Deux
excellents repas chez « Alkimia », le premier en 2012 et le second en
2015. Une cuisine contemporaine, inspirée de la région, subtile et qui
réinventait la cuisine Catalane dans un cadre plutôt chic. Ambiance à l’époque
un peu guindée dans l’établissement non loin de la Sagrada Familia dans la
Calle de la Industria et qui aujourd’hui se trouve dans le concept de la
Fabrica Moritz, brasserie bien connue de Barcelone où l’on sert des tapas et
petits plats. « Alkimia » est devenu un lieu bien caché dans ce bâtiment
de la de la fin 19ème et assurément on n’y arrive pas par hasard. Mais aujourd’hui
ce n’est pas de « Alkimia » dont je vais vous parler mais de « Al
Kostat », qui signifie « à côté ». Pas franchement rendu très
visible ou publicisé, cet établissement est le second restaurant de « Alkimia »
et se trouve exactement au même emplacement. Ne cherchez pas de site web, tout
est sur la page du premier et lors d’une réservation du second, assurez-vous de
bien mentionner « Al Kostat ».
Alors de
quoi s’agit-il ? Eh bien au lieu de déménager l’ancien « Alkimia »,
le concept a sensiblement changé car le chef Jordi Vila a construit son
restaurant en deux parties. La première en table gastronomique et le second, le
« Al Kostat » en une table de tous les jours, bien plus abordable au
niveau des prix mais évidemment avec une cuisine différente, plus simple, plus traditionnelle,
plus comme l’on trouve dans Barcelone mais aussi bien différente car avec la
touche Jordi Vila. Ce n’est donc pas un « Alkimia » moins cher mais
deux concepts différents. Maintenant on peut aussi s’imaginer que la
conjoncture n’est plus ce qu’elle était et que pour réussir, il faut
diversifier son offre. Et tant mieux pour nous. Certains multiplient, les
restaurants et style, ici deux tables adjacentes sous le même toit.
Donc,
rendez-vous à la « Fabrica Moritz », dirigez-vous vers la grande
porte à gauche de l’établissement ou se trouve la plaque « Alkimia »,
appuyez sur le bouton de la très belle sonnerie
comme chez des particuliers, la porte s’ouvrira pour autant que vous ayez une
réservation.
Changement
complet de style et d’atmosphère par rapport à l’ancien établissement, l’intérieur,
le design et le mobilier a été signé Chu Oroz qui collabora à une époque avec
la célèbre troupe de spectacle catalane, la Fura Dels Baus. Certes cela vous
déroutera une fois passé le pas de porte car ce n’est pas vraiment un espace
gastronomique dans lequel l’on arrive mais une entrée d’une maison bourgeoise,
une rampe d’escalier avant d’arriver au premier niveau et se retrouver face à
un mur illuminé qui pourrait laisser penser que nous sommes dans un laboratoire
futuriste ou se trouverait des expérimentations humaines ou animales.
Une fois
passé la porte à gauche, vous vous retrouverez dans un univers assez unique, un
peu science-fiction et étonnement en même temps baroque ! L’accès se fait
donc par « Al Kostat » qui juxtapose « Alkimia ». Pas vraiment
de séparation très distincte entre les deux établissements sauf le style d’ambiance
et les tables de chaque côté. « Al Kostat » est dans une salle plus
futuriste avec des séquences vidéos sur les murs, des tables modernes, un
plafond composé de structures blanches, des planches qui pourraient rappeler l’ossature
d’un bateau, le sol d’origine étant ce que l’on appelle ici hydraulique.
A droite « Alkimia »
dans le prolongement, plus éclairé, un plafond baroque, des nappes blanches sur
les tables et la cuisine ouverte sur la salle. On s’aperçoit que le nouvel « Alkimia »
est bien moins conventionnel que le précédent et surtout que le nombre de
tables a bien été réduit.
Mais revenons
à « Al Kostat » … Salle tout de même à l’ambiance assez particulière,
un peu théâtrale et décorée dans le même esprit que l’entrée avec une paroi d’éprouvettes
géantes qui contiennent divers types d’aliments. Et comme je le disais, des
images un peu floues qui défilent sur le mur du fond et la carte sur la paroi
de gauche. Une expérience ultra-sensorielle et dans la mouvance du temps.
La carte de
« Al Kostat » est bien entendu différente de l’établissement voisin
et propose plus des tapas et petites assiettes à se partager. Des riz, des plats
principaux et des desserts, tout ceci sagement tarifé. Certains plats sont au poids comme les
poissons, d’autres sont des assiettes d’inspirations catalanes mais revisitées.
Comme dans beaucoup d’endroits, nous voilà amené d’excellentes olives sur
lesquelles nous trouveront aussi du chou-fleur mariné.
Ici le
produit est au centre de tout et nous voici déposé sur la table l’excellente
huile Olivar de Can Credo en version 2015. Domaine viticole qui ne produit qu’environ 700 bouteilles de cette
huile vierge et bio.
Le pain est
exceptionnel et se trouve être le même servi dans la partie gastronomique. Pain
que l’on trempera dans l’huile sur lequel l’on ajoutera quelques flocons de
sel.
Première
bouchée avec les huitres grillées avec des œufs brouillés et herbes aromatiques.
Huitre Gillardeau bien charnue, semi cuite, un peu de chapelure, herbes, une
pointe de vinaigre et zestes de citron vert. Je trouve l’huitre un peu noyée
sous le tout et dont le goût a un peu disparu.
Ensuite le
calamar frit avec oignon et mayonnaise. Très bonne texture du produit avec un côté
un peu façon tempura, une fine sauce pas aussi simple qu’une mayonnaise, une
compotée d’oignon finement caramélisée et quelques morceaux de coing, assiette
très réussie.
J’adorerai
cette « coca de recapte » à l’anchois et échalotes. La coca est un type de pâtisserie de
Catalogne qui a évidemment plusieurs versions dont des salées. Elles portent
divers noms en fonction de la recette, ici la « recapte » avec
légumes et poisson. Une très fine pâte recouverte en alternance d’aubergine et d’échalotes,
sur laquelle nous trouverons un magnifique anchois de la légendaire maison
Nardin.
Nous voici
offerts des croquettes Caesar absolument parfaites, probablement nommée Caesar
en relation avec le parmesan du dessus comme dans la salade du même nom. A base
de veau, croustillante à l’extérieur et moelleuse à l’intérieur, avec une bonne
proportion de viande.
Le plat qui
restera ancré dans ma mémoire pour un certain temps, le fabuleux riz à la
palombe sauvage. Alors là c’est une question de goût mais je trouve que dans
certaines préparations de riz, l’Italien est bien plus adapté lorsque l’on
recherche de la finesse et ne pas sombrer dans quelque chose de trop mou. Ici l’empereur
du riz Carnaroli, l’Acquerello dont le grain se détache une pointe croquante.
Le fond de sauce est sublime, probablement réalisé avec les carcasses de la
volaille sauvage. Celle-ci cuite à la perfection et déposée en tranche sur le
dessus, avec quelques girolles. J’imagine qu’il s’agit en fait de pigeon
sauvage au vu de son côté faisandé.
Malheureusement
un plat complètement raté et non facturé avec le ris de veau sur une purée de
pomme de terre. Le problème étant qu’il est spongieux, donc pas forcément bien
cuit et vraiment mal nettoyé, très mal dénervé. Dommage car la garniture est
délicieuse.
En dessert
un classique et très bon flan accompagné sa sauce caramel et de crèmes glacées.
La
sommelière est identique pour les deux salles et la carte de vin est unique.
Evidemment les vins peuvent faire grimper l’addition en fonction de ce que l’on
prend. Conseil de cette sommelière qui est presque identique à sa recommandation
d’il y a quelques années en arrière, un Priorat Torroja 2015. Magnifique vin
rouge cerise, intensément aromatique, fruits rouges très murs avec une très
belle longueur en bouche.
Même s’il y
a eu quelques couacs, il y a eu quelques magnifiques assiettes qui valent
définitivement une visite dans ce très surprenant endroit. J’ai beaucoup
apprécié ce côté un peu décalé, moderne, presque spatial, ce décor inattendu
dans cette belle résidence. Le service est très au point, nettement moins
guindé que par le passé et le fait qu’il n’y ait que quelques tables en fait un
lieu calme et privilégié.
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