lundi 25 août 2014

Nerua, Bilbao


Avez-vous déjà mangé dans un musée ? Peut-être, mais celui dont je vais vous parler fait partie des plus belles réalisations modernes du monde ! Le Guggenheim de Bilbao. Après avoir visité une telle réussite architecturale moderne, difficile de s’imaginer que l’on puisse imaginer quelque chose de plus fou. Quelques heures pour visiter l’intérieur et après peut-être avoir passé quelques moments à votre hôtel (ou ailleurs..), vous voici repartit pour la même destination.


Au sein de ce musée, Nerua mené rondement par le talentueux et réputé chef Josean Alija, possède une étoile au Michelin depuis 2011. Alija fait partie de la génération montante des cuisiniers surdoués ibériques qui de plus sont en train de transformer le pays basque espagnol en Eldorado gastronomique européen.



Après avoir contourné l’édifice, prêt du pont qui s’intègre dans le concept architectural, vous arriverez en face d’une section du musée qui a plutôt l’apparence d’un blockhaus. Quelques marches pour atteindre une porte en bois, pas vraiment d’inscription…on entre… Premier grand étonnement, on arrive devant les cuisines ouvertes ou une armée (et je dis bien une armée..) de cuisiniers, marmitons s’affairent à la tache. Un peu surpris, je me dirige pour prendre quelques photos et quelques instants après, un des cuisiniers vient vers moi, me salue…me souhaite la bienvenue avec un grand sourire…Une ou deux minutes passent et nous voila proposés deux petits amuse-bouches. Une potion herbeuse rafraichissante suivi d’un petit biscuit frit à base je crois de farine de poisson saupoudré de piment. Cela démarre plutôt bien et l’expérience est plutôt nouvelle.





Quelques mètres plus loin, vous voici dans la salle de ce restaurant de forme circulaire. L’intérieur est probablement l'un des endroits les plus ébranlant que j’aie pu voir et je ne m’en suis pas encore remis... Des tables vêtues de blanc, des nappes en lin, pas de fleurs, pas de bougie…Tout est épuré. Et….aucun dressage !!!! On s’assied autours d’une table vide ! Je peux vous garantir que cela ne plairait pas à tout le monde… Il y a quelque chose de presque monacal, et les mauvaises langues pourraient même penser se trouver dans la cafétéria d’un hôpital… Après quelques instants l’on réalise qu’il y a une parfaite osmose entre le musée et cette table. Maintenant, il va falloir que la cuisine tienne ses promesses…




Nous sommes ici dans un endroit qui serait sensé proposer de la très haute cuisine, un style que l’on pourrait qualifier de révolutionnaire où le superflu aurait disparu, une cuisine des sens ou chaque élément a une signification profonde. L’utilisation des ingrédients simples seraient retravaillés de manière à ce que l’on ne puise pas à prime abord en reconnaître l’origine ; les textures seraient changées, les saveurs métamorphosées, et les arômes transformés. Et bien je peux vous dire que cela fut une sacrée déception sur toute la ligne… ou alors je n’ai strictement rien compris à la cuisine minimaliste.

La carte propose un certain nombre de plats dont deux menus. Nous avons sélectionné celui intitulé « 8 produits… » . Après prise de la commande, une des deux services nous amène le pain qui nous est directement servis avec sa main….mais en ayant au préalablement mis un gant…A nouveau surprenant.

Premier plat ; Poireau, germe de riz et concentré de porc ibérique. Visuellement très beau, une fine feuille de poireau croustillante sur un lit de ces germes avec une sauce un peu invisible. Une association de textures assez différente, mais première observation…C’est ce que j’appelle mono-saveur…Les germes de riz, bon d’accord cela « sonne bien »…mais cela n’a aucun intérêt, et le concentré me fait plutôt penser à de la sauce soja.


Pour suivre, un mijoté d’oignon blanc, fond de morue et poivron vert. Un oignon au milieu de l’assiette recouverte d’un morceau de peau de poisson, sur une sauce au goût indéfinissable, un peu collante au palais…Ou sont passés les saveurs de morue et poivron ? Aucune idée…


Troisième plat, de l’araignée de mer, asperges blanches et crème de raifort. Une « traînée » de chaire d’araignée, quelques tranches d’asperges…je cherche désespérément le goût du raifort…


Nous continuons avec des petites fèves, germes de chou, bouillon de haricot blanc et castagnettes de porc ibériques. Premier plat avec un peu de relief, ces castagnettes semblent être des glandes similaires au ris de veau. C’est bon, mais a nouveau un peu linéaire au niveau des saveurs.


Les anchois à la bilbaine, et ciboulettes rôties ne m’ont laissé aucun souvenir à part avoir trouvé deux filets un peu crus dans une sauce insipide.


L’autre convive demanda un changement et eu des joues de merlu dans un bouillon alliara et noisettes. Je ne sais toujours pas de quoi ce bouillon était fait mais selon les commentaires entendus, dans la lignée des autres plat…Sans goût particulier.


En plats principaux, un turbot au romarin, navet confit pour un et pour moi un foie gras rôti, poire et hibiscus. Je crois qu’à ce stade, que l’on ne sait plus trop si c’est bon ou non…J’ai dans mon assiette un simple morceau de fois gras braisé avec quelques grains de sel, un morceau de poire trempé dans l’eau d’hibiscus donnant ce coté rouge… Et alors ? Je dois avoir manqué quelque chose…



Comme premier dessert, Avocat, larmes de pamplemousse, noix de coco glacée. Première impression d’avoir un plat un peu construit. La glace est onctueuse, la crème d’avocat sucrée se marie parfaitement avec le froid, et quelques morceaux de pamplemousses émiettés et congelés, rehausse le tout grâce à l’acidité ! Un très beau dessert.


Le second dessert avait un peu de génie mais mériterait d’être un peu retravaillé. Un mille feuilles de pomme de terre, pomme et lima. Imaginez-vous des strates croustillantes comme des chips mais sucrées au milieu desquelles se trouve une purée de pommes de terre sucrée légèrement aromatisée au citron vert ! Cela marche ! Mais cela devrait être plus tranché au niveau saveur avec plus d’acidité et amplifier le goût de la pomme qui selon moi était inexistant.


Alors que dire ce repas…. Nouvelles techniques ? Innovation? Recherche ? Provocation ? Escroquerie ? Alija ne travaille pas seul. Il s’est investi dans la construction d'une équipe de 23 cuisiniers dont les méthodes de travail sont très précises et qui semblent toucher à la perfection. Moi, je n’ai pas du tout été convaincu…Je n’ai pas identifié de perfection gastronomique ou artistique comme je pensais trouver dans ses assiettes. Des saveurs linéaires ou inexistantes, malgré tout un manque d’audace dans certaines compositions. Ici l’esthétisme et le concept sont poussés à outrance…et même si Alija souhaite propulser sa table dans les 50 meilleurs restaurants au monde, il me semble qu’il y a encore un peu de route. Mauvais menu ? Insensibilité à ce type de cuisine ? Cela reste néanmoins pour moi une déception.

samedi 23 août 2014

Cafe Iruña, Bilbao


Impossible lorsque l’on est à Bilbao de ne pas au moins une fois visiter le café Iruna ! Ce café est situé à l’angle de Colón de Larreátegui et Berástegui, juste en face d’un très beau parc, le jardin d’Albia ou les locaux regardent passer les promeneurs et hommes d’affaires.



De style mauresque lorsque l’on arrive on est un peu surpris par le coté intemporel de cet endroit. Une salle qui n’aurait pas changé depuis 1903, inaugurée par le Navarrais Severo Unzue Donamaría. Vous y verrez de belles nappes blanches, des murs de bois aux impressionnantes ciselures, et une pléthore de serveurs « tout mignon », gominés et habillés classiquement d’un gilet noir avec un nœud papillon !






L’établissement doit bien compter plusieurs centaines de mètres carrés. Au milieu un bar où l’on s’accoude et boit un verre, et une troisième partie, prolongement de la première ou les murs sont recouverts de faïences très typiques.





Certaines fresques en carrelage promeuvent des apéritifs espagnols (certaines proviennent de la célèbre famille Domecq). Tout de suite un de ces messieurs se précipitent vers vous en vous demandant ce que vous souhaitez…Avec mon espagnol vacillant, c’est partit pour du "vino blanco"…et je fais le tour du sympathique bar ou sont exposés les fameux pintxos… Clair que c’est ma « première attaque »…donc je suis probablement un peu moins critique que si c’était ma énième expérience consécutive. Le choix se porte sur une demi-douzaine de ces petits amuse-bouches qui ne coutent presque rien… La plupart sont à base de jambon, de produits de la mer, d’anchois, de pimientos…En fait vraiment rien d’exceptionnel et plutôt sans saveurs particulières. Ce n’est ni bon, ni mauvais...juste banal.









Je réitère qu’il faut venir ici surtout pour le décor, la beauté du lieu et l’histoire de l’établissement. Question pintxos…il y a sûrement nettement mieux. Néanmoins, agréable pour un arrêt vers 14 :00 !

vendredi 1 août 2014

The Jugged Hare, Londres



Comme je suis dans une phase « cuisine britannique », mon choix ce soir s’est porté sur un « gastropub » que j’avais depuis longtemps envie de visiter mais qui à chaque fois était complet.  On se rappellera que la signification d’une telle appellation est l’association évidente des mots gastronomie et pub. Jusqu’il y a quelques années en arrière, la plupart des pubs servaient plutôt de la bière ou des boissons alcoolisées et rien de vraiment très excitant pour la nourriture, souvent grasse et commune tels que des « pies », des saucisses-purée ou « fish & chips ». Le terme en réalité date depuis plusieurs années puisqu’il a été créé dans les années 1990, ce qui fait presque un quart de siècle ! Il existe même en dehors de Londres un célèbre « gastropub » où il faut réserver une année à l’avance pour dénicher une table… le « Hands & Flowers » avec même deux étoiles au guide Michelin !

Bref, ce soir cela sera non loin du quartier de Barbican que je me rendrai pour diner au « The Jugged Hare »,  le « civet de lièvre »… Le terme « jugging » consiste donc à cuire de la chasse marinée dans une casserole pendant une longue période avec du vin, du genièvre, du sang et du porto.

Il ne faut généralement pas s’attendre à de la cuisine créative mais à une cuisine locale souvent injustement décriée qui peut vraiment être délicieuse. Une cuisine britannique parfaitement réalisée équivaut l’on dira à une cuisine de bistrot type « bouchon » et voir même brasserie.

Au coin d’une rue, ce lieu est déjà unique dans son genre car il s’agit d’un pub qui se targue d’être presque un rendez-vous de chasse. 


Animaux empaillés ; lièvres (évidement) mais aussi des oiseaux et une tête de cerf géante dans un coin. Comme nous sommes en été, la clientèle juste venue prendre un verre n’hésitera pas à occuper la rue. Phénomène amusant et tout à fait courant à Londres.


L’intérieur est vraiment très beau avec une ambiance enjouée. Un bar comme dans tous les pubs mais tout de même une certaine classe. Serveurs avec gilets de tweed et doublure de soie rouge. Derrière ce bar une série de vitrines avec des bêtes empaillées comme dans un musée d’histoire naturelle ou un intérieur de taxidermiste.






C’est donc ici que je démarre avec une bière tirée directement du tonneau, bière portant d’ailleurs le nom de l’établissement à ranger dans la catégorie des « bitter ». Cette « Jugged Hare Pale Ale” est produite par le brasseur Duncan Sambrook (London’sSambrook Brewery) , réalisée avec du malt, blé, eau et levure ; des produits tous provenant de Grande-Bretagne. Un goût citronné, épicé avec une légère amertume.


C’est en descendant quelques marches à droite et dépassant le mur de têtes de lièvres que vous arriverez dans la salle du restaurant. 



Une fois après m’être annoncé à l’hôtesse, me voici installé face à la cuisine ouverte ou le chef Richard O’Connell orchestre les activités de son équipe. Une cuisine mais également une rôtisserie.




Une jolie salle plutôt classique et comme le pub à l’entrée, dans une gamme plus chic que la plupart des établissements de cette catégorie.

En saison, la spécialité est évidement la chasse mais de mars à  juillet, période de reproduction, il est interdit de vendre du gibier. La carte tout à fait intéressante proposera un joli assortiment de plats plutôt roboratifs, tous lorgnant vers la Grande-Bretagne.

Une fois la prise de commande passée, me voici amené une planche avec pain plutôt bon et un beurre salé.


Je choisis pour commencer ce qui est considéré comme un snack mais en réalité la taille est plus proche d’une entrée. Il s’agit de croquettes de boudin irlandais Clonakilty avec une sauce Guinness. Tout de suite ceci m’avait interpelé est c’est avec surprise que je découvre quelques chose de vraiment succulent. Le boudin Clonakilty est fabriqué depuis 1880  par plusieurs générations et la recette est tenue secrète par la famille Twomey. Il est ici retravaillé en forme de croquette et ensuite passé à la friture. La sauce en accompagnement est réalisée avec la célèbre bière. C’est une très belle entrée servie sur une belle planche de bois.


Autre entrée,  de la langue de bœuf, salade de betterave, cornichon. Quelques tranches bien cuites accompagnées de cette salade légèrement vinaigrée et des cornichons plutôt doux. Simple mais parfaitement réalisé.


Dans les spécialités du jour, je choisis en plat principal le cochon  de lait de Tamworth rôti, caramel de pomme, sauce gravy. Le « Tamworth » est comme le nom l’indique une race originaire de la ville de Tamworth en Angleterre, proche des vieilles populations de porcs européens descendants directement du sanglier. Ce cochon s'est développé en Angleterre, aux États-unienne, au Canada et en Australie, avant de connaître un fort déclin. Les effectifs sont faibles aujourd'hui et il est menacé dans chacun des pays où il a été introduit. C’est est un porc rustique de taille moyenne, de couleur rouge doré à rouge foncé. Il produit d’ailleurs des jambons appréciés avec une faible teneur en gras. 

C’est d’ailleurs sur le comptoir de la cuisine que l’on peut observer la tête déposée sur une assiette… 


Un porc avec une chaire vraiment très suave, une peau très croustillante et une magnifique sauce que les britannique appelle « gravy ». Une sauce traditionnelle à base de jus de viande où l’on ajoute un peu de farine et du bouillon. Le goût de cette viande me rappelle un peu le type de cuisson des cochons de lait que l’on peut aussi déguster en Espagne.



Comme accompagnement une parfaite purée de pomme de terre.


J’ai vraiment passé un excellent moment dans cet endroit car commencer par le pub reste une très belle expérience. La salle de restaurant est très agréable, le service adéquat et la carte représente probablement ce qu’il y a de mieux dans la cuisine britannique. Tout est parfaitement cuisiné avec d’excellents produits et les préparations sont soignées. Si vous êtes intéressés à découvrir ce qu’est une excellente cuisine anglaise, voici sans aucun doute l’endroit.