Aller au Mexique
et manger des tacos une ou plusieurs fois est assurément une activité
incontournable et même si l’on vous sert inlassablement des « tortilla »
à chaque repas, tout le monde dans ce pays visitera une de leurs « taqueria ».
Chaque région de ce magnifique pays propose des tacos réalisés de manière
différente. Ceux de Tulum ne peuvent pas se comparer à ceux de la ville de
Mexico et ne se comparent pas à d’autres régions du pays. Le « taco »
est donc le plat le plus populaire au Mexique et aucun des soi-disant « taco »
que j’avais pu manger en Europe n’ont jusqu’à maintenant vraiment à ceux qu’on
trouve au Mexique à part quelques rares exceptions. Alors, qu’est-ce qu’un vrai taco mexicain ?
Un « taco »
est simplement constitué d’une tortilla de maïs au centre de laquelle on vient
déposer n’importe quel type de garniture, généralement de la viande ou des
légumes. Ces tacos se mangent avec les doigts et sont souvent accompagnés de
divers ingrédients tels que des oignons, de la coriandre et des sauces épicées
en garniture. Certaines de couleur rouge préparées à bas de tomate, d’autres de
couleurs verte élaborées avec souvent des « tomatillo » ou de l’avocat.
Les deux étant souvent pimentées à des degrés très divers. Certaines sont à
peine épicées, d’autres peuvent franchement vous mettre le feu au palet…
Je vous
parle de tout cela car je viens de découvrir probablement le premier et le plus
authentique restaurant mexicain ici en Suisse romande et de surcroît à Genève.
Et j’ai bien pesé mes mots en vous disant cela car j’ai eu la chance de
parcourir le Mexique et de découvrir plusieurs fois leurs trésors
gastronomiques, aussi bien dans des établissements réputés et luxueux, que dans
des restaurants de rue.
Le plus
souvent, l’on confond la cuisine Tex-Mex avec la cuisine mexicaine et soyons
clairs, la « fajita », le « chili con carne », les « nachos
recouverts de fromage fondu » n’ont rien de mexicain. Ce sont de simples interprétations
de la cuisine mexicaine par les américains et surtout les Texans.
«El Catrin »
se trouve donc dans l’Eldorado des cuisines internationales à Genève, dans le
quartier des Pâquis. Non pas dans les rues « les plus chaudes » mais
un peu à l’écart dans la rue Richemont. Un tout petit restaurant mais en y
arrivant, on s’aperçoit tout d’abord que certaines personnes attendent dehors
et qu’heureusement nous avons une réservation.
Le plus
surprenant c’est de découvrir que l’établissement est tenu par un fantastique
jeune couple, Tareq qui est d’origine Libyenne mais qui est plutôt Genevois
puisqu’il a toujours habité ici et son épouse Gabriela qui elle est Mexicaine.
Le plus joli de l’histoire c’est de comprendre que Tareq en séjournant au Mexique
faisant des cours de cuisine à Oaxaca, qui se prononce « Oiraca » comme il me l’indique
est la capitale de l’État du même nom. Située à 470 kilomètres de Mexico, c’est
entre autres une destination fascinante pour les gastronomes car on y retrouve
une des cuisines les plus authentiques et est actuellement une nouvelle
génération de chefs qui expérimentent d’anciennes recettes et les transforment
en des plats sublimés.
C’est dans
cette ville que se trouve entre autres une des tables les plus réputées du Mexique
appelée « Origen » ou les saveurs de Oaxaca sont cuisinées avec des
techniques modernes par le chef Rodolfo Castellanos. Un restaurant qui propose
également des cours de cuisine et où Gabriela Castellanos en était la
responsable. Gabriela est donc la sœur de Rodolfo, rencontra Tareq dans un
cours et les voilà maintenant ici à Genève pour notre plus grande joie !
Vous comprendrez aisément qu’avec un tel cursus et une telle histoire, le
niveau ne pouvait qu’être très élevé et la cuisine des plus authentique !
Maintenant
il faut réaliser que l’établissement ici à Genève est tout petit, qu’évidemment
on ne se lance pas comme cela aveuglément dans une entreprise démesurée, mais
il est fort à parier que si Gabriela et Tareq continuent à offrir une
prestation telle que celle que j’ai eue hier soir, il y a de fortes chances que
l’endroit devienne incontournable. Tous deux connaissent parfaitement les
tendances de la cuisine Mexicaine avec des Pujol, Quintonil et autres Hoja
Santa de Barcelone des frères Adria. Une cuisine finalement un peu méconnue en
Europe mais qui est en pleine révolution.
« El
Catrin » n’est pas à proprement parler une « taqueria » au sens
propre du nom. C’est plutôt un petit restaurant et bar où l’on sert entres
autres des « tacos » mais aussi d’autres assiettes et également de
fabuleux cocktails. Je ne pensais pas pouvoir trouver ici l’équivalent des exceptionnelles
margarita du Mexique. Eh bien ici vous ne serez surement pas déçus et oublierez
ensuite les médiocres cocktails bus au préalable. Choix de Tequila de qualité,
jus frais, dosage parfait et surtout une série d’authentiques mélanges car une
margarita peut se décliner avec d’autres ingrédients que le citron vert.
Un
intérieur bien sympathique, une décoration colorée comme il se doit, quelques
tables seulement et le bar au centre de la salle. Tareq accueille le client avec beaucoup de
gentillesse, sa femme s’occupe du bar et de la cuisine.
En guise de
bienvenue, une coupelle de « jicama » qui est une
espèce de navet mexicain que l’on accompagne de jus de citron vert et ici d’un sel
un peu spécial mais vraiment authentique appelé « sal de gusano ».
Aussi servi avec le Mezcal avec une tranche d’orange, il s’agit d’un sel avec
des verres de terres. En réalité du sel, du piment et des larves écrasées de l’agave
qui est la matière première utilisée dans la fabrication de la téquila
et du mezcal. Rien que cela me replonge dans un Mexique authentique et prédit
un excellent repas.
Comme je le
disais précédemment, les margaritas sont originales et bienvenues comme la « Mezcalino
Mango » à base de Mezcal, mangue et tajin. Le « tajin » ou
plutôt « Tajín
Clásico » est un assaisonnement pour fruits dont les
ingrédients sont des piments moulus, du jus de lime et du sel.
La « Margarita
Pasion » composée de Tequila, Triple Sec et fruit de la passion.
La « Mezcalina
de Tamarindo » à base de Mezcal, tamarin et aussi de tajin.
La
margarita « El Catrin » à base de tequila, triple sec, hibiscus et
tajin. Toutes furent absolument parfaites, des dosages précis et des saveurs qui
vous feront voyager.
Pour
accompagnement incontournable, des « guacamole ». Le premier
classique avec tomates, le second « Piquante » avec des piments verts
et le troisième avec de la mangue. Tous les trois joliment présentés dans des
coupelles qui ressembleraient a du bois ou peut-être des coques de noyaux de
fruits.
Servi avec
des « totopos » de très bonne qualité. Encore un signe que nous ne
sommes pas chez « un Tex-Mex » car cela doit être servi avec ces
tortillas coupées en triangle et frites (et non ce que l’on utilise pour les
nachos...).
Concentrez-vous
aujourd’hui donc sur les fabuleux tacos réalisés avec des tortillas de maïs de très
bonne qualité. Je dirais que la qualité de celle-ci est une des majeures
composantes de la réussite d’un tel plat. Elles se doivent d’être souples, avec
une belle texture et un goût de maïs de qualité et normalement mexicain ! Celles
au blé…sont pour les « gringos » ! Il semblerait d’ailleurs que
l’on puisse les acheter au restaurant.
La formule
étant de choisir un certain nombre de tacos et de choisir les ingrédients
appelés ici farces. C’est selon les faims mais 3 au minimum d’après moi. Nous en
prendrons quatre avec dans l’ordre.
La « Papa
Con Chorizo » à base de chorizo mexicain fait maison, des pommes de terre
et de l’avocat. En général on ne trouve que le chorizo mais l’ajout d’ingrédients
additionnels est le bienvenu.
Un qui n’est
pas sur la carte mais peut-être pour les initiés…le « Barbacoa ». Is
s’agit généralement d’un mélange qui contient de la viande d’agneau ou de veau.
On peut y trouver souvent également du guacamole, salsa, fromage, crème aigre
et laitue.
Le célèbre
et délicieux « Al Pastor» à base de viande de porc marinée aux piments
secs et épices. Garni d’ananas, de coriandre, d’oignons et citron vert.
Généralement reconnaissable dans les « taquería » parce que la viande
est empilée sur une broche de telle manière qu’elle épouse une forme conique
(un peu comme la viande à kebab). Selon les régions du Mexique, le « taquero »
peut vous servir la viande en y ajoutant un bout d’ananas comme d’ailleurs ici.
L’association des deux saveurs est une vraie réussite.
Un au « Pibil »,
effiloché de porc aux épices Maya. Avec haricots, garniture Pibil (oignon
rouge, radis, piment habanero très puissant). Le terme « Pibil » fait
référence à la méthode de cuisson. La viande, après avoir mariné dans une
préparation à base de roucou, est cuite lentement sur des braises, dans un trou
creusé à même la terre : le « pib ». J’imagine qu’il n’y a pas de
trou dans le restaurant mais le résultat est probant… Ces épices Maya sont en
fait une pâte d’assaisonnement aux graines de roucou que qui est la plus
utilisée dans cette cuisine maya. On peut la trouver prête à l’emploi sous le
nom de « Achiote ».
On ne
pourra pas omettre les fameuses « salsa » avec le « guacamole
taquero », crème d’avocat, citron vert, coriandre et piment vert. C’est
une version allégée du guacamole, un peu plus crémeuse et utilisée comme
complément. Aussi des sauces pimentées maison dans de petites bouteilles.
A côté les
incontournables « frijolès », l’accompagnement
par excellence de toutes les tables mexicaines. A noter qu’ici la couleur est
plutôt sombre donc probablement pas cuisiné avec des haricots rouges mais
noirs. Crémeux et délicieux.
Une fin de
repas qui se poursuit avec un excellent Mezcal Los Danzantes Reposado 43%
accompagné donc de quartiers d’orange et du sel décrit plus haut. Originaire de
Oaxaca, avec une couleur dorée, un parfum rond et boisé, très délicate en
bouche. A relever que la carte propose plusieurs types de Tequila et Mezcal.
Une superbe
expérience pleine de justesse et de savoir-faire que chez « El Catrin ».
Les vraies saveurs du Mexique comme si on y était et c’est plus que rare en
tout cas inexistant à ce jour à Genève. Il est fort à parier que ce couple ne
va pas en rester là et clairement au vu des connaissances, de l’expertise
mentionnée plus haut, Gabriela souhaiterait agrandir, élargir sa carte en
proposant des plats tout autres que ceux d’une taqueria. La cuisine de Oaxaca est
d’une telle richesse, qu’il serait impensable que l’on ne puisse pas découvrir
de nouvelles assiettes. En tout cas voilà enfin un magnifique endroit avec un
énorme potentiel et surtout une formidable équipe en place.
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