dimanche 2 juillet 2017

La Marine, Noirmoutier-en-l'île



Trois années presque jour pour jour depuis ma première visite à « La Marine » et que de choses se sont passées ! Tout d’abord une reconnaissance quasi mondiale d’Alexandre Couillon et de son équipe assurément liée à la diffusion de cet incontournable épisode de la série « Chef’s Table » de Netflix, cuisinier de l’année 2017 dans le Gault-Millau, sans oublier le 1 er prix Femme de Chef pour Céline cette année également. Et malgré tous ces honneurs, pas d’égo surdimensionné, Alexandre reste un des chefs les plus sympathiques et accessibles qu’il soit.  A ceci ajoutons l’ouverture quelques jours après ma visite de sa maison d’hôtes ou le terme plus anglo-saxon B&B, avec l’ouverture de cinq chambres. Une maison dans le prolongement de ses deux établissements mais non juxtaposée, appelée si j’ai bien compris « Maison Moizeau ».  A quelques dizaines de mètres sur la droite, un bâtiment en pierres avec des volets blancs et une petite terrasse sur le devant avec vue sur le port de port de l’Herbaudière.



Et à l’arrière, le parking, une structure plus contemporaine avec un mélange de béton et bois. Une probable chambre à l’arrière et au-dessus un espace moderne, un lounge sur deux niveaux avec canapés, chaises et tables.


L’entrée reste comme à l’accoutumée sur la gauche de la maison mais il est fort à parier que les deux structures communiquent entre elles.



La salle principale et l’accueil non pas changés, on se set immédiatement à l’aise dans ce lieu toujours un peu « seventies » mais au goût du jour.




Je ne vous répéterai pas ce que je j’avais écrit à ma première visite que vous pourrez trouver sur ce lien ne représenterai pas les assiettes dégustées de l’époque car le menu dégustation de ce soir inclut certains plats phares, incontournables ou ce que certains appellent « signature », mais me concentrerai principalement sur les nouvelles assiettes.

« Le menu Marine et Végétal » se décline toujours en trois versions, tous les plats, 6 ou 4 plats. C’est pour moi évidement le premier que nous prendrons à 165 euros. Venir jusque Noirmoutier est principalement un voyage pour savourer la cuisine d’Alexandre, donc un menu complet.

Pour démarrer en trombe une coupe de délicieux champagne avec Val Frison Goustan Blanc de Noirs, vinifié de façon « naturelle » et non dosé, une expression aromatique du fruit bien mûr.


Les mises-en-bouches autours de la pomme de terre qui furent décrites ici. La seconde a un peu changé car il s’agit ce soir d’une chips d’algue mais cette fois-ci noire avec autour du poireau grillé et une tarama aux œufs de cabillauds. Première bouchée marine et toujours une agréable entrée en matière pour les saveurs de poisson.


Nouvelle bouchée avec le très tendre mulet fumé déposé artistiquement sur de grandes arrêtes de maquereaux. Poisson fréquent le long des côtes de l'Atlantique, de la Méditerranée et du Pacifique où l'eau est chaude. C’est aussi d’ailleurs un poisson qui peut se pécher dans la Loire ! Il a la curieuse habitude d'introduire dans sa bouche de la boue qu'il filtre et qu'il rejette après en avoir extrait les particules assimilables. Ici fumé aux pommes de pin de Noirmoutier.


Très étonnant amuse-bouche avec cette tartelette de betteraves, fils d’asperges et huile de persil. Etonnant car léger, printanier, frais et gourmand. L’asperge ne semble n’être ni crue et ni cuite, la betterave se marie avec beaucoup de finesse. L’huile amène un peu de texture grasse, la tartelette le croustillant.



A nouveau les extraordinaires et incontournables cromesquis ou truffes de maquereau et de café.  Les trois coupelles sur une planche de bois ont-elles changés, en tout cas deux d’entre elles.  Toujours en fonction des saisons et des produits du moment. Le yoghourt de crevette avec sur le dessus un bouillon de plancton marin ainsi que des cristes marines frites comme une tempura est toujours présent mais aujourd’hui cela sera un fabuleux velouté de tomates et fraises avec cette fois-ci une glace si je me rappelle bien... à base de fromage mais à confirmer. La troisième est un délice avec cette sardine crue dans une crème de fèves. Un plaisir renouvelé que de retrouver ces petits bols aux saveurs si complémentaires avec ce jeu de couleurs.      




Une première bouteille avec un magnifique Pouilly Fumé 2015 Les Vallons de chez Michel et David Bailly. Ce vin libère des arômes délicats de fruits blancs tels que la pêche et la pomme ainsi que des notes acidulées d’agrumes. La fraicheur prédomine ce cépage, alliée à un bel équilibre elle fait un vin très séduisant.


Beurres de production locale et pain maison que j’ai trouvé presque meilleur que la première fois. Réalisés avec de la farine biologique et des levures de bière. Un aux algues et l’autre à la farine noire. Croustillants, parfumés, un vrai régal avec ces beurres.


Nous retrouverons l’immanquable « Coquillage & Crustacés (bord de mer) » déjà précédemment décrit
  

Idem avec l’huître au bouillon de lard et encornet qui a été rebaptisée l’huître Noire « Erika » (Décembre 1999). Céline nous explique que suite à cet épisode de Chef’s Table, le plat a été rebaptisé, l’explication de cette marée noire de l’époque ayant été partagée dans la narration, ce pétrolier qui avait fait naufrage le 12 décembre de cette année-là.


Un grand moment de bonheur avec la visite des cuisines, l’équipe au complet au travail, les dressages méticuleux d’Alexandre et de son équipe. Un instant privilégié où l’on contemple la concentration de cette équipe si soudée.













Le plat qui suit et qui est nouveau sera probablement qui nous aura le plus ébranlé. La daurade royale, cerise et yaourt à la menthe. Quelque chose entre un sashimi, un ceviche et un carpaccio, un poisson d’une incroyable fraîcheur avec une sauce à base d’huile de figues et quelques pousses sur le dessus. En réalité les feuilles du figuier qui auront macérés. La cerise amènera une touche parfumée, légèrement douce et acide, les petites touches de yaourt un côté crémeux et herbeux. Une assiette jubilatoire, pleine de fraîcheur et impressionnante de justesse au niveau des associations.


Autre nouvelle assiette avec le merlan de ligne, courgette et lait de chèvre, œufs de poisson. Un poisson plutôt courant mais quand traité comme ici, une vraie merveille. Une cuisson absolument parfaite, une texture inégalée, un traitement de poisson comme seule « La Marine » sait le faire. Les accompagnements passent par divers jeux de textures, du croustillant, une sauce aussi à base d’amandes fraiches et des racines de poireaux frites.


Nouvelle bouteille avec un vin du Ventoux. La cuvée de Bramefan du Domaine du Tix en 2010. Un vin avec une forte proportion de syrah avec une belle complexité, bien confituré et une attaque franche en bouche.


J’attendais avec beaucoup d’impatience le plat suivant, le turbot, poireau, jus de tête, amande. Simplement car je me réjouissais de gouter un poisson tué selon la méthode ikejime, méthode d'abattage du poisson qui se pratique au Japon depuis plusieurs siècles et qu’Alexandre pratique suite à un stage avec le chef multi-étoilé Toru Okuda au Japon. Le poisson de sept jours est ferme mais fabuleux en bouche, une sensation qui ne rappelle en rien quel qu’autre turbot gouté au préalable. Accompagné de quelques haricots, de salicornes et de feuilles de capucine qui sont arrondies, de couleur vert pâle, avec des veines claires et rayonnantes, ayant une légère saveur qui se rapproche du cresson. Une magnifique assiette qui justifie une fois de plus les raisons de venir apprécier la cuisine d’Alexandre.


Plat additionnel et combien bienvenu, une queue de homard comme seul ici je peux manger. Crustacé tellement difficile à trouver cuit à la perfection au feu de bois de pommes de pin et surtout d’une qualité irréprochable.  Simplement servi avec une sauce à base des carcasses. Accompagné de blettes au jus d’algues noires.


Troisième flacon avec un Prieuré La Chaume Rigoletto 2010, sur les recommandations du sommelier. Vin plutôt très particulier car de Vendée ! Des merlots issus des coteaux du sud, récolté en légère sur-maturité, un vin plein d’exubérance.


Alors que l’on s’attend plutôt à des produits de la mer, le plat principal est un canard de Challans, courgette et abricot, poivron rouge. Je ne me rappelle pas avoir dégusté un canard comme celui.ci depuis des lustres. Selon l’histoire, cette race serait née vers 1650 du croisement de canards sauvages avec des canards apportés par les Hollandais venus remodeler le marais breton vendéen, à moins que cela ne soit par des marins espagnols échoués sur la côte. Une chair qui fond en bouche, une très bonne réduction, une association très juste avec le fruit et la crème de poivron elle aussi douce.


Premier dessert avec une excellente crème glacée de la cheminée. Réalisé avec du lait qui aura été fumé transformé ensuite en glace et accompagné d’un crumble.
  

Second dessert déjà dégusté et commenté, la balade dans le bois de la Chaize. Et pour terminer, des fraises, lait de figue et aspérule, fromage blanc. Tout en fraîcheur et légèreté sans trop insister sur le sucre.



Suivi d’une série de mignardises les unes plus tentantes que les autres. A nouveau une expérience magnifique chez Alexandre, une aventure qui se prolonge au fil du temps avec un voyage à travers l’océan mais aussi son potager, une maîtrise des cuissons et des jeux de textures, une équipe en cuisine et salle qui font de ses repas pour la seconde fois un moment très privilégié.

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