jeudi 31 juillet 2025

Chez Bruno, Lorgues

 

Je n’avais encore jamais eu la chance d’aller manger chez le légendaire Bruno de Lorgues. Et voila que ce dernier disparu en janvier de cette année. Pour celles et ceux qui n’ont peut-être pas entendu parler de l’établissement Chez Bruno, ce monsieur fût tout bonnement le roi de la truffe et ses menus ou plutôt carte, complétement axés sur ce produit.

Situé dans un magnifique mas provençal du XVIIIe siècle, l’été c’est sur cette fabuleuse terrasse que vous pourrez déjeuner ou diner si évidemment le soir. C’est une adresse gastronomique classique, élégante avec une cuisine raffinée. Il faut savoir que les fils ont repris l’établissement et c’était déjà eux qui assumaient la cuisine et l’organisation depuis un certain temps, donc aucune crainte sur un changement d’orientation.

Un mas qui date de 1920 et qui fût crée par l’arrière-grand-mère Mariette. Un vrai havre de paix comme on pourrait se l’imaginer presque dans un rêve. A l’origine donc c’était Clément Bruno en tant que gardien des traditions culinaires qui créa cette proposition autour de la truffe. Aujourd’hui c’est donc l’un de ses fils, Benjamin Bruno qui a repris l’affaire familiale. Benjamin perpétue donc la tradition et la réputation de la dynastie Bruno en sublimant à sa manière ce produit noble. Le restaurant Bruno, né en 1983, est étoilé depuis plus de 35 ans !


La brigade est de taille car si mes informations sont correctes, il y aurait une cinquantaine de personne dans cet établissement et une vingtaine en cuisine, juste pour donner une idée de la taille de l’entreprise.


Maintenant ce qu’il faut bien réaliser, c’est qu’il y a des saisons pour la truffe et celle d’été à mon avis a beaucoup moins d’intérêt que celle d’hiver tout simplement parce qu’elle n’est jamais très odoriférante. Pour cette raison, la truffe d’été est bien moins couteuse et bien entendu, cela changera le prix du menu ou du repas en fonction de ce que vous choisirez ! On dira que pour une expérience complète de qualité « sans surprise », il est théoriquement préférable de venir ici en hiver... Mais…


La truffe…il n’y en a pas qu’en France et « la truffe d’hiver » est disponible dans d’autres coins du globe, il faut simplement en être conscient. Maintenant il faut aussi comprendre que cela ne signifie pas que n’étant pas Française, qu’elle ne soit pas de bonne qualité ! Et parfois elle est même meilleure !


Pour ces raisons il faut bien comprendre ce que l’on recherche, que les qualités et origines varient en fonction des saisons, mais que Chez Bruno s’assure d’avoir une qualité de produit irréprochable quelque soit la provenance. Donc ne soyez pas surpris de voir des différences de prix pour des menus à base de truffes noires d’été ou d'hiver, l’aestivum ou la melanosporum, mais aussi la magnatum pico, albidum pico, tuber brumales, la tuber aestivum ou l’uncinatum. Pour le menu de base c’est de la aestivum. On peut panacher ce menu avec deux plats à base truffe tuber aestivum et un plat de truffe tuber melanosporum, ou alors tout avec la dernière. Entre le prix du premier menu avec la première offre et la troisième, le tarif est près du double. Il y a également une proposition a base de truffe brumale qui est est un champignon souterrain comestible très recherché pour sa saveur distinctive et son arôme intense. Cette truffe est caractérisée par sa couleur noir charbon extérieure, sa chair marbrée de blanc et son parfum complexe et terreux. Je ne suis plus très sur, mais de mémoire la truffe melanosporum provenait d’Australie ou de Tasmanie. Maintenant à vous de décider de savoir pourquoi vous êtes venus ici et décider quel type de truffe vous voulez déguster car l’expérience sera relativement différente pour un même plat !


J’insiste mais apprécier un plat avec un type de truffe sera une expérience très différente avec une autre truffe! Donc à vous de comprendre que le budget en dépend. Dans notre cas, nous sélectionnerons le « menu du jour » en trois plats, deux à base de truffe tuber aestivum et un à base de truffe noire tuber melanosporum, tarifé à 135 EUR. Un menu que je rappelle qui change fréquemment.

Un apéritif de bienvenue qui est verre de rosé avec une liqueur qui est ensuite accompagné de pain grillé à la truffe. Le pain est croustillant, généreusement recouvert de lamelles de truffes. De couleur foncée à l'extérieur et dotée d'une croûte pyramidale prononcée, sa principale différence en termes d'image par rapport à la truffe noire se trouve à l'intérieur, de couleur crème avec des nuances de noisette. Un peu d’huile d’olive sur le dessus. Comme on le sait, la truffe d'été a un goût moins intense que la truffe d'hiver. Il peut être intéressant d'utiliser la truffe d'été lorsque nous ne voulons pas que l'arôme de la truffe soit le protagoniste d’un plat, mais plutôt un excellent aliment secondaire, un accompagnement unique et incomparable comme sur ce pain.


L’amuse-bouche du jour est une agréable mousse de pois-chiche type houmous servie dans une coupe.


Et une tartelette à la chaire de crabe avec de la truffe râpée sur le dessus.



Une entrée baptisée sous le soleil des collines provençales, caviar de truffes, blinis, ricotta, tomates confites, et huile d’olive de nos moulins. Le blini est parfait, très léger et vraiment excellent, quelques réserves sur ce caviar de truffes où l’on perd la saveur de celle-ci. Il y a un léger déséquilibre dans la préparation.




La tomate confite est excellente avec cette sauce et cette tranche de truffe sur le dessus.


Le magnifique panier de truffes arrive à table qui sera utilisé pour le plat d’anthologie qui suivra, la pomme de terre cuite au four accompagnée d’une crème de truffe Tuber Albidum pico. Je tiens à préciser que cette délicieuse crème de truffe Bianchetti (Tuber Albidum Pico) a des caractéristiques très proches de la célèbre truffe blanche d'Italie (Tuber Magnatum Pico ou truffe d'Alba). Généralement récoltée en Italie de janvier à mars, elle est beaucoup plus répandue et donc son prix est beaucoup moins élevé. Mais cette pomme de terre avec cette râpée de truffes tuber melanosporum est absolument divine. On joue avec le craquant et le moelleux. Un plat inscrit dans ma mémoire à tout jamais.





Le plat principal est une autre très grande réussite. Le homard bleu de Bretagne tout simplement accompagné de sa bisque légère, légumes du moment et râpée de truffes. Le homard est probablement l’un des crustacés les plus compliqué à cuisiner et il faut énormément de technique pour qu’il soit encore moelleux en son centre sans aucune surcuisson ce qui est le cas ici. Très souvent c’est caoutchouteux si mal cuisiné et ici c’est une perfection.


Les assiettes d’accompagnement arrivent en même temps, des petits légumes avec de la truffe sur le dessus, une cuillère avec un tartare de langoustines, puis le dressage final est exécuté à table.


Le homard déposé sur les légumes, puis est nappé d’une fantastique bisque à la saveur parfaite, de la truffe aestivum pour ce plat qui est probablement l’un des meilleurs homards que j’aie mangé.



Le fromage sélectionné ce jour par le chef Benjamin Bruno dont je ne me rappellerai plus le nom.


Puis les desserts du chef pâtissier, Damien Goelen. Et là c’est un peu de la désillusion car c’est amené sur un plateau un peu comme un chariot, c’est visuel, mais ce n’est vraiment pas au niveau du restant de la cuisine. Pour un étoilé on s’attendrait à des desserts un peu sophistiqués, gastronomique et servis comme des plats. Ce sont des « pâtisseries » pas très fines. Et la pavlova est probablement la pire que j’aie mangé avec une déplaisante saveur type amande amère, amaretto ou je ne sais quoi…




La tartelette a la framboise est correcte mais sans plus. On regrette de ne pas avoir eu un dessert un peu créatif aussi basé sur la truffe, ce qui semble être parfois le cas.


Le service ne fût pas vraiment à la hauteur avec des passages entre tables permanents, des desserts qui tombent deux fois des plateaux dans les escaliers, des disputes devant le client, il y a beaucoup à redire sur ce point-là. Un service qui n’a rien de sophistiqué et des tables sont entassées les unes sur les autres si bien que vous avez accès à la conversation des autres.

Un chanteur d’opéra qui intervient en fin de repas¸ pas sûr que cela soit approprié, question de goût.


La carte des vins est complète mais franchement les prix sont complètement surfaits. Nous avons eu un délicieux Rimauresq 2023 Quintessence parfaitement recommandé par la jeune sommelière qui par la suite n’est jamais revenue à table. Une bouteille, qui dans le commerce vaut 28 EUR tarifée à 130 EUR…


Chez Bruno a toujours été l’un des fleurons de la gastronomie française et lorsque l’on apprécie la truffe, il s’agit d’une adresse incontournable. Une adresse où l’on vient entre amis, en couple ou en famille, un restaurant qui vous propose, le temps de quelques heures, un réel voyage autour de la truffe. Il y eut quelques bévues et il ne faudrait pas que cela soit une tendance mais que des actions correctives soient prises. N’ayant pas vu Samuel, le frère de Benjamin, gestionnaire de l'établissement et directeur de salle peut expliquer les problèmes vécus.

Mais ce restaurant est une institution. Des personnalités du monde entier viennent à sa table pour déguster une cuisine française pleine de générosité, un hommage au terroir et à la tradition. Espérons que ces observations seront considérées par l’établissement.

 

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