Un nouveau « business model » est né depuis quelque temps à
Barcelone, celui de créer un espace convivial, privatif et ne travaillant que
sur réservation et le plus souvent qu’avec un seul et unique menu dégustation.
De jeunes chefs louent des locaux un peu modernes, voire industriels et
décorent ceux-ci avec un certain goût, le plus souvent un peu bohème. D’autres
créent même des sections dans un appartement où ils habitent afin de créer un
espace culinaire. Une certaine prise de risque car il faut acquérir une
certaine visibilité, se faire connaitre, utiliser les réseaux sociaux, avoir
donc des commentaires et de plus un système de réservation en ligne qui soit
efficaces. Ce ne sont pas ceux-ci qui manquent d’ailleurs sans les nommer.
La première chose qui vient à l’esprit c’est de se demander d’où vient
le chef et quelles sont ses références culinaires et ensuite son parcours. Le
second aspect de ces concepts sont les prix car très souvent, ceux-ci sont
complètement exagérés par rapport à de « vrais restaurants » qui
ont pignon sur rue. Souvent lorsque l’établissement est relativement nouveau,
vous pourrez trouver des réductions sur certains sites, ce qui fût le cas pour
cet endroit et qui m’encouragea à venir diner.
Pour une nouvelle table, 80 euros pour un menu dégustation me sembla
complètement disproportionné, n’ayant aucune référence de comparaison, mais 40
me sembla ne pas être une prise de risque. A noter qu’aujourd’hui, celui-ci est
passé en standard à 55… On se cherche sans aucun doute et les prix manquent
tout de même un peu de clarté. Avec ou sans « wine pairing », etc….
affaire à régler au plus vite.
L’adresse est un peu étonnante car vous êtes dans le quartier du Raval
et pas forcément dans la rue la plus animée et la plus séduisante. Sans
connaitre le lieu, impossible d’identifier que derrière une porte de la rue, se
trouve donc un établissement où l’on vient pour manger.
Vous sonnerez, quelqu’un viendra vous chercher et vous emmènera dans cet
appartement avec tout d’abord le passage dans un couloir. Une rénovation de
très bon goût avec des murs de briques apparentes et des plafonds blancs
joliment illuminés.
Première « étape », une visite de l’agréable patio intérieur réalisé
sur quelques demi-niveaux et principalement en bois. Emplacement où vous
pourrez prendre l’apéritif si vous le souhaitez. Tentes, plantes dans des
caissons en bois et une série de sofas avec des coussins sur d’ancienne planches
de transport. Il n’y a pas à redire, le local de grande taille a été rénové
avec du goût.
Retour à l’intérieur car nous sommes plus intéressés à découvrir les
autres pièces de cette structure de 350 m2 et prendrons cet apéritif dans une
petite pièce aménagée comme un salon privatif. Salon dans lequel vous pourrez
voir le cellier avec diverses bouteilles.
Et pour commencer une coupe de Cava de l’une des deux bouteilles que l’on
verra sur une console. Cava de la maison Vendrell Olivella. J’ai oublié de
préciser que la formule de dégustation inclut l’association de vins.
Le chef viendra nous saluer et nous présentera les premières bouchées de
ce menu de dégustation composé de dix plats ou bouchées. A noter que ce menu
est normalement détaillé sur leur site et même lors de la réservation mais ce
que n’est que parfois indicatif, que certains changements en tout cas ce soir
eurent lieu. En cuisine, deux chefs, Domy Fernandez qui vient de la Coruna et Dina
Revuelta qui a entre autres suivit la célèbre école Hofmann.
Pour commencer un plaisant beignet de morue au piment chipotle (dans la
sauce sur le dessus) et citron vert. Joliment présenté sur une planche de bois
circulaire, on remarquera que l’on fait un bel effort sur la vaisselle.
Puis un agréable petit cornet avec un tartare de saumon avec du concombre,
mousse de pomme verte et noix de coco et mangue.
Et pour terminer un rafraichissant espuma de Bloody Mary accompagnés de
légumes en saumure qui se trouvent au fond du petit verre. Une série d’amuse-bouche
assez contemporains et bien réalisés.
Passage par la suite dans l’une des salles à manger en retraversant donc
le couloir. La première salle se trouve au rez et c’est dans le prolongement de
la cuisine ouverte derrière une grande table que l’on dîne. Ou alors sur la
sympathique mezzanine que l’on accède à gauche de la pièce.
Un joli coin cuisine avec ingrédients, herbes et assiettes en cours de
dressage.
Le plus surprenant c’est qu’une fois sur cette agréable mezzanine, vous
pourrez avoir une vue plongeante sur cette cuisine au travers d’un sol vitré et
également sur la salle du dessous.
Le repas qui suit sera toujours accompagné de vins choisis avec ici un
rosé de pinot noir de la maison Pinord dans le Penedes.
Pain et huile d’olive.
Quatre petites entrées avec pour commencer salade de cresson au lait de
chèvre, radis marinés et noisettes grillées. Pas vraiment une salade car
il s’agit d’une crème de cresson que l’on versera par la suite autour de cette
composition fromagère. C’est esthétique et coloré, simple et léger. Le tout associé
a un bricelet. Une cuisine toujours très contemporaine et de bon goût.
Autre vin du même domaine mais ici en blanc, cépage chardonnay.
Nous poursuivons avec une sympathique fleur de courgette fourrée de
légumes au parmesan et crème de carottes à l'angostura. La fleur au
centre de l’assiette entourée de deux sauces complémentaires. J’apprécie le
côté méditerranéen et l’approche assez orientée autour des légumes.
Vin suivant avec un Aucala de la Terra Alta.
Ensuite une noix de Saint-Jacques rôties, crème d'amandes grillées,
vinaigre balsamique et bacon croustillant au persil et à la pomme verte.
Plat gourmand et plutôt original.
J’apprécierai particulièrement cet original riz à la betterave,
gorgonzola et canard. Riz cuit parfaitement, un côté bien crémeux parfaitement
équilibré avec le fromage et le magret en cubes. Un plat qui me fait penser un
peu à ce que j’ai pu trouver chez Hofmann.
En accompagnement une sorte de pain éponge aussi à la betterave et cuit
quelques instants au micro-onde qui ne m’aura pas laissé de souvenir
impérissable et peut-être superflus.
Nouveau vin avec un Vaquos du Rueda.
Puis un poisson avec un saumon, dashi, purée de panais et basilic. Je n’aime
pas trop le saumon qui n’est pas vraiment un poisson du coin, qui est plutôt à
éviter compte tenu de tous les problèmes connus (élevages intensifs, antibiotiques,
etc.) et aurait préféré un poisson blanc. La recette est néanmoins plaisante.
Même domaine mais la version rouge du Vaquos.
Un plat principal un peu en dessous et un peu trop cuisine ménagère à
mon goût. Non pas déplaisant mais pas dans le même esprit que la cuisine du
début. D’après moi, un peu un plat proposé en lieu et place d’autre chose.
Allez savoir pourquoi… Dressage plus banal, une carotte, et…à vrais dire…je ne
me rappelle plus de quelle viande il s’agissait. Pas mauvais mais plutôt
quelconque.
Les desserts avec tous d’abord des truffes au chocolat.
Puis un dessert un peu fourretout et selon moi pas très aboutit, un peu
je dépose sur une assiette ce que j’ai à disposition. Pas trop de cohérence
dans ce dernier qui consiste de mémoire a un ensemble de glaces et crèmes avec
un peu de fruits de la passion. Une crème au chocolat blanc, glace au café et
banane avec un crumble aux noix.
Le concept en lui-même est excellent mais il y a quelques axes à
rectifier. Tout d’abord au vu de ce que l’on peut observer, la politique de
prix ne semble pas être réellement établie. Il faut urgemment que l’offre soit
claire et semblable entre leur site et les réseaux sociaux de réservation en
ligne. Surtout que dans cette ligne de prix, il y a passablement de
concurrence. Question de goût, mais la ligne directrice culinaire n’est pas si
claire. Certes on pourrait dire que l’offre doit plaire à tout le monde, donc
on trouve une cuisine inventive moderne et légère, ainsi qu’une cuisine plus
locale et traditionnelle. Au vu de l’offre gastronomique si vaste à Barcelone,
il faut savoir se distinguer et créer comme il se dit une « cuisine d’auteur ».
Le prix n’est pas des plus bas pour la clientèle locale et même étrangère, donc
il faut que la proposition se distingue et justifie le prix. Il y a de belles
réussites dans certaines assiettes mais quelques plats mériteraient un peu plus
de sophistication.
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