Visites reportées tout d’abord a cause d’une
problématique de covid et ensuite un ratage dans la maintenance des jours d’ouverture
dans les réseaux sociaux, me voici finalement chez Xeixa.
Il faut déjà se féliciter que l’on trouve
ce genre d’établissement dans le quartier gothique car c’est devenu vraiment
problématique de trouver quelque chose supposé être de qualité ; les nouvelles
ouvertures se faisant principalement dans l’Eixample, Sant Antoni et en moindre
mesure à Poblenou, Sants et voilà.
Ensuite le cadre est plutôt assez unique
car le lieu est situé dans une petite ruelle, dans un palais du XVIIIe siècle, qui
abritait autrefois un bordel connu sous le nom de Cá la Mercè où Picasso s’est
ensuite inspiré pour peindre Les Demoiselles d’Avinyó (1907), l’un(e de ses
œuvres les plus importantes. Cette Casa Joan Gabriel est un bâtiment
situé au 44 de la rue Avinyó et au 7 de la rue de Carabassa,
classé bien culturel d'intérêt local. Il
abrite actuellement l’Espai Ferrer i Guàrdia, un athénée d’entités
géré par la fondation du même nom et de l’autre côté le restaurant.
Le restaurant possède également un espace
d’exposition qui est donné gratuitement aux artistes, en échange de quoi ils
allouent 5 % des ventes à People Help, une ONG dédiée à la lutte pour les
droits des femmes en Afghanistan. Txell est également responsable des
expositions de peinture et de photographie qui ont lieu à côté de la sortie
Avinyó.
Le nom « Xeixa » n’est pas une coïncidence
; est une ancienne variété de blé qui persiste à Ibiza, en hommage aux
marchands de blé génois qui possédaient autrefois ce majestueux bâtiment. Ce
choix est non seulement lié à l’identité locale, mais reflète également
l’engagement du restaurant envers des ingrédients authentiques et de qualité.
Entretemps cette table a remporté le prix
TheFork Awards 2024, mais bon…ce sont des votes qui à mes yeux n’ont pas de
grande valeur et de plus on sait qui est derrière cela…Comme tous les concours
ou liste, je n’y prête pas vraiment attention.
Les murs en pierre transpirent l’histoire
et l’intérieur est l’un des plus beaux que j’ai pu voir depuis très longtemps.
La rénovation étant de toute beauté. À l’intérieur, sous la voûte catalane, il
y a un bar bas type japonais et un four à bois Josper, puis tout autour un
certain nombre de tables.
On remarquera également les impressionnants
lustres artisanaux tous différents les uns des autres, qui sont plutôt assez
uniques dans leur genre et probablement réalisés pour cette pièce.
Dirigé par un trio de femmes très
motivées et visionnaires : Meritxell Pujol qui est en salle officiant en tant
que maitre d’hôtel, Sara Valls se trouvant seule dernière les fourneaux et
Carlota Paytuví, cet établissement est un clin d’œil à l’histoire de Barcelone, un espace méditerranéen, un
retour à l’origine, au simple et à l’essentiel.
Une cheffe valencienne de Castellón avec
une formation exceptionnelle au prestigieux Hofmann et une expérience dans des
coins gastronomiques renommés tels que Koy Shunka et Nuclo.
Une cuisine de marché qui ne se limite pas à être étiquetée comme cuisine catalane; elle
se définit comme étant une cuisine méditerranéenne, allant de l’Empordà à
Alicante et s’étendant jusqu’aux îles Baléares. Cuisine marquée par l’éternelle recherche de saveurs,
de fraîcheur et de contrastes, une cuisine pas forcément compliquée, mais vivante
en perpétuel changement avec le grill comme fil conducteur, une proposition qui
regarde toujours vers le végétal et les milieux marins. Tout se cuisinant ou
presque avec un four a bois Josper que l’on a plus besoin de présenter au vu du
succès phénoménal observé dans un grand nombre de restaurants.
Ici on met donc un accent particulier sur
le respect du produit : toujours de saison, local et exploitant au maximum sa
saveur. En guise de bienvenue, une excellente mise en bouche avec une sorte de brioche
ou plutôt bricelet avec au centre une mousse de morue comme un peu une brandade
allégée.
La carte est étendue avec des propositions
du jour, comme par exemple ces œufs brouillés aux champignons tels que
chanterelles et trompettes de la mort, le tout recouvert de bajoue ibérique, un
plat qui sent bon la forêt, qui se mange avec gourmandise et assez régressif.
Une très jolie huitre Gillardeau no 2 avec une
vinaigrette balsamique.
Un excellent carpaccio de crevettes rouges
avec sa bisque. La bisque étant un probable jus de tête travaillé afin de renforcer
le goût de ces magnifiques crevettes au goût sucré.
Une autre impressionnante huitre mais cette
fois-ci chaude avec une crème de maïs et du charbon. En fait d’un côté une
huitre fermée d’où s’échappe une fumée de la braise du Josper, de l’autre l’huitre
tiède avec sa crème de maïs. Dommage qu’une partie de cette huitre est surcuite,
comme quoi gérer de multiples plats dans un four a bois est complexe.
Le cannelloni aussi hors de la carte est à
vrai dire une déception. Une sauce fade, pas assez salée un peu trop basique
car une béchamel cela peut considérablement s’améliorer. Et puis ce plat est l’un
des plus courant en ville et ce ne sont pas les versions de qualité qui
manquent. Aussi, le prix est honnêtement exorbitant, car 28 euros pour trois
petits cannellonis, il ne faut pas non plus exagérer. Ensuite il y a si on le
souhaite, un supplément pour de la truffe vraiment très chichement servie je
crois a 6 ou 8 euros...C’est un peu franchement trop. La sauce additionnelle à
base de pomme ne me convainc pas trop en plus.
En revanche le calamar « a la
bruta », est une délicieuse combinaison de calamars cuits avec de la boutifarre
noire et de la soubressade, un hommage à la riche tradition culinaire des îles
Baléares. Cette approche créative et respectueuse des saveurs locales et
insulaires est une belle chose. Soubressade de la maison Cal Tomas.
Recommandé par un ancien sommelier de
Disfrutar, un Arinzano Hacienda Chardonnay D.O.P Pago de Arinzano. Un vin Très
expressif et dans le style des Chardonnays de Chivite. Nez d’agrumes et
d’exotiques. Une bouche avec du volume, un goût de réglisse, dense, profond et
minéral.
Incontestablement un lieu mémorable,
unique, historique et magnifiquement agencé. Un concept de restauration
parfaitement dans l’air du temps, intelligent, cohérent et respectueux de l’environnement.
Une cuisine gourmande, totalement focalisée sur le produit local et de saison
avec des techniques culinaires plutôt axées sur la braise. A priori la cheffe
semble être seule dans cette cuisine et gérer autant de plats et d’assiettes
avec comme principal outil la braise est selon moi un exercice périlleux qui peut
occasionner quelques ratés. Il faut également se rendre compte que certains
plats ont des prix un peu gonflés et que le ticket de sortie est un peu élevé
dans cette catégorie d’établissement.
Une très agréable soirée dans un lieu
vraiment unique à au moins visiter une fois, si pas plus.