vendredi 13 mai 2016

Els Tinars, Llagostera



Chaque voyage en Catalogne offre son lot de découvertes gastronomiques et en voilà une qui mérite toute son attention. Je ne saurais dire combien cette région compte de tables étoilées mais surement qu’avec le pays Basque espagnol, on y trouvera probablement le plus grand nombre. Je n’étais encore jamais allé chez « Els Tinars », une adresse le long de la route qui ressemblerait presque à une autoroute ou voie rapide entre Gérone et Barcelone. Une sortie à un moment sur une route parallèle au lieu-dit Llagostera et vous voici face à une stèle illuminée pour vous indiquer un peu dans l’obscurité l’emplacement du restaurant.


Une montée vers un parking gardé et vous voici face à un bâtiment d’une certaine taille où les grandes fenêtres laissent apparaitre la salle à manger.



Une entrée elle aussi avec une grande baie vitrée à travers laquelle l’on devine que la réception se trouve la ainsi qu’un salon avec plusieurs d’élégants canapés.


Canapés de couleur écru, gerbe de fleurs fraiches, parois de tableaux. On se sent dans un lieu convivial et humain.


Ce qui surprend immédiatement c’est l’ampleur du lieu et le nombre de tables. La superficie de ce restaurant est plutôt impressionnante car il y a bien trois salles et l’on pourrait s’imaginer que nous serons un peu perdus dans cette structure cependant ce ne fût absolument pas le cas. Les salles sont particulièrement bien agencées, les tables sont parfaitement espacées pour laisser aux convives un peu convivialité, elles sont soit rectangulaires ou rondes et l’impression générale est que nous sommes finalement dans un lieu plutôt assez cosy. Les lumières sont savamment orientées, la décoration est chic mais être non plus trop guindée. Une ingénieuse organisation de ces salles à manger qui finalement rend l’endroit beaucoup plus intime que prévu. Il faut préciser que selon mes sources, cet établissement a été rénové il y a quelques mois.




Comme nous sommes en période de weekend prolongé, la clientèle assez chic semble principalement être de la bourgeoisie barcelonaise et être une clientèle d’habitués.


La carte qui existe aussi en français est ici vraiment très bien pensée avec une page qui se réfère à une cuisine traditionnelle et une seconde à une cuisine créative. Egalement un « menu dégustation » vraiment très alléchant à 68 euros, ce qui est très raisonnable pour une table avec une étoile Michelin. C’est ce que nous avons préféré pour profiter la cuisine de Marc Gascons, menu qui mélange les styles.

Avant de démarrer ces festivités sont amenés une série de petits amuse-bouche comme un crème onctueuse de pommes de terre dans une verrine, quelques lamelles de saucisson, des préparations soit à base d’olives noirs concassées proche d’une tapenade soit une préparation à base de tomate que l’on étale sur de petits toasts.



Première entrée avec une salade de petits pois, fèves, artichauts, asperges, oignon tendre, menthe et huile à la truffe noire. Cela commence très fort pour maintes raisons. L’assiette « transpire » la fraicheur, l’association de légumes rappelle les classiques fèves à la Catalane mais aussi un peu la cuisine de Bras. Les petits pois sont exceptionnels car petits et sucrés, les asperges justes rapidement poêlées et les artichauts un brin croquants, la mousse cachée au-dessous à bas de petit pois, exceptionnelle. Certes un plats autour de légume de saisons très frais, mais d’une magnifique qualité et une préparation parfaitement équilibrée. Sur le dessus quelques feuilles probables d’oxalis.

Le plus surprenant reste cette association avec une seconde coupelle qui contient une sorte de décoction réalisée avec une crème d’asperge, de la crème et de l’essence de truffe. On alterne la précédente assiette avec cet assemblage. Le tout fonctionne vraiment à merveille.



Seconde assiette plutôt sous forme d’ardoise noire avec des dés de morue, jus crémeux, oignons, poivron doux, épinards, herbes et touches épicées. A la base nous nous attendions à des cubes de morues mais il s’agit d’une préparation avec une morue travaillée et ensuite reconstituée avec un carré de peau sur le dessus. Visuellement très bien construit avec un jeu de couleurs. On déguste la morue avec ces divers éléments afin de toujours avoir un jeu de saveurs différents.
 

L’assiette suivante me laissait un peu dubitatif avec les cannellonis fins au poulet fermier, oignons, jabugo, foie gras, jus de rôti et morille. Je m’imaginais de gros cannellonis comme en Italie avec une sauce…Le tout fût élégamment présenté avec de très fins roueleaux de pâte farcis avec une farce de volaille très parfumée. On associe chaque bouchée très parfumée avec un morceau de morille. Le jus de viande qui sert de sauce est excellent. Un plat classique mais sublimé.
 

Le poisson du jour grillé s’avère être un fabuleux filet de sole juste poêlé accompagné de quelques amandes grillées et effilées, de quelques petits pois frais. Essentiel et irréprochable.


En plat principal un met que je ne suis pas franchement prêt à manger coute que coute, l’épaule de chevreau désossée et glacée, fromage Idiazabal, tomate, herbes et olives noires. Appelé en Suisse cabri, voici encore un exemple qui me fait changer d’avis. Tout d’abord cette viande est cuite à la perfection et se détache de l’os. Ensuite je défie quelconque d’identifier qu’il s’agit de chevreau car la viande n’a absolument aucune saveur prononcée comme c’est souvent le cas. La présentation est parfaite, la terre végétale sur l’assiette est disposée en arc de cercle avec une succession de petite compositions aus saveurs diverses que l’on mange avec chaque bouchée de chevreau. Un plat vraiment intéressant et sublimé.


Non amateur de dessert trop sucré, voici une vraie réussite avec l’ananas, menthe, yaourt et citron. Une assiette pleine de fraicheur et légèreté, légèrement acidulée et des textures coulantes, glacées et consistantes.


Le plus étonnant ou surprenant sera le petit soufflé au gruyère. N’importe quel Suisse ne peut pas s’empêcher de penser au soufflé au fromage salé, grand classique dans le pays. Alors imaginez-vous un soufflé style Grand-Marnier en texture mais avec un arrière-goût de ce fromage. Cela reste plutôt déroutant dans les premiers instants mais si l’on y pense bien, fromage et sucre vont souvent de pair comme un bleu avec un vin liquoreux type Porto, donc pourquoi pas une telle interprétation ? Fût-ce bon ? Je répondrais…intéressant.
 



Et pour le café une série de petit-four tout à fait classiques.


Très belle découverte en vin blanc que le Terra Remota Caminante de chez Marc & Emma Bournazeau en 2014 avec des arômes de pain d'épice, de poivron et d'épices douces.


Ensuite un Brunus Montsant 2013, un vin très expressif qui accompagna parfaitement le chevreau.


On aurait pu s’attendre au vu de la taille des salles et de l’impressionnante cuisine, un service décousu et des attentes, mais au contraire tout fut parfaitement orchestré donnant l’impression que maitre d’hôtel et serveurs étaient dédiés à notre table, toujours prêts à répondre à nos questions.


Voici une très belle et surprenante table où tout est parfaitement organisé, préparé et surtout cuisiné. Une très belle soirée avec une excellente cuisine hésitant intelligemment entre classicisme et modernité, un lieu extrêmement agréable et un service impeccable. Une vraie découverte.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire