiette que la vapeur de sole et de
coquillages au citron, crémeux vert tendre, céleri branche et salicornes. La
recette est vraiment superbe, dommage que le poisson soit quelques secondes
trop cuit, mais il y a beaucoup de fraicheur, à nouveau de légèreté et de
technique.
Un des
plats jubilatoires qu’est le moelleux et gourmands, de petits knepflés et de la
truffe noire, mijotés ensemble comme un risotto alsacien. Malgré une idée préconçue
qui laisserait supposer que ce plat serait riche, eh bien au contraire d’une
grande légèreté, toujours très gourmand et très fin en bouche. Les arômes de la
truffe rendent ce plat magnifique.
Très beau
plat principal avec le pigeonneau de nid fermier d’Alsace laqué à l’orange,
palets de navets et autres légumes d’hiver. Un plat inspiré du probable canard
à l’orange mais revisité, repensé. Le fond de sauce est sublime, le petit côté « brulé »
des fruits apporte une jolie touche presque fumée en bouche.
En entremet
un petit pot, douceur de litchi et fleur de pommier.
Nous
choisirons d’autres desserts que celui du menu. Des desserts un peu en dessous
des plats précédents, trop communs, sans trop de créativité. On reste dans des
choses très classiques. Le soufflé chaud au Whisky, glace au café et crème
fouettée au cacao reste un modèle du genre.
Le crémeux
au café, croustillant de grué de cacao, glace pur arabica et caramel corsé
reste un peu trop sucré à mon goût et linéaire dans les saveurs. Cela manque un
peu d’imagination.
Autres jolies
gourmandises à partager en fin de repas, avec un petit chou à la fleur d’oranger,
un moelleux choco-passion, une tuile sésame et un chocolat yuzu.
Dans les
vins, pour commencer ce repas et accompagner les premières entrées, un excellent
Riesling Grand Cru Kirchberg de Ribeauvillé de Jean Sipp en 2012. De l’élégance,
une belle longueur, des arômes de pèche.
Changement
de région pour le vin rouge avec le classique Domaine Gauby Les Calcinaires en
2013, Côte du Roussillon Village avec une robe couleur pourpre foncé, un nez au
fruité intense, dominé par des arômes de fruits noirs et d'épices douces.
Très
appréciable geste de la maison avec un verre de fantastique Gewürztraminer 2011
Vorbourg en Vendanges Tardives de la maison Muré à Rouffach.
Clairement
la cuisine de cet établissement a évolué ces dernières années tout en
conservant à la carte certains des classiques d’antan mais en y ajoutant une
série de plats de très haut vol. Un chef qui oscille avec dextérité entre ce
classique mais aussi ces plats modernes où l’on se focalise sur l’ingrédient,
les jeux de textures et la légèreté. On apprécierait une démarche identique
pour le côté sucré qui nous a semblé être un peu en décalage. Une auberge qui
nous laissera un très bon souvenir et une très belle halte en direction du
Nord.
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