mardi 11 juin 2024

Margarit, Barcelone

 

Voila une des plus intéressantes découvertes de cette année ! Déjà choisir un quartier tel que Poble Sec est une superbe idée et non pas un Eixample surpeuplé en tables ou même Gracia qui a tendance a sacrément se banaliser. Poble Sec a un certain charme, on y vient en connaissance de cause et l’atmosphère en dehors de la Carrer de Blai est toujours très agréable. L’été, certaines terrasses, places ont vraiment du charme et les quelques établissements de qualité sont principalement fréquentés par des locaux et/ou de réels amateurs de belles adresses.

Ici vous êtes chez Margarit et non pas la Taverna Can Margarit, même si les deux sont dans la même rue. Ce qui frappe tout d’abord, c’est combien cet établissement en coin de rue a particulièrement bien été conçu et rénové. On peut observer que la date mentionne 1935 car en réalité, il y avait déjà a cette adresse un premier restaurant qui portait ce nom.

Le chef et copropriétaire Stéfanos Balis bien que grec d'origine, a développé ses compétences culinaires ici à Barcelone chez le fameux Hofmann, Rilke et Pakta qui ont disparus et Informal.  Son concept étant d’effectuer un travail intélligent de corrélation entre recettes, élaborations et produits entre les cultures gastronomiques catalanes et grecques, ce qui donne des plats pleins d’ingéniosité avec de nouvelles saveurs. Concept parfois appliqué pour d’autres types de cuisine comme Mexicaine ou Péruvienne. Margarit entend avec cette cuisine grecque, offrir un regard réflexif sur le passé avec respect mais avec l'audace et les innovations des nouvelles générations. Une promenade le long de la côte méditerranéenne pour manger et boire du passé à nos jours.

Accompagné du sous-chef Jordi Aldeguer Fenoll qui eut travaillé par le passé chez Dos Pebrots et également Rilke, ils ont créé une proposition assez nouvelle dans cet établissement avec cette cuisine méditerranéenne souvent axée sur la cuisine de Grèce et même de Chypre avec parfois des mézès. Leurs produits sont particulièrement bien sélectionnés, par exemple leur pain au levain vient de Pa Serra une boulangerie familiale qui se trouve dans le quartier. Ils fabriquent le fromage à la maison, l'huile vient de leur famille de leurs terres en Grèce et les olives sont également grecques. Ils utilisent de la pâte phyllo et créent aussi leurs propres pitas.

L’intérieur a soigneusement été rénové avec une cuisine ouverte face à un bar le long du quel l’on peut manger une série de tables et dans le fond une table pour des groupes. Apparence industrielle, tout à fait dans le ton de ce qui se fait actuellement, un peu épuré, c’est finalement plutôt rare de trouver ce type de décoration dans Poble Sec, mais c’est vraiment absolument à propos.


Quelques fleurs, un grand lustre avec des origamis, des bouteilles exposées sur les hauts des murs.


Avant de passer commande, en guise d’amuse-bouche, de très bons beignets de morue.

Afin d’avoir une vue plus large de ce qui ce cuisine ici, c’est un menu « dégustation » à 42 euros que nous choisissons avec un mélange de plats souvent comme précédemment dit influencés par la Grèce. Par exemple, ces fèves, tomates séchées, feuilles de câpres. Un peu semblable à un houmous mais non pas avec de pois chiches mais cette autre légumineuse. Appelé normalement « koukim xera », parfumé à la coriandre, citron et huile d'olive, c'est un véritable délice. Poudre de tomate et ces étonnantes feuilles qui ont un goût âpre, salé, épicé et légèrement citronné, ce qui leur confère une note rafraîchissante. Les feuilles ont également un léger piquant qui ravive leur goût.

Nous continuons ave de la tarama, betterave et caroube. C’est donc une émulsion à base d’œufs de poisson en saumure avec de la chapelure ou du pain, du jus de citron, du jus d’oignon ou de l’huile d’olive. Ici la  version est plutôt astucieuse car un peu semblable à ed la brandade de morue en saveur et en texture (car ils utilisent des œufs de morue et non pas de cabillaud), incorporant la betterave et de la poudre de caroube dans l’équation. Un mezze qui, lorsque nous le goûtons, nous rappelle ces repas au bord de l’eau sur une île.

Un met un peu plus catalan avec de la lotte, haricots de Sant Pau, salade, radis, eau de tomate. Très frais, un plat qui pourrait un peu rappeler l’escalivada.

On se régalera avec cette omelette coulante, ragout de veau et pesto. Une interprétation grecque de la manière de faire des omelettes, que l’on retrouve dans les pays méditerranéens, cuite dans une poêle. C’est vraiment un voyage gustatif.

Un poisson avec un secreto de thon, légumes marinés, jus rôti. Je connais le secreto de porc – secret. Secret car cette pièce se cache sous le sternum du cochon. Avec le démontage suisse classique, la pièce peut être retirée sans restriction. Grâce à son fort persillage, le Secreto est extrêmement aromatique et convient particulièrement pour la poêle et les grillades. Mais ici c’est du poisson, donc j’imagine que c’est une pièce de thon avec les mêmes caractéristiques et cuisiné aussi de manière semblable. Un jus peut-être de viande et de la courgette en pickles.

En plat principal, une souris d’agneau préparée selon une inspiration palestinienne, avec yoghourt et herbes. On trouvera avec cette viande fondante, des pommes de terre, des tomates, de la menthe, le jus de la viande et peu de yaourt. C’est gourmand et dans le ton des autres plats.

Un premier dessert avec un Tulumba, saffran, pistache. Le Tulumba , une pâte frite trempée dans du sirop et présentée avec une élégante crème de safran et des pistaches hachées.  Les Tulumba sont un dessert d'origine turque également répandus dans les Balkans. C'est une pâte semblable à la pâte à choux, qui est frite jusqu'à ce qu'elle soit dorée, puis saupoudrée de sirop de sucre. Ici c’est vraiment une version gastronomique et de plus esthétique.

Autre très bon dessert avec un flan au lait caramélisé, crème glacée et crumble au cacao.

Une belle sélection de vins du pourtour méditerranéen, avec pour commencer un verre de Petit Viladomat 2021 qui est un vin blanc BIO produit par Viladomat-Arago (Gerard Maristany) dans la DO Penedes et élaboré à partir des cépages 90% xarel-lo et 10% macabeu.

Pour suivre un remarquable Vino de pasto 2022 La Escribana Macharnudo Tosca de Barajuelas Luis Pérez, un monocépage de Palomino fino conçu pour le plaisir quotidien. Fermenté et vieilli biologiquement en fûts de Jerez, il se distingue par sa salinité marquée en bouche. Au nez, puissant, avec une forte charge d’agrumes (zeste de citron) sur un fond épicé (curcuma, poivre de Cayenne).

Et un étonnant verre de vin rouge grec du domaine Sclavos. Evriviadis Sclavos est un pionnier des vins dits naturels. Il cultive des vignobles extrêmement anciens à Lixouri, Kefallonia, de manière biodynamique. L’attention portée aux détails caractérise l’ensemble de la cave, ce qui donne de merveilleux vins à la personnalité intense et au caractère distinctif. Ce Synodos est un assemblage de Mavrodaphne local et de Vostilidi blanc qui mûrit dans du vieux chêne et est mis en bouteille sans filetage et sans collage avec un minimum de SO2. Un nez complexe, avec des arômes révélateurs d’herbes de Mavrodaphne, de fruits rouges mûrs, de chocolat et de poudre de cacao ainsi que des notes cuirées.

Deux vins de desserts avec une autre découverte grec du même propriétaire, le Hivos Mavrodaphni of Cephalonia Vin Doux du Soleil 2022, un vin de dessert rouge fortifié élaboré à partir de vieilles vignes non greffées dans la partie orientale de Céphalonie. Onctueux, corsé, les raisins sont séchés au soleil avant d’être pressés pour concentrer la douceur et les arômes. 

Un Frère Parcé Rivesaltes 20 ans d’élevage en barrique, vin liquoreux à la robe ambrée laisse passer une douce lumière, un nez très riche allant sur la noix et la datte. 

Une très belle soirée dans un lieu assez unique, une palette de saveurs nouvelles en ville, des plats gourmands qui font voyager toujours avec un twist et une très belle et originale collection de vins, le tout avec un service compétent.

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