Le nom un peu
étrange de ce restaurant est en réalité le pseudonyme sous lequel le critique
littéraire et artiste polyvalent Giuseppe Baretti commença à écrire dans un
bimensuel appelé «Frusta Letteraria » créé à Venise en 1763. Un périodique
où il fustigea la décadence littéraire
de l’époque. « Scannabue » fut
donc celui qui se rebella à l’époque également contre le système par ses
écris et qui refusa d’en faire partie.
C’est sur la rue
Largo Saluzzo à la hauteur d’une place animée que cet établissement se trouve.
Nous sommes ici dans le quartier de San Salvario qui se trouve être l'un des endroits les plus multiethniques et
verts de Turin. Ces caractéristiques et la présence de plusieurs
facultés universitaires en font l'un des quartiers les plus fréquentés et
vivaces de la ville. Le quartier, justement à cause de la présence de
différents groupes ethniques est très intéressant sous un point de vue
commercial avec beaucoup de commerces d'artisanat, de boutiques de vêtements,
restaurants et cafés très fréquentés par les jeunes et les touristes surtout le
soir.
En
arrivant chez « Scannabue » vous serez plutôt surpris par le décor
qui pourrait rappeler presqu’un pub britannique, voir même un salon ou des
lords viendraient boire quelques alcools et fumant le cigare, ou alors un
bistrot style parisien. Quelque chose à mi-chemin et plutôt bien agencé car ce
sont deux salles qui permettent à la clientèle de se restaurer ou alors la
terrasse extérieure qui reste selon moi moins intéressante car peu différente
des autres sur la même place.
Un comptoir plutôt
très beau à l’entrée, des salles au parquet sombre et tables
recouvertes de zinc avec des sets de table de couleur verte rappelant la teinte
de certains murs. C’est probablement d’ailleurs ce ton qui donne un côté aussi
« british » au tout.
« Scannabue » est géré par trois amis: Gigi le sommelier
de très bon conseil, Paolo et Eli,
les deux chefs capable de transformer
chaque repas en une fête. Vous trouverez ici une excellente cuisine piémontaise à partir des apéritifs-vermouth, en passant par
le très large éventail de hors-d’œuvre, jusqu'aux entrées et aux plats
principaux savoureux et substantiels, accompagnés des fameux grissins turinois
(les petits bâtons de Turin dont Napoléon était gourmand) et aux délicieux
fromages qui sont proposés sur le menu.
Ici
les produits proviennes de belles maisons comme la réputée boucherie Martini de Boves ou alors la
poissonnerie Gallina comme l’indique le menu apporté sur de petites planches de bois. Sur la table
dont rapidement déposés ces excellents gressins très croustillants et ensuite
une mise en bouche, un gaspacho plutôt assez crémeux et étonnement bien relevé.
Pour commencer les
hors d’œuvres avec la viande crue, trois tartares dont le premier de bœuf
découpé à la main, le second haché et apprêté avec jaunes d’œufs et une
mayonnaise à la moutarde et pour finir un carpaccio recouvert de fromage au
goût puissant, le Castelmagno du Piémont, fromage de vache au lait entier. Joliment présenté sur une ardoise, une
entrée très représentative de la région.
Aussi le râble de
lapin mariné dans l’huile d’olive extra vierge accompagné de ses sauces vertes
et rouges. Etonnante entrée avec une chair bien tendre déposée en effiloche sur
quelques feuilles de salade que l’on accompagne d’une sauce à base d’herbes et
la seconde probablement un mélange à base de tomate et de poivrons.
Impossible de ne
pas prendre les agnolotti qui sont la spécialité de la région. Leur nom
dériverait de celui d'un cuisinier du Monferrato qui s'appelait Angelotu
(Ange). Son plat, le Piat d'Angelotu serait devenu, au fil du temps, agnolot. Les
agnolotti-maison sont généralement préparés avec une farce de viande de veau, viande
de porc, jambon, œufs, grissins émiettés, plusieurs autres ingrédients et une
râpée de noix muscade. Ils peuvent être assaisonnés aux lamelles de truffe ou
au beurre et sauge, au jus de rôti, à la viande hachée et tomates, au ragoût,
avec beaucoup de parmesan râpé. Mais ici la farce est très différente car on y
trouve du babeurre ou du moins quelque chose qui y ressemble. La pâte est
prodigieuse et lorsque l’on mord dans l’agnolotti, un jus crémeux en sort et se
répand dans la bouche ! On se
demande comment il a été possible de farcir ces pâtes… Pour relever le tout, on
trouvera de la poutargue de Cabras en Sardaigne pour apporter cette touche
marine et du citron râpé.
En met principal
un grand et délicieux classique turinois, le « finanziera » ou Financier
piémontais avec un mélange d’abats de veau et de coq comme la crête, les
rognons, le foie, la cervelle, cuits
dans une sauce au marsala avec une pointe de vinaigre. Le nom de ce plat dériverait
du fait qu'il s'agissait du plat préféré des opérateurs de la Bourse et de la
haute finance de Turin.
Autre plat,
le pigeon Greppi accompagné
d’un oignon farci au fromage Toma Genzianella et de poivrons grillés. Ce pigeon
est hautement réputé un peu comme celui de Bresse, préparé en trois cuissons ;
la poitrine poêlée et encore rose, l’aile rôtie et la cuisse légèrement panées
et frites. Un vrai régal avec un très fond et surtout magnifiquement accompagné
d’un oignon farci avec une sauce à base de fromage crémeux et d’un mélange de
poivrons rouges et jaunes bien assaisonnés.
Puis les
desserts qui sont plutôt alléchants….Je choisirai une glace au Gianduja qui est
un mélange très onctueux de chocolat, de sucre glace et de noisettes grillées,
broyées et incorporées à sec et à cru, ce qui donne une texture et une
consistance particulières à cette préparation proche du praliné. A noter que les
giandujotti désignent aussi des chocolats à la noisette sans enrobage de forme triangulaire.
Cette glace est tout bonnement parfaite, pas trop froide, coulante et crémeuse
sans être trop sucrée.
Autre dessert, le
trio aux noisettes ; le parfait, le gâteau moelleux, la crème aux œufs.
Sur une palette, les trois délicieux dessert chacun utilisant ces excellentes
noisettes du Piémont.
L’établissement
propose une très belle et riche carte des vins .Dans la cave,
vous pouvez choisir parmi plus de 240
étiquettes de vin: rouge, blanc, champagne et vin mousseux. Sur les recommandations de Gigi nous prendrons
un excellent Langhe
Nebbiolo 2010 de la maison Cascina Baricchi.
Le service sera
attentionné et cordial tout au long du repas. Une très belle adresse où l’on
peut déguster une cuisine piémontaise plutôt sophistiquée que normale dans un
cadre un peu inhabituel pour cette région mais qui est tout à fait charmant.
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