Depuis quelques années, les événements « pop-up »
dabs la restauration sont de belles opportunités pour découvrir de nouveaux
chefs « de passage » et souvent des repas plutôt animés et organisés dans
des lieux assez souvent originaux. C’est sous l’initiative de Sussie Villarico
et de Sebastian Mazzola, tous les deux fondateurs de « Cooking in Motion »
et qui récemment furent et sont en charge de créer l’offre gastronomique et la
surveillance des cuisines l’hôtel Edition dans le quartier du Born. Un duo bien
connu à Barcelone qui est une sacrée référence, toujours à l’affut de ce qui se
passe dans le monde culinaire, cuisinier et sommelière hors-pairs.
Aujourd’hui, c’est avec l ’association « bEAuTy
» qu’ils ont démarré un nouveau concept qui consiste donc à inviter des chefs d’autres
établissements et d’organiser dans un superbe lieu, des repas à « plusieurs
mains ». « bEAuty » est
donc avant tout une association qui fonctionne sur quatre aspects : des
produits frais à 100%, l’expérience, l’apprentissage et le goût. Un local vraiment
très discret dans le quartier de Poblenou qui ne laisserait personne de douter
de ce que l’on y trouvera à l’intérieur. Une sorte d’ancienne usine ou peut-être
garage sans réellement d’indication à part le nom quelque part sur l’ancienne
frise du bâtiment. Le lieu se fait appeler, le « bEAuTy Food Academy ».
Aujourd’hui donc, l’invité est l’une des tables
les plus en vue en ce moment, celle de « PROPER » à Buenos Aires, 49ème
dans le World Best 50 région Amérique latine. Deux jeunes chefs et
propriétaires, Leo Lanussol et Augusto Mayer, qui normalement se concentrent
sur des menus de saison composés de petites et moyennes assiettes préparées
avec des aliments cuits dans un four à bois fabriqué à la main. Deux chefs
qui font découvrir les affinités de l'Argentine pour la cuisine à la flamme nue
avec des créations inventives à base de légumes. Alors que la plupart des
autres restaurants de cette ville pensent que la viande se doit d’être un élément
principal, « PROPER » travaille sa magie avec ses légumes, en
accordant une attention particulière aux textures, aux diversités de saveurs et
aux ingrédients de saison.
Un événement unique baptisé « PROPER
Sunday Feast » avec donc les deux cuisiniers mais aussi le chef Tomas
Scarpetti basé au Pays-Basque, chef exécutif pendant quelques années du
médiatique et célèbre chef Argentin Francis Mallmann, sans bien entendu oublier
Sebastian Mazzola.
On attendra 14h30 pour entrer dans ce local parfaitement
adapté à des fêtes privatisées et surtout parfaitement structuré pour héberger
une magnifique cuisine avec beaucoup d’espace. Une grande salle avec de hauts
plafonds, une grande baie vitrée qui donne sur un petit patio où l’on prendra l’apéritif.
D’anciens objets sur les murs tels que des planches à pain, des photos, des
tableaux, mais aussi des écrans plasma pour présenter le restaurant de l’événement.
Deux rangées de tables joliment dressées, une
quarantaine de couverts qui ont bien entendu réservé leur place à l’avance. Une
mezzanine, quelques gros tuyaux métalliques, le lieu est vraiment très bien
agencé.
Derrière le comptoir, les chefs sont là et ont
bien entendu déjà démarré les préparations.
Un menu tarifé à 60 euros avec cinq plats et dessert,
la boisson étant à payer en supplément. On passera tout d’abord un moment dans
ce patio ou sont préparés les cocktails, une variation de Spritz réalisé avec
du Campari, du Cava et une tranche d’orange.
Dans un coin, des grills mais aussi des barbecues
fumoirs comme l’on trouve souvent aux Etats-Unis entre autres.
C’est sur ceux-ci que Leo Lanussol est en train
de préparer le premier plat ou amuse-gueule, rejoint par la suite par Augusto
Mayer.
Puis Sebastian viendra compléter l’équipe pour
le dressage final.
Il s’agira d’artichauts cuits donc à la braise,
une réduction de bouillon fumé de poulet et des herbes telles que persil plat,
aneth et un peu de zeste de citron sur le dessus. Un très bon légume de saison joliment
assaisonné.
Puis pour parfaire le tout, un musicien local
avec sa guitare.
Une ambiance très conviviale, festive et presqu’un
peu familiale.
Cela sera Sussie qui s’occupera de l’accueil,
de la gestion de la salle et du service, sera la sommelière de l’événement.
Une fois assis à l’une des tables nous nous verrons
servis sur une planche de bois, un biscuit à la cendre, champignons et fleurs.
Une sorte de galette bien croustillante à la saveur finement brulée avec sur le
dessus une jolie association de champignons qui se pourrait entre autres être
du maitaké, de la morille, quelques fleurs d’ail, une confiture d’oignons et des
feuilles de capucine. C’est très léger, plein de textures et de types de cuissons.
Une des assiettes les plus remarquable, celle
avec le maquereau mariné, crème à l’encre et citron vert. Le poisson très
moelleux est encore presque cru, entouré d’une magnifique sauce à l’encre de
seiche qui a été travaillée avec du jaune d’œuf, des œufs de poisson et ce
citron fraichement râpé.
Retour vers le légume avec un plat qui sur le
papier pourrait inquiéter mais qui s’avéra être très intéressant ; le chou
Kale, tubercules, gorgonzola et noisettes. Pas grand amateur de chou mais ici
il est cuit au four, ce qui lui amène une certaine saveur et du croustillant.
De la betterave, des patates douces, puis ce fromage de Gorgonzola pour bien
donner du relief à l’assiette. Pour l’anecdote, en Argentine c’est du Patagonzola
qui est utilisé, la version du Gorgonzola de Patagonie ! On appréciera les
noisettes torréfiées broyées sur cette salade.
Encore une autre assiette de légumes avec des « grelos »,
haricots, noix de cajou et pomelo. Les « grelos »
sont connus en Italie sous le nom de « cima di rappa », un légume vert
de la famille du broccoli, juste poêlé. Un mélange d’haricots dans le style, haricots
Tarbais, mogette de Vendée et coco Blanc, mais surement de provenance
locale, apprêtés avec du pomelo pour une fine acidité. La noix de cajou est travaillée
comme une sorte de houmous et se trouve en fond d’assiette.
Le pain qui est servi à base de charbon de bois
provient pour moi de l’une des meilleures boulangeries en ville, si pas la meilleure,
« Yellow Bakery ».
Le plat central est un monument dans son genre.
Cela sera des ris de veau qui seront cuits sur la braise, accompagné de chou, de
courge et de graines de sarrasin. On se rappellera que les argentins sont
maitre en Parrillada ou Parrilla, et que le ris est l’une des
composantes incontournables. Ceci arrivera sur une assiette avec ces choux braisés
recouverts de ces graines torréfiées. Et en dessous un exceptionnel ris de veau
croustillant, le thymus, l’abat blanc du veau, parfaitement cuit au gril. Le
tout se marrie en bouche à merveille avec plein de jeu de textures différentes
et toujours ce petit goût bien plaisant de grillé et de torréfié.
Arrivera en parallèle, la très fraiche salade
de céleri, pomme verte, kéfir de chèvre, noix de pécan. Tout est taillé en fines
lamelles, la base de kéfir amène belle acidité modérée au plat, les noix de la
gourmandise.
Une assiette de trois fromages de brebis du
Pays Basque français qui sera judicieusement accompagnée d’un Sake Edo Genroku,
Junmai genshu, Konishi Brewing, Hyogo. Ce saké spécial est une reproduction
authentique d'une recette de saké Shirayuki traditionnelle de
la période Edo Genroku , années 1688-1704. La recette a été
transmise de génération en génération par cette famille fondatrice de la
brasserie, Konishi, à l'actuel propriétaire et président de la société,
Shintaro Konishi, la 15e génération. Comparé aux techniques de brassage
actuelles, seule la moitié de l'eau est utilisée pour ce saké
classique. En conséquence, le saké Edo Genshu a une belle couleur ambrée,
également due au vieillissement dans les fûts en bois traditionnels
(Taru). Il s’agit d’un saké « genshu" » ce qui signifie que
le brasseur a décidé de ne pas ajouter d’eau à la fin du processus de
production. Le pourcentage d’alcool est donc légèrement supérieur à la moyenne,
à 17,8%. Le riz utilisé est de la variété Yamadanishiki, cultivée
localement dans la préfecture de Hyogo, considérée comme l'une des meilleures
pour la préparation du saké. Ce saké d'une autre époque apporte un style très
salé, moyennement sucré, avec des notes de chêne, de caramel, de tabac et de
baies noires. Il est comparable à un cognac, un porto ou
d'autres vins fortifiés.
Puis le dessert qui est considéré comme étant le
meilleur flan au « dulce de leche » et crème vanille de Buenos Aires.
Le type de dessert à se relever la nuit et qui restera ancré dans mes souvenirs
à tout jamais.
Le choix des vins sera proposé par Sussie et
nous choissirons l’unique blanc, un sympathique Tinc Set Baudili 2018, Macabeu,
Xarello, Mas Candi, Penedes, vinifié par Ramon Jané.
Un déjeuner de dimanche absolument merveilleux,
un cadre assez unique, des assiettes très convaincantes et pleines de
fraicheur, une ambiance de fête ; merci à « Cooking in Motion »
de nous avoir fait passer un si grand moment en compagnie de cette superbe équipe
de chefs !
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