Trois années presque jour pour jour depuis ma première visite à
« La Marine » et que de choses se sont passées ! Tout d’abord
une reconnaissance quasi mondiale d’Alexandre Couillon et de son équipe assurément
liée à la diffusion de cet incontournable épisode de la série « Chef’s
Table » de Netflix, cuisinier de l’année 2017 dans le Gault-Millau, sans
oublier le 1 er prix Femme de Chef pour Céline cette année également. Et malgré
tous ces honneurs, pas d’égo surdimensionné, Alexandre reste un des chefs les
plus sympathiques et accessibles qu’il soit. A ceci ajoutons l’ouverture quelques jours
après ma visite de sa maison d’hôtes ou le terme plus anglo-saxon B&B, avec
l’ouverture de cinq chambres. Une maison dans le prolongement de ses deux
établissements mais non juxtaposée, appelée si j’ai bien compris « Maison
Moizeau ». A quelques dizaines de
mètres sur la droite, un bâtiment en pierres avec des volets blancs et une
petite terrasse sur le devant avec vue sur le port de port de l’Herbaudière.
Et à
l’arrière, le parking, une structure plus contemporaine avec un mélange de
béton et bois. Une probable chambre à l’arrière et au-dessus un espace moderne,
un lounge sur deux niveaux avec canapés, chaises et tables.
L’entrée
reste comme à l’accoutumée sur la gauche de la maison mais il est fort à parier
que les deux structures communiquent entre elles.
La salle
principale et l’accueil non pas changés, on se set immédiatement à l’aise dans
ce lieu toujours un peu « seventies » mais au goût du jour.
Je ne vous
répéterai pas ce que je j’avais écrit à ma première visite que vous pourrez
trouver sur ce lien ne représenterai pas les assiettes dégustées de l’époque car le menu
dégustation de ce soir inclut certains plats phares, incontournables ou ce que certains
appellent « signature », mais me concentrerai principalement sur les
nouvelles assiettes.
« Le
menu Marine et Végétal » se décline toujours en trois versions,
tous les plats, 6 ou 4 plats. C’est pour moi évidement le premier que nous
prendrons à 165 euros. Venir jusque Noirmoutier est principalement un voyage
pour savourer la cuisine d’Alexandre, donc un menu complet.
Pour
démarrer en trombe une coupe de délicieux champagne avec Val Frison Goustan Blanc
de Noirs, vinifié de façon « naturelle » et non dosé, une expression
aromatique du fruit bien mûr.
Les
mises-en-bouches autours de la pomme de terre qui furent décrites ici. La seconde a un peu changé car il s’agit ce soir d’une chips d’algue mais cette
fois-ci noire avec autour du poireau grillé et une tarama aux œufs de
cabillauds. Première bouchée marine et toujours une agréable entrée en matière
pour les saveurs de poisson.
Nouvelle
bouchée avec le très tendre mulet fumé déposé artistiquement sur de grandes
arrêtes de maquereaux. Poisson fréquent le long des côtes de l'Atlantique, de
la Méditerranée et du Pacifique où l'eau est chaude. C’est aussi d’ailleurs un
poisson qui peut se pécher dans la Loire ! Il a la curieuse habitude
d'introduire dans sa bouche de la boue qu'il filtre et qu'il rejette après en
avoir extrait les particules assimilables. Ici fumé aux pommes de pin de Noirmoutier.
Très étonnant
amuse-bouche avec cette tartelette de betteraves, fils d’asperges et huile de
persil. Etonnant car léger, printanier, frais et gourmand. L’asperge ne semble
n’être ni crue et ni cuite, la betterave se marie avec beaucoup de finesse. L’huile
amène un peu de texture grasse, la tartelette le croustillant.
A nouveau
les extraordinaires et incontournables cromesquis ou truffes de maquereau et de café.
Les trois coupelles sur une planche de bois ont-elles changés, en tout cas deux
d’entre elles. Toujours en fonction des
saisons et des produits du moment. Le yoghourt de crevette avec sur le dessus
un bouillon de plancton marin ainsi que des cristes marines frites comme une
tempura est toujours présent mais aujourd’hui cela sera un fabuleux velouté de
tomates et fraises avec cette fois-ci une glace si je me rappelle bien... à
base de fromage mais à confirmer. La troisième est un délice avec cette sardine
crue dans une crème de fèves. Un plaisir renouvelé que de retrouver ces petits
bols aux saveurs si complémentaires avec ce jeu de couleurs.
Une
première bouteille avec un magnifique Pouilly Fumé 2015 Les Vallons de chez
Michel et David Bailly. Ce vin libère des arômes délicats de fruits blancs tels
que la pêche et la pomme ainsi que des notes acidulées d’agrumes. La
fraicheur prédomine ce cépage, alliée à un bel équilibre elle fait un vin très
séduisant.
Beurres de
production locale et pain maison que j’ai trouvé presque meilleur que la première
fois. Réalisés avec de la farine biologique et des levures de bière. Un aux
algues et l’autre à la farine noire. Croustillants, parfumés, un vrai régal
avec ces beurres.
Nous
retrouverons l’immanquable « Coquillage & Crustacés (bord de mer) »
déjà précédemment décrit.
Idem avec l’huître
au bouillon de lard et encornet qui a été rebaptisée l’huître Noire « Erika »
(Décembre 1999). Céline nous explique que suite à cet épisode de Chef’s Table,
le plat a été rebaptisé, l’explication de cette marée noire de l’époque ayant
été partagée dans la narration, ce pétrolier qui avait fait naufrage le 12
décembre de cette année-là.
Un grand
moment de bonheur avec la visite des cuisines, l’équipe au complet au travail,
les dressages méticuleux d’Alexandre et de son équipe. Un instant privilégié où
l’on contemple la concentration de cette équipe si soudée.
Le plat qui
suit et qui est nouveau sera probablement qui nous aura le plus ébranlé. La
daurade royale, cerise et yaourt à la menthe. Quelque chose entre un sashimi,
un ceviche et un carpaccio, un poisson d’une incroyable fraîcheur avec une
sauce à base d’huile de figues et quelques pousses sur le dessus. En réalité
les feuilles du figuier qui auront macérés. La cerise amènera une touche
parfumée, légèrement douce et acide, les petites touches de yaourt un côté
crémeux et herbeux. Une assiette jubilatoire, pleine de fraîcheur et
impressionnante de justesse au niveau des associations.
Autre
nouvelle assiette avec le merlan de ligne, courgette et lait de chèvre, œufs de
poisson. Un poisson plutôt courant mais quand traité comme ici, une vraie
merveille. Une cuisson absolument parfaite, une texture inégalée, un traitement
de poisson comme seule « La Marine » sait le faire. Les
accompagnements passent par divers jeux de textures, du croustillant, une sauce
aussi à base d’amandes fraiches et des racines de poireaux frites.
Nouvelle
bouteille avec un vin du Ventoux. La cuvée de Bramefan du Domaine du Tix en
2010. Un vin avec une forte proportion de syrah avec une belle complexité, bien
confituré et une attaque franche en bouche.
J’attendais
avec beaucoup d’impatience le plat suivant, le turbot, poireau, jus de tête,
amande. Simplement car je me réjouissais de gouter un poisson tué selon la
méthode ikejime, méthode d'abattage du poisson qui se pratique
au Japon depuis plusieurs siècles et qu’Alexandre pratique suite à un stage
avec le chef multi-étoilé Toru Okuda au Japon. Le poisson de sept jours est
ferme mais fabuleux en bouche, une sensation qui ne rappelle en rien quel
qu’autre turbot gouté au préalable. Accompagné de quelques haricots, de
salicornes et de feuilles de capucine
qui sont arrondies, de couleur vert pâle, avec des veines claires et rayonnantes,
ayant une légère saveur qui se rapproche du cresson. Une magnifique
assiette qui justifie une fois de plus les raisons de venir apprécier la
cuisine d’Alexandre.
Plat additionnel
et combien bienvenu, une queue de homard comme seul ici je peux manger. Crustacé
tellement difficile à trouver cuit à la perfection au feu de bois de pommes de
pin et surtout d’une qualité irréprochable. Simplement
servi avec une sauce à base des carcasses. Accompagné de blettes au jus d’algues
noires.
Troisième
flacon avec un Prieuré La Chaume Rigoletto 2010, sur les recommandations du
sommelier. Vin plutôt très particulier car de Vendée ! Des merlots issus des
coteaux du sud, récolté en légère sur-maturité, un vin plein d’exubérance.
Alors que l’on s’attend plutôt à des produits de la mer, le plat principal est un canard de
Challans, courgette et abricot, poivron rouge. Je ne me rappelle pas avoir
dégusté un canard comme celui.ci depuis des lustres. Selon l’histoire, cette
race serait née vers 1650 du croisement
de canards sauvages avec des canards apportés par les Hollandais venus
remodeler le marais breton vendéen, à moins que cela ne soit par des marins espagnols échoués sur la
côte. Une chair qui fond en bouche, une très bonne réduction, une association très
juste avec le fruit et la crème de poivron elle aussi douce.
Premier
dessert avec une excellente crème glacée de la cheminée. Réalisé avec du lait
qui aura été fumé transformé ensuite en glace et accompagné d’un crumble.
Second
dessert déjà dégusté et commenté, la balade dans le bois de la Chaize. Et pour terminer, des fraises, lait de figue et aspérule, fromage blanc. Tout
en fraîcheur et légèreté sans trop insister sur le sucre.
Suivi d’une
série de mignardises les unes plus tentantes que les autres. A nouveau une
expérience magnifique chez Alexandre, une aventure qui se prolonge au fil du
temps avec un voyage à travers l’océan mais aussi son potager, une maîtrise des
cuissons et des jeux de textures, une équipe en cuisine et salle qui font de
ses repas pour la seconde fois un moment très privilégié.
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