dimanche 27 mars 2016

Mechela, Séville



Il y a comme des établissements qui se surpassent, font la différence et qui méritent vraiment d’être reconnus comme d’exceptionnelles tables. J’écrivais dans un autre compte-rendu que le mot tapas avait une signification un peu vague et qui pour un certain nombre de personnes ne représentent que des amuse-gueules de type charcuteries, fromages, olives, et fritures. Mais certaines tables d’une nouvelle génération ont révolutionné ce tapas en proposant quelque chose de beaucoup plus sophistiqué et de parfois gastronomique. Le pays basque se vente de préparer les meilleurs tapas appelés là-bas pintxos mais il semblerait que d’autres régions emboitent le pas. Maintenant on peut se poser la question « quelle est la différence entre un tapas gastronomique servi sur une assiette et une entrée dans un restaurant français… ». Eh bien franchement pas grand-chose… 

« Mechela » restera probablement mon plus beau souvenir à Séville. Pas un établissement type espagnol pour touristes ni une taverne, mais plutôt un lieu assez épuré, plutôt calme et une ambiance très conviviale. Un établissement qui propose une cuisine créative très intelligente et gourmande, ce qui n’est pas monnaie courante.  Une salle plutôt petite où il faut obligatoirement une réservation, un personnel souriant et décontracté, des prix vraiment défiants toute concurrence pour une telle qualité.

Dans une petite rue, deux fenêtres avec du grillage et la porte sur le côté. Pas le genre de lieu qui tape à l’œil et seuls probablement les clients bien renseignés viennent ici.


Un comptoir où éventuellement vous pourrez manger mais on s’y sentira tout de même un peu à l’étroit. Mais n’hésitez pas s’il n’y a plus de tables disponibles.




Pas plus de six tables en bois, murs blancs et comme presque unique décoration le menu du jour sur des ardoises murales. Des suggestions qui changent quotidiennement en fonction des arrivages et des produits de saison. Mais aussi une carte régulière mais qui elles aussi est fréquemment revisitée. Des assiettes qui font souvent référence à des plats de la cuisine andalouse mais souvent avec un brin de folie. On peut rester dans du plus classique mais même ces mets sont toujours dressés de manière assez esthétique.


La carte des vins elle aussi est présentée sur un des autres murs de la pièce sur une ardoise.


En consultant les mets proposés, nous voici offert quelques excellentes olives vertes.


Puis une très bonne salade de pomme de terre comme autre bouchée avant de réellement démarrer le repas. Un léger gout de vin blanc et de vinaigre évidement de Xeres, huile d’olive.


Chaque plat qui suivra furent cuisinés avec beaucoup d’attention. La gosses crevette croustillante avec un « ajo blanco » aux noix de cajou et œufs de poisson. Le crustacé est cuit é la perfection à savoir encore un peu moelleux-cru à l’intérieur. Débarrassé de sa peau, il est entouré de cheveux d’anges pour la touche croustillante, une technique que l’on retrouve parfois en Asie. En complément quelques œufs de poisson pour une saveur plus iodée et la fabuleuse idée d’associer cette soupe d’Andalousie plutôt ici sous forme de sauce. L’« ajo blanco » (ail blanc) est une des variantes du gazpacho des plus populaires et a aussi pour origine l'Andalousie, notamment Grenade, Huelva et Malaga, mais la recette est également célèbre en Estrémadure. C'est un des plats hérités des cultures arabes présentent en Espagne avant l'unification du pays qui normalement est toujours à base d'amandes et d’ail, mais qui ici a réalisé avec des noix de cajou. Un trait d’huile d’olive, un raisin, des saveurs harmonieuses et des textures variées pour une très belle assiette.


Seconde impressionnante assiette avec le cœur de thon grillé avec une vinaigrette de mangue et un « salmorejo » de fraises. Le thon provient de la région où l’on trouve encore du thon rouge, il est juste poêlé et encore légèrement cru au centre comme il se doit. La mangue apporte une petite touche douce et exotique, contrasté par l’acidité légère du vinaigre. Et le plus étonnant sera ce « salmorejo » qui devrait être qui est une soupe andalouse un peu proche du gaspacho à base de tomate et d’ail mais plus simple, cependant ici réalisée avec de la fraise. A vrais dire j’étais plutôt très suspicieux que de manger un poisson avec une sauce à la fraise… Mais l’association fut vraiment parfaite car cette sauce est légèrement salée. Avoir ajouté un peu de sel a cette sauce, néanmoins ajouter une fraise fraiche et déguster cela avec le poisson fût une très agréable découverte.


Autre émerveillement avec pourtant quelque chose de simple et évident mais à nouveau admirablement retravaillé. Le poulpe grillé avec une vichyssoise et des croutons. Poulpe très tendre découpé en tronçons, quelques croutons à l’huile d’olive pour le côté croquant et au lieu de mettre des pommes de terre comme dans le traditionnel « poulpe à la Galicienne », celles-ci ont été transformée dans cette classique soupe.  Une petite touche de piment en poudre fumé. C’est juste parfait.


Nous finirons avec peut-être un plat plus classique mais à nouveau réalisé avec brio, le riz noir, donc à l’encre de seiche et garni de couteaux, crevettes et un aïoli. Cuisson parfaite du riz, crustacés frais et poêlés, petite sauce bien aillée pour accompagner. 


Un très bon dessert ressemblant a un pain perdu qui a été trempé dans du vin doux avec une crème glacée à la vanille vraiment onctueuse. C’est un dessert de la semaine sainte en Andalousie appelé « torrija », qui a été inventé au XVème siècle par des nonnes. On dit aussi que c'est un dessert typique de la période de Pâques du fait de la ressemblance des « torrijas » à de la viande rôtie, nourriture qui est interdite pour les catholiques pendant cette période.  


           
Sympathique vin de Toro avec une amusante étiquette représentant le folklore de cette région, le 24 Mozas, un vin souple mais profond en bouche avec une belle palette de fruits rouges.


Vraiment une très belle table avec ce qui est appelé de manière un peu surprenante des tapas, une cuisine locale mais avec beaucoup d’astuces, des saveurs toujours équilibrées et beaucoup de gourmandise. Un vrai coup de cœur pour probablement notre plus belle table à Séville.

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