lundi 17 février 2025

Choral, Annecy

 

Je me demande bien pourquoi je ne suis pas revenu plus tôt dans cet établissement qui nous a encore ce soir vraiment ébloui. Une table vraiment différente et qui qui correspond vraiment au type de cuisine que j’apprécie aujourd’hui. Des produits de qualité soigneusement sélectionnés, des recettes inventives mais rien de farfelu, des associations très bien pensées, des cuissons absolument parfaites, des saveurs équilibrées et délicates qui oscillent souvent entre aromatiques, capiteuse mais parfois avec un peu d’acidité, voire une légère amertume. Des assiettes toujours différentes qui propose une large palette de goûts et toujours réalisées avec beaucoup de précision et de technique.


Puis Choral, ce n’est pas un restaurant de plus dans le centre, on n’y vient pas par hasard, on sait probablement un peu ce que l’on va y trouver, on sait aussi que l’on va y passer un magnifique moment. Pas le restaurant classique avec une structure où les cuisines se trouvent à l’arrière d’une salle, mais une seule et unique pièce, une cuisine ouverte, peut-être un peu plus d’une vingtaine de couverts, un espace assez zen, avec tables en bois baies vitrées sur un côté, banquette avec coussins et de l’autre la vue sur la cuisine.


Toujours bien entendu le même duo qui mène la barque avec le chef Alban Chanteloup et le sommelier Aymeric Velluz, avec deux personnes additionnelles en cuisine.


Ce soir un menu spécial, toujours très intéressant et intriguant. Pas le genre d’assiette que l’on trouvera ailleurs. Ce que je trouve parfait dans la cuisine du chef, ce sont des associations inattendues, la légèreté de ses assiettes qui jamais n’utilisent trop de corps gras comme beurre et crème ; ne vous attendez pas à une cuisine riche ou bourgeoise, mais a une cuisine pleine de fraicheur, de saison, toujours très gourmande et c’est cela la magie, réussir à rendre les assiettes gourmande sans abuser d’ingrédients qui en facilite la tâche.


Pas de demi glacé ou de type de sauce bien lourdes, mais des jus, des réductions, des marinades, des crèmes ou des éléments différents qui complètent subtilement les assiettes afin de ne pas trop tomber dans le trop évident. Je ne saurai pas décrire avec grande précision tous les éléments de chaque assiette, mais je vous garantis qu’il y aura toujours beaucoup de travail, des techniques pointues, des ingrédients parfois étonnants et jamais d’incohérences. Un repas qui sera accompagné des magnifiques pains de campagne au levain de seigle, farines de blé T80 et T110 et de seigle complet du Moulin Marion, eau filtrée, sel de Camargue, de la maison Aristide qui est devenu depuis l’une de mes boulangeries favorites.

Repas qui démarre avec des Amuses Gueules, le fameux bricelet salé au cumin farci d’une pâte de pistache et accompagné d’un morceau de betterave confit, peut-être un peu traité comme une charcuterie un peu fumée, le tout avec des graines de sésame.


Le choix des vins c’est Aymeric qui nous conseille car la carte change constamment, il faut lui dire ce que l’on aime ou pas sachant que la plupart des vins sont naturels ou bio et que n’étant pas trop familier avec ce type de vignerons, je m’en remets à ses connaissances. Un vin blanc sur le cépage roussanne avec un Vin de France, de chez Pierre Bourlier en Ardèche, qui réhabilite des terrasses ancestrales depuis 2015, sur 1,5 hectare de domaine. Avec une approche traditionnelle et écologique, il travaille principalement le Gamay, accompagné de Pinot Noir et de Roussanne comme ici.


Première assiette avec Scarole, Huitre, Câpres et Citron. Scarole braisée à la plancha, l’huitre chaude au centre, des saveurs un peu acidulées, une poudre de pain sur le dessus, quelques petites sauces pour accompagner, c’est très frais et original.


Le prochain sera l’un des plus mémorables du repas avec de la Noix et Barde de Saint-Jacques, Navet, Truffe Melanosporum. Une noix cloutée de truffe où l’on joue avec la structure moelleuse du crustacé et le croquant de la truffe, les barbes magnifiquement préparées. On jette souvent la barbe des Saint-Jacques, pleines de sables quand elles sont pêchées à la drague. Pour les utiliser, on doit passer par la case rinçage à rallonge. C’est généralement fastidieux et on perd beaucoup de goût. Lorsqu’elles sont pêchées en plongée, à la main, les coquilles Saint-Jacques ne contiennent quasiment zéro grain de sable. On récupère donc les barbes sans les rincer, pour garder un maximum de goût. Ici fondante, cuite dans un bouillon vraiment très parfumé avec un superbe navet d’un goût enivrant. Un plat ou toutes les saveurs se mélangent à la perfection.


Toujours un plat magnifique avec l’Omble Chevalier, Endive et Kumquat. Ce poisson est un salmonidé des eaux froides et oxygénées des lacs de montagne. C’est le poisson d’eau douce dont l’aire de répartition est la plus nordique. Il est surtout présent dans les trois grands lacs alpins : Léman, Bourget et Annecy. La qualité de sa chair en fait un poisson prisé par les grands restaurants. Dans une saumure qui fait une presque cuisson, sa texture est parfaite, la cuisson en superficie avec une fumaison faite d’herbes, de la salade traitée comme de l’algue, l’endive en filaments et une sauce qui pourrait un peu rappeler une version allégée d’un beurre blanc. L’agrume amenant une touche superbe en bouche.


Nous passerons à des verres de vins rouge avec un premier qui fût vraiment une découverte car inattendue, un Fleurie ! Issue de trois terroirs de l'appellation Fleurie ("Chapelle des Bois", "Champagne", "Levratière"), cette cuvée III se montre à l'image du millésime ample, mûre et généreuse. La bouche est lumineuse avec des notes de framboise et de fraise, assez familières au Beaujolais.


Le plat principal est une autre très belle réussite avec du Cerf, Chou Chinois, Prune, et Petit Saumur, Truffe Melanosporum. Une viande en fine tranches, un délicieux jus de viande, une petite purée de prune qui semble avoir été travaillée entre autres au genièvre, le chou à la plancha, une feuille de chicorée pour la fraicheur de l’assiette. Comme accompagnement des champignons dont de la truffe dans une coupelle.



Avant les desserts, un autre vin avec un Chulo de la maison dréno, aromatique sur les fruits rouges au nez. En bouche un côté perlant, fluidité et fraîcheur.

Premier dessert des plus rafraichissant appelé Agrumes, graines de Courges, Epices Douces. A base de mandarines corses, dont un sorbet, ce n’est pas trop sucré, exactement le type de dessert que j’apprécie.

Et pour suivre un étonnant vin avec le Karaka de La Voluta qui est un domaine situé à Cucugnan dans les Hautes-Corbières, un vin de dessert avec une fine acidité.

Puis le must avec la tarte au Chocolat Cubain du torréfacteur de chocolat Nicolas Berger, dessert emblématique de l’établissement qui est assurément l’un de mes meilleurs desserts au chocolat que je connaisse. Et celui-ci accompagné d’une bière ! Et cela fonctionna à merveille. Une bière noire indigène d’agrumes, macérée avec des pomelos, des mandarines du domaine de la Taste et des combawas Corses.


Un repas de haut vol, des assiettes lumineuses avec des ingrédients de grande qualité, toujours des associations innovantes et gourmande, un chef qui révolutionne la cuisine à sa manière et sans concession, un vrai moment de bonheur et tout cela avec une belle sélection de vins souvent très surprenants.

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